[Enquête] Télé et coronavirus : vos séries et émissions préférées menacées ?

«Septante et un», «Fort Boyard et «Grey's Anatomy» : autant de programmes impactés par le coronavirus © RTL/France 2
Pierre Bertinchamps
Pierre Bertinchamps Journaliste

Tournages arrêtés, programmes annulés, émissions reportées… Les grilles de cet été seront sans doute très light. Petit tour d’horizon de ce qui nous attend (ou pas).

LES JEUX

Les grands rendez-vous de l’été sont compromis. TF1 a déjà pu faire le deuil de «Ninja Warrior». Le divertissement devait être tourné en avril à Cannes, juste avant que le 7e Art ne prenne possession de la Croisette. La saison 5 ne sera donc pas diffusée cet été. La chaîne française planche sur un report des enregistrements en septembre, avant que Denis Brogniart ne soit pris pour une nouvelle salve de «Koh Lanta».

Annoncée à grands frais, la nouvelle version d’«Intervilles», avec Nagui, mais sans les vachettes, devait être mise en boîte à Disneyland Paris, également en avril. Le gouvernement français a fait fermer le parc jusqu’à nouvel ordre. France 2 reporte le tournage sans préciser les nouvelles dates.

Le «Fort Boyard» rouvre pour la télé au début du mois de mai. Oui, mais en amont, plus d’une centaine de personnes doivent s’occuper du matériel et installer les nouvelles pièces du jeu. Démarches qui n’ont pas encore pu être effectuées. ALP Productions vient de repousser le tournage de quinze jours. Sera-ce suffisant ou faudra-t-il annuler la diffusion estivale de «Fort Boyard» ? Un scénario que n’ose imaginer France 2 qui se trouverait bien dépourvue sans ce programme de prime-time.

LES ÉMISSIONS EN PUBLIC

Si des programmes comme «À votre avis» (La Une), «Quotidien» (TMC) ou «Touche pas à mon poste !» (C8) peuvent être réalisés en mode «confiné» ou sans public, les jeux et les divertissements n’ont pas la même saveur dans un studio vide. En France, des numéros inédits des «12 coups de midi» (TF1), «Tout le monde veut prendre sa place» (France 2) ou «N’oubliez pas les paroles» (La Deux, France 2) ont été mis en boîte juste avant le confinement. Le public et les candidats ont dû signer une attestation certifiant qu’ils n’avaient pas été en contact avec des personnes atteintes du covid-19, qu’ils ne s’étaient pas rendus dans des zones à risques et que leur température était prise deux fois par jour. TF1 et France 2 ont donc du stock…

De nouveaux enregistrements de «Septante et un» devaient avoir lieu durant les vacances de Pâques. Pour tenir le plus longtemps possible, RTL-TVI propose désormais deux anciens numéros par semaine et trois inédits. Jean-Michel Zecca pourra donc tenir encore quelques semaines.

Allonger la saison, c’est la tactique de TF1 pour «The Voice – La plus belle voix». En réduisant la durée des émissions de la phase des «K.O.», leur permettant de faire deux numéros à partir d’un classique plus long. Ce sont ainsi deux samedis de gagnés pour reporter la phase des live. ITV Studios espère que le confinement sera levé en mai pour permettre aux talents de regagner le plateau. À moins qu’un déconfinement progressif n’empêche les rassemblements dans un lieu fermé…

DÉCONVENUES EN SÉRIE

Pour les séries, on pourrait parler de double peine. D’un côté, il y a les tournages qui sont suspendus, et de l’autre le doublage qui n’est plus possible, règles de distanciation sociale obligent. C’est le cas de «Prodigal Son» sur La Deux : plus d’épisodes doublés en stock !

Les séries françaises sont, elles aussi, à l’arrêt. Les trois quotidiennes – «Plus belle la vie» (La Deux, France 3), «Demain nous appartient» (La Une, TF1), «Un si grand soleil» (RTL-TVI, France 2) – ne tournent plus, et la reprise pourrait être un casse-tête pour les comédiens qui ont aussi des engagements par ailleurs. Ce sera le cas pour «Un si grand soleil» (France 2).

«Plus Belle la vie» est toujours à l’antenne sur la RTBF et France 3. Mais les studios du Mistral ont fermé le 17 mars dernier. Et comme il faut compter quatre ou cinq semaines entre le tournage et la diffusion…, la série sera diffusée jusqu’au mercredi 29 avril. À partir du jeudi 30, La Deux la remplace par «Au rythme de la vie», une série allemande évoquant la vie sentimentale et professionnelle d’un groupe de jeunes Berlinois.

À Lille, la nouvelle saison des «Petits meurtres d’Agatha Christie» (La Une, France 2), qui se déroule dans les années 1970, doit démarrer sa production le 20 avril prochain. Il n’en sera rien. Un retour à la normale, en France, n’est pas envisagé avant juillet, au plus tôt, ou septembre, au plus tard. –

Aux États-Unis, le coronavirus a déstabilisé Hollywood, mettant au frigo «Grey’s Anatomy» (RTL-TVI, TF1) ou «NCIS : enquêtes spéciales».

Le 13 mars dernier, Netflix a suspendu tous ses tournages en Amérique du Nord, avec des conséquences sur les séries «Stranger Things», «Russian Doll», «Grace & Frankie» ou «Riverdale».

Chez Amazon Prime, c’est la très attendue série «Le Seigneur des Anneaux» qui est en attente. Même scénario chez Disney qui patiente avant de reprendre la production des nouveautés Marvel.

LE DÉSARROI DU 7E ART

Avec les séries, le cinéma est aussi fortement touché. Les remakes des classiques de Disney, «La Petite Sirène», «Peter Pan», «Chéri, j’ai rétréci les gosses» ou «Maman, j’ai raté l’avion» sont en pause. Comme le biopic d’Elvis Presley, avec Tom Hanks, l’acteur américain ayant été détecté positif au covid-19 sur le tournage, en Australie. Universal, de son côté, a mis à l’arrêt la production de «Jurassic World : Dominion», le troisième volet de la saga, qui avait débuté à Hawaii…

Même constat pour les sorties. «Tous les majors ont repoussé les sorties de leurs grosses cartouches, comme le «James Bond» ou «Mulan»», explique Cathy Immelen, journaliste cinéma à la RTBF. «Ils sortiront en octobre, novembre et décembre. Avec de gros risques d’embouteillage. J’ai peur que des films plus fragiles soient sacrifiés sur l’autel des blockbusters. Après une période d’inactivité, les cinémas voudront être très vite rentables pour couvrir les pertes du printemps.»

Autre souci : l’annulation des festivals. «Un prix est un gage de succès en salle», ajoute Cathy Immelen. «Sans sa Palme d’or, «Parasite» n’aurait pas fait un tel carton. Mais un festival, c’est aussi un lieu d’achat pour les distributeurs. Un marché du cinéma où se déroulent des milliers d’échanges commerciaux et de prévisionnages. Il va falloir doper la créativité pour compenser cette perte, monter des festivals en ligne, par exemple.»

Cet article est paru dans le magazine Télépro du 16/4/2020

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