Otages à Téhéran : 444 jours qui ont marqué l’Histoire

L'un des otages américains exhibé par ses ravisseurs © Getty Images

La prise d’otages de l’ambassade des États-Unis en Iran dura 444 jours. Un bras-de-fer entre Khomeini et Carter.

C’est une crise qui a marqué le tournant des eighties : la prise d’otages à l’ambassade des États-Unis à Téhéran. Durant quatorze mois, cinquante-deux ressortissants américains furent entre les mains de jeunes Iraniens galvanisés par l’ayatollah Khomeini.

Samedi à 20h35 sur La Trois, «Retour aux sources» revient sur ces «444 jours qui ont fait plier l’Amérique». Avec le recul, on perçoit combien ils ont bouleversé l’échiquier mondial.

Dehors, les Yankees !

Le 4 novembre 1979, un groupe d’étudiants iraniens franchissent les murs de l’ambassade américaine de Téhéran aux cris de «Yankees dehors». Quelques mois plus tôt, une révolution a renversé le Shah, qui régnait depuis plusieurs décennies avec le soutien des États-Unis. Le pays est désormais dirigé par un religieux, l’ayatollah Khomeini. Mais son pouvoir est encore fragile car les opposants sont nombreux et variés.

Khomeini comprend que pour les fédérer, il doit miser sur le ressentiment antiaméricain. Quelles que soient leurs opinions par ailleurs, beaucoup d’Iraniens pensent avoir été opprimés et spoliés par et pour les USA. Khomeini va récupérer ce sentiment à son profit. Il apporte son soutien aux étudiants preneurs d’otages en déclarant que «C’est une deuxième révolution, encore plus grande que la première».

Intervenir ou pas ?

Khomeini se profile ainsi en protecteur du peuple iranien contre le géant américain. Et cela va effectivement asseoir son pouvoir dans les mois qui suivent. Mais avec ces otages, il dispose aussi d’une monnaie d’échange : leur libération contre l’extradition du Shah, exilé aux Etats-Unis.

De nombreux Américains réclament une action militaire contre l’Iran. Le président Carter hésite. En cette époque de guerre froide, il craint de déclencher une troisième guerre mondiale. D’autant qu’en décembre 1979, l’URSS a envahi l’Afghanistan où les USA soutiennent l’opposition islamique. Les chars soviétiques sont à la frontière iranienne.

L’affaire est prise en charge par l’ONU. En janvier 1980, son Secrétaire général fait le déplacement à Téhéran, mais il ne peut rencontrer ni Khomeini ni les otages. La mission est un échec.

La promesse de Reagan

1980 est une année électorale aux États-Unis. Carter brigue un second mandat. Pour espérer l’obtenir, il sait qu’il doit d’abord résoudre cette crise. En avril, il lance une opération militaire pour récupérer les otages. Un avion et un hélico américains se heurtent et s’écrasent dans le désert iranien avant même d’avoir atteint Téhéran. C’est un fiasco.

Désormais, Khomeini n’est plus pressé de négocier. Il veut peser sur la campagne électorale américaine pour empêcher la réélection de Carter, qui a soutenu le Shah. Mais il sait que son adversaire, Ronald Reagan, a promis une intervention militaire au peuple américain. Fin septembre, dernière cartouche de Carter : il soutient l’Irak de Saddam Hussein qui lance une guerre contre l’Iran, espérant ainsi fragiliser Khomeini. Mais rien n’y fait. Le 4 novembre 1980, un an jour pour jour après le début de la prise d’otages, Reagan est élu.

Dernière minute

Khomeini va jouer jusqu’à la dernière minute. Le 20 janvier 1981, quand Jimmy Carter quitte son bureau de la Maison Blanche pour assister à l’investiture de son successeur, les Américains sont toujours otages à Téhéran. Ils seront libérés quelques minutes après la prestation de serment de Ronald Reagan. L’affaire des otages était résolue. Mais les conséquences de la guerre Iran-Irak et la montée de l’islamisme en Afghanistan allaient bouleverser la face du monde…

Cet article est paru dans le Télépro du 16/6/2022

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