Patrick Weber : «Pas là pour faire le service de presse du Palais !»

Patrick Weber © RTBF/Fred Guerdin
Pierre Bertinchamps
Pierre Bertinchamps Journaliste

Ce vendredi à 20h20 sur La Une, le chroniqueur royal relance une émission sur les têtes couronnées : «Gotha».

Que ce soit sur la RTBF ou RTL, les magazines sur la royauté ont été rangés au placard après avoir usé le concept pendant une vingtaine d’années. Pourtant, le sujet intéresse, attire, voire fait rêver… Et les audiences des programmes spéciaux à la suite du décès de la Reine Elizabeth II d’Angleterre le prouvent.

Bien avant le deuil qui a frappé Buckingham Palace, la RTBF avait annoncé le retour d’un magazine sur l’actualité des têtes couronnées, «Gotha», présenté par Patrick Weber. «On me demandait tout le temps pourquoi il n’y avait plus un programme du genre à la télévision», explique le journaliste. «Je donne beaucoup de conférence et je fais des visites guidées où je rencontre le téléspectateur, et je me rends compte qu’il y a une attente. J’ai proposé le projet à la RTBF, et voilà… J’avais très envie que ça se concrétise.»

Il y a vraiment une attente ?

Les émissions qui traitaient ce type d’information ont disparu alors que le public les appréciait. Elles étaient différentes selon leur positionnement ou la façon dont on voulait traiter l’information. Je continue de penser qu’il y a un créneau pour ce type d’info, mais présenté de façon différente. Je le vois aussi au travers du «Temps d’une histoire» ou des soirées spéciales sur des sujets royaux : on a constaté que le public répondait présent.

Ne serait-ce pas un thème qui n’intéresse qu’un public âgé ?

Je déteste ce genre de discours. Je suis les réseaux sociaux et Youtube, et les «stars» que l’on voit le plus et qui sont les plus fédératrices, ce sont des personnalités comme Kate, Meghan, etc… C’est comme dire que la cuisine ou la santé ce sont des trucs de vieux. Ce qui importe, c’est l’angle du traitement. Le racisme de l’âge, je n’aime vraiment pas ça. Tout comme faire du jeunisme, c’est idiot… Bien sûr, parler de ces sujets comme il y a vingt ou trente ans, ce n’est plus possible aujourd’hui. L’époque a changé. Refaire le «Place Royale» d’Anne Quevrin, comme en 1994, ça ne fonctionnerait plus. Les gens n’ont plus envie de ça.

«Gotha» sera plus jeune ?

Comparé à «Place Royale», nous serons en mensuel et c’est la grande différence, parce qu’on ne fera pas un suivi de l’actualité royale au sens strict. Bien sûr, elle sera notre trame de fond, mais on aura une thématique dans chaque émission. Autour de cette thématique, on va poser des questions et apprendre des choses. Un exemple : expliquer aux téléspectateurs pourquoi William n’est pas devenu roi à la place de Charles. C’est une question qu’on m’a posé 100 fois… On va tenter d’y répondre avec toute la rigueur journalistique. Il y aura aussi de l’humeur et de l’humour mais sans se moquer. L’habillage sera chic et contemporain.

Le dossier de presse évoque aussi la nouvelle génération qui arrive sur le trône… La communication royale va changer ?

Il y a un peu de ça… Les émissions royales sont nées après l’accession au trône d’Albert II. On s’est rendu compte qu’en Belgique, on avait une vraie famille royale avec un couple et des enfants. Le temps a fait son œuvre, mais la nouvelle génération est là. Que ce soit William et Kate en Angleterre, Elisabeth chez nous, Leonor d’Espagne ou Estelle et Victoria en Suède,… Cette nouvelle génération fait changer les choses. Les princesses de demain ou les princesses 2.0 sont beaucoup plus préparées que la génération précédente. Forcément, les réseaux sociaux sont passés par là. Avant, une princesse – et j’ai écrit des livres sur ça – on leur demandait juste sois belle et tais-toi. Il fallait bien s’habiller, faire un beau mariage et donner de beaux enfants. Point. Ce n’est plus comme ça. Pour le futur, je pense, que ce sera un atout pour ces royaumes (Belgique, Espagne, Suède,…) d’avoir une représentation féminine au sommet. La perception des choses va être modifiée.

Vous avez eu des échos du Palais sur ce qu’ils pensent d’un retour d’une émission royale ?

Demandez-leur ! (Rires) Nous ne serons pas là pour faire le service de presse du Palais. On ne couvrira plus les inaugurations et les sorties du Roi ou de la Reine. L’idée de «Gotha», ce n’est pas ça.

Arriver un mois après les cérémonies du décès de la Reine d’Angleterre, c’est un handicap ?

Non, on avait prévu dès le départ de lancer le programme aux alentours des 21 ans de la Princesse Elisabeth (le 25 octobre, NDLR). On va s’y tenir. Il y a eu tellement de choses autour de la Reine Elizabeth II que je crois qu’on aurait été noyés dans le flot. Toutes les chaînes se sont déchaînées autour de l’événement, et on aurait eu beaucoup de peine à exister au milieu de tout ça. Ce qu’on va faire, c’est un bilan pour décrypter comment le monde a vécu le décès, comment Charles III débute son règne, le partage des tâches entre Charles et William,…

Pourquoi ce type de programme n’existe que dans des monarchies ?

Je ne dirais pas que c’est un sujet qui ne passe que dans les monarchies. J’ai pas mal travaillé pour «50 min Inside». En télé, il y a eu des tentatives ailleurs mais ce sont surtout les sites et les magazines comme Point de vue, Paris Match ou Gala qui fonctionnent bien. Les Français n’ont pas de monarchie mais ça les passionne. Ils en ont fait bien plus sur la Reine d’Angleterre que nous. Ces dernières années, j’ai collaboré à pas mal de documentaires pour M6, C8 ou même la ZDF, en Allemagne. C’est un sujet qui intéresse, et nous sommes au bon moment dans cette bascule de génération. On se questionne sur le futur. Il y a encore 10 monarchies en Europe, qui sont des démocraties plus en pointe par rapport à d’autres pays. C’est un paradoxe. La chose mystérieuse autour de la monarchie, c’est pourquoi il y un tel engouement pour l’anniversaire d’une vieille dame ? Pourquoi en Belgique, des centaines de milliers de personnes se sont retrouvées devant les grilles du palais quand Baudouin est mort ? Ce sont des choses que la société partage.

Vous rêvez de recevoir la Princesse Elisabeth ?

Bien sûr ! J’ai eu la chance et le privilège de faire l’interview de Philippe et Mathilde pour leurs 20 ans de mariage. C’était la première fois que ça se faisait. C’est un moment unique que je n’oublierai pas… Je trouve qu’il faut à la fois avoir une petite ouverture du Palais vis-à-vis des médias, mais en même temps, garder une certaine distance. Les princes et princesses d’aujourd’hui sont devenus des influenceurs malgré eux. Quand Elisabeth porte une robe ou un jean, les ventes du même vêtement augmentent. Si Elisabeth peut répondre à une interview j’en serais le plus heureux. Et ce serait intéressant de l’avoir avant qu’elle ne devienne reine.

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