Vaccination anticovid et effets secondaires géopolitiques !

Le 8 décembre 2020, la Britannique Margaret Keenan recevait la première injection de vaccin anticovid en Europe © Isopix

La vaccination contre le covid n’a pas qu’un impact sanitaire. Diplomatie et géopolitique sont aussi atteintes. Ce mardi à 22h55, Arte diffuse le documentaire «La Diplomatie du vaccin».

Elle s’appelle Margaret Keenan, elle a 90 ans. Ce mardi 8 décembre 2020, elle prend la pose devant des photographes et des cameramen venus à Coventry pour partager le moment avec le monde entier. La retraitée britannique sera la première Occidentale à recevoir le vaccin Pfizer contre le covid-19.

L’instant est symbolique. Symbole de l’espoir de se protéger de la maladie. Symbole aussi d’une course au vaccin synonyme de victoire politique pour ceux qui franchiront les premiers la ligne. Tandis que Miss Keenan reçoit le précieux sérum, en coulisse, Boris Johnson, le Premier ministre de sa Gracieuse Majesté, se frotte sans doute les mains. Il vient de faire d’une seule dose plusieurs piqûres.

En interne, il fait taire ses détracteurs qui l’avait montré du doigt pour sa gestion calamiteuse du début de la crise sanitaire. À l’international, il fait un pied-de-nez à l’Europe en plein Brexit douloureux. Quant aux États-Unis, ils doivent sans doute encore se demander comment le locataire du 10 Downing Street s’y est pris pour leur brûler la politesse.

En effet, il a permis à une de ses concitoyennes, de profiter de ce produit américain avant qu’il soit utilisé au pays de l’Oncle Sam. Toute historique qu’elle soit, cette vaccination ne constitue qu’un épisode d’une longue série mettant en scène covid et diplomatie.

La saga des masques

Au début de la pandémie, c’est autour des masques chirurgicaux que les tensions se cristallisent. On parle alors de «diplomatie des masques» et c’est la Chine qui est à la manœuvre. Elle entend redorer son image (et plus si affinité). Pour y parvenir, elle table sur la crise des masques chirurgicaux.

Face aux problèmes d’approvisionnement (de nombreuses nations ont externalisé leur production), la Chine exporte en masse. On se souvient des images de conteneurs made in China arrivant à l’aéroport de Bierset remplis de matériel médical. Le problème, c’est la fiabilité des masques… Ce n’est que partie remise.

Soft Power

Très vite, les labos pharmaceutiques de la planète se lancent sur la piste d’un vaccin. L’été 2020, l’OMS recense 184 vaccins contre le covid-19 en cours de développement préclinique et 105 vaccins en développement clinique. Aux côtés des États-Unis, dans une moindre mesure de l’Europe, de l’Inde, et de la Grande-Bretagne, la Chine et la Russie sont dans la course. La vaccination devient un enjeu diplomatique.

Pour le site d’information Touteleurope.eu, les deux superpuissances destinent leurs stocks de produits non seulement à immuniser leur population, mais aussi «à tisser des relations plus étroites avec des alliés, voire en trouver d’autres sur la scène internationale».

C’est ainsi qu’au printemps dernier, 74 pays avaient signé des contrats d’exportations avec la Russie, 32 avec la Chine. Une Chine magnanime qui refusait pourtant d’approvisionner un pays comme le Paraguay : il reconnaît Taïwan. Le Kremlin négocie avec des alliés dits «historiques» comme la Serbie, mais aussi avec la Hongrie, l’Allemagne et des pays d’Afrique du Nord.

La Chine sur tous les fronts

La Chine n’est pas en reste. Elle aussi entretient ses relations avec des pays amis de longue date comme le Cambodge. En outre, elle lorgne vers les partenaires de son projet stratégique «la nouvelle route de la soie». Il relie économiquement la Chine à l’Europe et concerne aussi l’Afrique et l’Amérique latine (dont certaines ressources, agricoles notamment, intéressent Pékin).

Pour ce qui est de l’Afrique, alors que la politique de «nationalisme vaccinal» des Occidentaux, et singulièrement des Européens, y est fermement dénoncée, elle apprend que la Chine lui offre un milliard de doses de vaccins anticovid sous la forme de dons ou de soutien à la production locale.

Cet article est paru dans le Télépro du 16/12/2021

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