Psychologie : la honte, fondamentale à la vie en société
La honte est une sensation parmi les plus désagréables. Elle est pourtant fondamentale à la vie en société… À condition de ne pas se laisser submerger ! Ce samedi à 23h15, Arte diffuse le documentaire «La Honte, un sentiment complexe».
C‘est une émotion que l’on a tous déjà éprouvée : la honte. Après une erreur, un échec, une action peu louable… Sur le moment, la sensation est tellement désagréable que l’on a envie de disparaître sous terre. Mais le pire, c’est que cette sensation peut perdurer. Parfois des mois, des années, voire toute une vie. On plonge alors dans un cercle vicieux et destructeur… Samedi soir, Arte se penche sur ce phénomène avec un documentaire : «La Honte, un sentiment complexe».
Des remords et des regrets
Embarras, gêne, culpabilité, remords, regrets, déshonneur, humiliation… Les synonymes du mot «honte» sont nombreux. Les définitions également. On en retiendra une, tirée du Larousse : la honte est le «sentiment d‘avoir commis une action indigne de soi, ou crainte d’avoir à subir le jugement défavorable d‘autrui». On comprend d‘emblée que dans la honte, il est question de soi et des autres. C’est en effet une émotion liée à la vie en société.
Les anthropologues estiment que les humains éprouvaient déjà cette sensation dans la préhistoire. Dès que les hommes ont vécu en groupe, ils ont défini des règles pour la vie commune, et craint l’exclusion du groupe s’ils dérogeaient à ces règles. Les millénaires ont passé, mais cela reste vrai. Pour vivre en société, nous intériorisons dès l’enfance un ensemble de règles. Et nous ressentons une espèce de malaise quand nous les transgressons. Ce malaise peut être une simple gêne, assez superficielle. Mais elle peut aussi être une véritable honte, plus profonde.
«Je suis nul»
La honte est déclenchée par la sensation de ne pas avoir été en adéquation avec ce que l’autre attend de moi : «Il me faisait confiance, je n’ai pas été à la hauteur.» Logiquement, cette sensation ne devrait durer qu’un temps limité. Si la honte perdure, c’est qu’elle glisse du fait à l’individu. «Je n‘ai plus simplement honte de ce que j‘ai fait, mais de qui je suis. Je ne me dis pas : « J’ai fait telle erreur à tel moment », je me dis : « Je suis nul. » Et cela affecte considérablement l‘estime que j’ai de moi.» Cette émotion est si douloureuse qu’elle peut affecter la santé physique et mentale. Ainsi s’expliquent certains cas de dépressions, d’addictions, de mutilations, voire de suicides…
Un outil éducatif
Pourquoi certains individus sont-ils plus sensibles que d’autres à la honte ? Chacun a son vécu… La honte se construit dès l’enfance. Au départ, c’est un outil éducatif. L’enfant doit en effet tout apprendre des normes de la vie en société. S‘il dépasse les limites admises, il suffit d’un mot ou d’un regard désapprobateur du parent pour qu’il comprenne. Ce signe fait naître en lui une petite honte qui l’empêchera de dépasser ces limites à l’avenir. Ainsi, quand un enfant inuit s’aventure sur la banquise, les adultes lui font honte afin que ne lui vienne plus jamais l‘idée de prendre un tel risque. Si ces hontes éducatives sont suscitées dans un environnement aimant et bienveillant, c‘est tout bénéfice pour l‘enfant. Dans le cas inverse, cela risque d‘être traumatisant.
S’en libérer
Chez certains, l‘omniprésence de la honte ne remonte pas à l‘enfance, mais à un épisode de vie traumatisant. Un viol, par exemple. Quelle que soit l‘origine de la honte, elle s‘accompagne souvent du sentiment d‘être indicible. On a honte de sa honte et c‘est un cercle vicieux dont il devient compliqué de s‘extraire. Il faut oser parler pour se libérer. Nietzsche écrivait : «Quel est le sceau de la liberté acquise ? Ne plus avoir honte de soi-même.»
Cet article est paru dans le Télépro du 27/6/2024
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