Printemps silencieux : le combat écologiste de Rachel Carson

Image extraite du documentaire diffusé ce mardi sur Arte © Elda Producti/Elika Hedayat

Première écologiste, première lanceuse d’alerte… Rachel Carson (1907-1964) a alerté sur les dangers des pesticides dès 1962.

«L’attitude de l’homme envers la nature est aujourd’hui d’une importance cruciale. Parce que l’homme a acquis le pouvoir funeste de détruire la nature. Mais l’homme fait partie de la nature… et sa guerre contre la nature est donc une guerre contre lui-même !»

Ces mots auraient pu être prononcés par Greta Thunberg. Ils l’ont été par une femme née un siècle plus tôt : Rachel Carson. Ce mercredi à 23h40, Arte brosse le portrait de cette Américaine, considérée comme la fondatrice de l’écologie, dans le documentaire «Rachel Carson – La mère de l’écologie».

L’euphorie du progrès

Rachel Carson est née en 1907 dans une ferme de Pennsylvanie. Passionnée de nature dès l’enfance, elle décroche un diplôme en biologie avant d’être embauchée par l’administration américaine des pêches. Elle se consacre à l’étude de la vie marine et y consacre trois livres. Notamment «La Mer autour de nous», paru en 1951. C’est un tel succès de librairie que Rachel peut quitter son job de fonctionnaire.

Ça tombe bien, elle veut être entièrement libre pour s’exprimer sur un sujet qui la préoccupe : l’utilisation des pesticides et leur impact sur l’environnement. À l’époque, le DDT est en vogue. Les fermiers en arrosent leurs cultures et les ménagères le vaporisent pour se débarrasser des moustiques ou des fourmis. Mais quels sont les effets de ce produit sur l’homme, à moyen et long terme ? Personne ne s’en inquiète. Au contraire. Dans l’euphorie de l’après-guerre, le progrès scientifique semble gage d’avenir.

Le maillon et la chaîne

Au fil de ses travaux, Rachel Carson a l’intuition de ce qui relève aujourd’hui de l’évidence : l’équilibre de la nature repose sur de multiples relations entre les êtres vivants et leur environnement. Si l’on s’attaque à un maillon, on risque de casser toute la chaîne. Rachel s’inquiète de la prise de pouvoir de l’homme sur la nature. L’agriculture a plus évolué au cours des sept dernières décennies qu’au cours des sept millénaires précédents. Et tout le monde semble s’en réjouir.

N’y a-t-il donc personne pour comprendre que l’homme risque de détruire la planète ? En 1962, Rachel Carson publie «Printemps silencieux». Le titre fait référence aux oiseaux qui risquent bientôt de disparaître… La presse s’en fait largement l’écho et le livre devient rapidement un best-seller.

L’âge du poison

«Nous sommes entrés dans l’âge du poison», écrit-elle. «Le premier venu peut acheter des substances beaucoup plus dangereuses que les produits pour lesquels le pharmacien exige une ordonnance médicale. Dans les fleuves, les lacs ou tout bonnement dans nos verres d’eau, se mélangent des matières qu’aucun chimiste responsable ne songerait à associer dans son laboratoire. On empoisonne les moustiques et le toxique remonte le long de la chaîne alimentaire. Des résidus de ces produits chimiques finissent dans nos assiettes…»

Les propos sont forts et les réactions vont l’être tout autant. L’industrie s’en prend violemment à Rachel, estimant que ses allégations sont infondées et relèvent de la sensiblerie féminine. Mais l’opinion publique ne s’y trompe pas et oblige le politique à réagir.

Lors d’une des traditionnelles conférences de presse de la Maison-Blanche, Kennedy est interpellé sur le sujet. Rachel Carson est entendue par le Congrès. Et le DDT finira par être retiré du marché. Mais l’industrie inventera très vite d’autres produits pour le remplacer… Le combat écologiste ne faisait que commencer. 

Cet article est paru dans le Télépro du 24/2/2022

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