Pénurie de médecins : y a-t-il un docteur dans la salle ?
La Wallonie est malade d’une pénurie de généralistes. La Flandre et Bruxelles sont aussi contaminées. L’état de santé des patients s’améliore, mais reste préoccupant. Ce samedi 14h50 dans «Reportages découverte», TF1 évoque le sujet qui concerne également la France.
Cette fois, c’est décidé. Dans un an, à la fin de l’année 2025, il arrête. Ce n’est pas que celui que nous appellerons le docteur Brocard en ait assez de son métier de généraliste. D’ailleurs, depuis un peu plus de quarante ans qu’il l’exerce, ce n’est plus un travail. C’est une passion, une mission, une vocation. De 8 h du matin (les meilleurs jours) à 21 h 30, 22 h le soir (quand ce n’est pas plus tard), les rendez-vous au cabinet, les visites à domicile ou en institutions se succèdent quotidiennement. Le samedi est réservé à l’administratif. Et le dimanche ? Il y a la marche à pied pour se vider l’esprit… et se préparer à recommencer le lendemain. Il ne s’en plaint pas, c’est sa vie, il l’adore. Mais c’est la vie de son épouse aussi… et là, « il est vraiment temps d’arrêter ». Tant que physiquement, ils peuvent encore espérer en profiter un peu. La retraite ? Pas sûr qu’il en soit persuadé. Pas certain que sa femme le soit non plus d’ailleurs. Mais décembre 2025, c’est demain. Et une chose le tracasse au plus haut point. Entre les mains de qui confier sa patientèle ? S’il lui reste encore douze mois pour trouver un successeur, la question hante déjà ses courtes nuits.
Pénurietendance sévère
Selon l’Agence pour une vie de qualité (l’AVIQ), une commune est en pénurie selon plusieurs critères, notamment si elle compte moins de 90 généralistes pour 100.000 habitants (1 médecin pour 1.111 patients). Une pénurie sévère est décrétée, notamment, si l’on compte moins de 50 médecins généralistes pour 100.000 habitants (1 médecin pour 2.000 patients). En janvier 2024, l’agence publiait son cadastre annuel des médecins actifs en Wallonie. Les chiffres y sont plus encourageants qu’il y a huit ans, mais restent interpellants : près d’une commune sur deux est en pénurie (129 sur 252 communes). La situation est critique en province du Luxembourg, dans la botte du Hainaut et dans le sud de la province de Namur. La Wallonie aurait besoin de 145 médecins généralistes supplémentaires. Sans compter que, pour anticiper les départs à la retraite dans les cinq prochaines années, 585 médecins de plus seraient également nécessaires.
Bruxelles ? La situation n’est pas plus enviable. Les derniers chiffres officiels remontent à 2018. À l’époque, entre 41 et 67 quartiers sur 118 étaient en pénurie. La Flandre n’échappe pas au phénomène non plus.
La température monte
Nous l’appellerons la docteure Fillot. À 33 ans, elle a fait un tout autre choix que celui du docteur Brocard en début de carrière. Elle souhaite privilégier son propre bien-être. On ne parle plus de 80 heures de travail par semaine, mais plutôt de la moitié. Pour cela, elle s’est associée à d’autres confrères au sein d’une maison médicale. Les rentrées financières ne sont pas les mêmes, mais cela leur convient très bien.
Les incitants
Diminution du temps de travail, augmentation de l’âge et des besoins des patients, mauvaise répartition géographique des généralistes, âges de ceux-ci (plus d’un sur trois a plus de 65 ans, l’âge moyen est de 48,5 ans), numerus clausus, concours d’admission… : la problématique est profonde. L’instauration de primes à l’installation (comme Impulseo en Wallonie – 20 à 25.000 € – disponibles jusqu’au 31 décembre 2025) ou d’autres incitants pour attirer des généralistes dans des communes en pénurie (par exemple : une prime annuelle de 2.000 € et des forfaits de déplacement avantageux pour un stage) ont contribué à améliorer la situation. « Ce système est en cours d’évaluation », nous répond l’AVIQ. « Une aide pour la création de télésecrétariat est également prévue », complète l’agence qui précise : « Nous constatons une diminution du nombre de communes en pénurie. » Des réponses sans toutefois réussir à résoudre le problème. Si vous avez récemment été contraint de chercher un médecin généraliste, il y a de fortes chances que vous ayez fait ce triste et pénible constat.
Cet article est paru dans le Télépro du 2/1/2025
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