Nettoyeur de l’extrême : Rambo du logis

Le syndrome de Diogène, ou accumulation compulsive d’objets, témoigne d’une profonde détresse psychologique © Getty Images
Alice Kriescher Journaliste

Ce jeudi à 19h50 sur RTL tvi, «Tout s’explique» s’attaque à un sujet glamour s’il en est : le nettoyage de l’extrême et les professionnels qui s’emploient à cette mission délicate.

Les tâches ménagères font sans aucun doute partie des contraintes pénibles du quotidien. Certains ont cependant décidé d’en faire leur métier. Attention, on ne parle pas ici de l’entretien hebdomadaire chez des particuliers lambdas, mais de nettoyeurs de l’extrême qui s’attaquent à des cas particuliers, souvent insalubres et parfois dangereux. Tour d’horizon d’un métier hors du commun en compagnie de Germain Caprasse, professionnel du secteur depuis plus de sept ans.

S.O.S Crassesbusters

Si vous avez déjà vécu les affres d’un déménagement, vous le savez, vider une maison peut s’apparenter à une véritable épreuve. Certains décident alors de solliciter ce qu’on appelle un «nettoyeur de l’extrême». Conscient de la demande, Germain Caprasse a fondé, il y a un an et demi, la SRL GEC, en région liégeoise, après avoir été employé durant près de six ans. «Quand on intervient pour des particuliers, il s’agit souvent de vider la maison d’un proche décédé. Si on n’a pas l’habitude, ce genre de processus peut être extrêmement long. Et s’apparenter à une rénovation, pendant quelques heures après le boulot. L’un dans l’autre, on se retrouve à faire ça pendant plusieurs années.»

Là où il y a Diogène, y’a pas de plaisir

Les bureaux d’avocats spécialisés dans l’administration de biens doivent régulièrement employer ces professionnels pour remettre de l’ordre dans les habitations de leurs protégés. Souvent isolées et inaptes à l’entretien classique d’une maison, ces personnes souffrent parfois de ce qu’on nomme «le syndrome de Diogène», ou l’accumulation compulsive d’objets. Pour Germain Caprasse, qui côtoie ces situations en première ligne, cette problématique est symptomatique d’une époque. «Je pense que dans notre société où l’individualisme prime généralement, certains se renferment sur eux-mêmes sans personne autour pour le constater. Dans des cultures où différentes générations vivent sous le même toit ou proches les unes des autres, un Diogène ne pourra jamais se produire, il y aura toujours un regard attentif pour réaliser suffisamment tôt que quelqu’un va mal et lui venir en aide. Au final, c’est aussi l’aspect gratifiant de ce métier, on aide parfois des gens, confrontés à une solitude extrême, à retrouver un peu de dignité dans leur intérieur.»

Réseau de recyclage

Trier intelligemment les déchets constitue l’essentiel du travail de nettoyeur de l’extrême, d’abord d’un point de vue écologique, ensuite pour un aspect purement économique. «Jeter coûte cher. En ce moment, TVA comprise, la tonne de déchet est à 300 €. Dans l’un des derniers appartements nettoyés, on en était à cinq tonnes pour 80 m²…

En général, on procède en plusieurs étapes. Soit il y a des objets valorisables de mon point de vue, dont le client ne veut plus, je les rachète et je diminue mon devis initial. Deuxième possibilité, ni moi ni le client ne voulons conserver un objet, pourtant encore fonctionnel. Dans ce cas, je travaille avec différents intervenants. Notamment avec Terre, pour les vêtements, ou des asbl et des centres fermés. Si, parmi les objets trouvés, certains sont de grande valeur, je propose alors de travailler avec une salle de ventes pour que le client ne se sente pas floué. Pour ce qui est des vieux meubles qui n’ont plus d’intérêt, du type armoire en chêne des grands-parents, j’ai un contact qui les récupère pour les envoyer dans les pays de l’Est. L’électroménager à réparer, qu’on préfère remplacer par du neuf, est envoyé, via un autre contact, en Afrique. Le reste finit sur une brocante ou part au recyclage.»

Compagnon d’infortune

Dans leur solitude, les individus qui se laissent envahir par l’encombrement prennent bien souvent un animal pour se mettre un peu de baume au cœur. Mais, lorsqu’une personne seule décède, qu’advient-il de ces orphelins à poils et à plumes ? «S’il reste des animaux domestiques vivants dans l’habitation, nous les embarquons nous-mêmes à la SPA. Mais, en général, un proche ou un voisin est volontaire pour adopter. Par contre, j’ai déjà eu affaire à un aigle royal. Dans ces cas particuliers, nous ne prenons aucun risque et nous appelons directement la SPA.»

Vous avez le cœur bien accroché ?

C’est une évidence. Nettoyer une maison dans laquelle des déchets se sont accumulés durant plusieurs décennies peut réserver quelques surprises pour le moins désagréables. «J’ai déjà été confronté à des bouteilles remplies d’urine, un sceau d’excréments humains, des squelettes d’animaux, un frigo entièrement recouvert de mouchettes… Plus dangereux, ce sont tous les objets liés à la toxicomanie, comme les seringues. Alors, dès que nous avons un doute, nous travaillons avec une pelle pour ne pas devoir toucher du matériel problématique. J’avoue qu’il en faut beaucoup aujourd’hui pour me surprendre, mais il m’arrive encore d’avoir des haut-le-cœur. Récemment, nous avons vidé l’habitation d’un monsieur décédé au premier étage. Le voisinage a mis des semaines pour réaliser qu’il était mort. L’odeur était insoutenable à 100 mètres de là. Je vous laisse imaginer à l’intérieur….»

Infos

GEC SRL, tél. : 0471.80.60.40.

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