Soufisme, l’islam spirituel

Parmi les représentants les plus connus en Occident, l’ordre des mevlevi, aussi appelés derviches tourneurs © Getty Images
Alice Kriescher Journaliste

Fruit d’une tradition millénaire, le soufisme prône l’abandon de l’ego et l’introspection pour atteindre l’union avec Dieu. Ce samedi à 17h50, Arte part à sa découverte avec le documentaire «Soufis, les mystiques du Nil».

Au VIIIe siècle, certains musulmans, désireux de rencontrer Dieu intérieurement, se retirent aux confins du désert, en Syrie et en Égypte notamment, pour privilégier une expérience initiatique personnelle face à la démarche communautaire classique. La voie mystique de l’islam est née.

Bien que basé sur la révélation coranique, le soufisme insiste sur l’aspect spirituel de la religion plutôt que de s’attacher strictement à la lettre du texte sacré. L’étymologie du terme «soufi» est multiple. «Pour certains, il provient du mot al-souf qui signifie laine rugueuse. Cette laine était portée par les soufis durant le premier siècle de l’islam pour montrer qu’ils se détachaient du monde matériel et menaient une vie simple, à l’image du Prophète Mahomet», indique le magazine Ça m’intéresse.

Un dénuement matériel, mais aussi spirituel, puisque le soufisme tend vers une pratique désintéressée de la religion : il ne faut pas prier par crainte de l’enfer, ni dans l’espoir d’accéder au paradis.

Contact multiforme

«Une des différences essentielles entre soufisme et la démarche traditionnelle de la religion musulmane (où les prières rituelles ont leurs horaires et leurs limites fixés) est la liberté avec laquelle le fidèle entre en contact avec Dieu», explique Le Larousse.

«Pour être en lien avec le divin, les soufis utilisent la musique et la danse. Cette psalmodie, qui engage tout le corps en mouvement, est un ancrage dans le moment présent», détaille TV5Monde.

Parmi les représentants les plus connus, en Occident, de ces prières rythmées : l’ordre des mevlevi, aussi appelés derviches tourneurs. Chez les soufis, la liberté spirituelle reste néanmoins organisée, en l’occurrence, sous forme de confréries. Ainsi, les adeptes se rassemblent autour d’un cheikh, comprenez un maître, qui dispense méthodes d’initiation, points de repères et techniques de méditation qui lui sont propres.

«Autour du cheikh, s’articule la hiérarchie des lieutenants, des disciples, des aspirants qui obéissent à une discipline stricte», indique La Croix. «Ainsi naît la confrérie, tariqa en arabe, littéralement «la voie», ce qui traduit l’idée du cheminement initiatique vers Dieu.»

Le prix de la liberté

Considéré comme ésotérique au sein de l’islam, le soufisme, dont le nombre de pratiquants est difficilement estimable, n’a pas échappé aux attaques d’extrémistes religieux ces dernières années. En 2017, une mosquée soufie est prise pour cible dans le Sinaï : 300 morts.

Mouvement pourtant discret et initialement apolitique, comment le soufisme est-il devenu une cible ? «Les extrémistes, essentiellement wahhabites, ont les mêmes comportements, les mêmes costumes : ils portent la barbe, le voile, etc. Ils considèrent que l’islam est le même partout», analyse l’anthropologue marocain Faouzi Skali, l’un des plus grands spécialistes du soufisme, dans les pages du Monde. «Or le soufisme s’adapte à chaque lieu, chaque culture, chaque temps aussi. Il n’est pas figé, contrairement à l’idéologie littéraliste, qui a l’obsession de vivre comme à l’époque du Prophète.»

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