Nelson Mandela : l’autre visage

Image extraite du documentaire «MK, l’armée secrète de Mandela» © Arte/Temps noir

L’ancien prix Nobel de la paix était aussi à la tête d’une armée secrète de lutte contre la ségrégation raciale. Ce mardi à 23h35, Arte diffuse le documentaire «MK, l’armée secrète de Mandela».

Pour ses geôliers, Nelson Mandela n’est qu’un numéro, le 46664. Condamné aux travaux forcés pour sabotage et conspiration en vue de renverser le gouvernement, il est incarcéré à vie sur l’île de Robben Island depuis 1964. Les photos de lui sont strictement interdites. Ce n’est qu’à sa libération, le 11 septembre 1990, après 27 ans 6 mois et 6 jours, que tous ses sympathisants peuvent à nouveau voir Nelson Mandela. Mais si une partie du visage du prix Nobel de la paix 1993, devenu président de son pays en 1994, était restée dans l’ombre ? Sans écorner ce mythe, le documentaire diffusé ce mardi sur Arte rappelle les faits.

Fer de lance

Créé en 1912, le Congrès national africain (ANC) est, dans un premier temps, un mouvement de défense des droits élémentaires des Noirs en Afrique australe. Jusqu’en 1960. Cette année-là, une manifestation qu’il organise fait 69 morts. L’ANC est interdit, il entre dans la clandestinité et crée une branche armée, uMkhonto we Sizwe («Fer de lance de la nation», alias MK). Nelson Mandela en est le commandant en chef. Les modèles du quadragénaire s’appellent Castro, Guevara et Ho Chi Minh, adeptes des conquêtes militaires, plus que Gandhi et sa désobéissance civile pacifique. «Comme l’ANC avait hésité à adopter la violence», écrit Mandela dans son autobiographie «Long Walk to Freedom», «il semblait logique de commencer avec la forme de violence qui causait le moins de tort aux individus : le sabotage.»

Sabotages

Stratégie : des raids sélectifs contre des installations militaires, des centrales électriques, des lignes téléphoniques et des moyens de transport pour entraver l’efficacité militaire de l’État, effrayer les partisans du Parti national, faire fuir les capitaux étrangers et affaiblir l’économie. Le 16 décembre 1961, des bombes artisanales explosent dans plusieurs localités. La date n’est pas choisie au hasard : c’est celle à laquelle des Sud-Africains blancs célèbrent la défaite d’un grand chef zoulou. Un ancien combattant du MK se souvient : «Nous avions 5 minutes pour placer les explosifs (sur les pylônes). Et ça a parfaitement fonctionné. Durban et toute la côte ont été privés d’électricité. C’était une très grande victoire pour le mouvement clandestin, pour la liberté de l’Afrique du Sud contre l’apartheid.» En deux ans, MK effectue 134 sabotages. Mais, très vite, Nelson Mandela n’est plus de la partie.

Arrestation

En 1962, il quitte l’Afrique du Sud pour suivre une formation militaire de six mois en Éthiopie. Peu après son retour, il est arrêté, comme les autres principaux chefs du MK. Tous sont condamnés à la prison à perpétuité. «L’idée de présenter Mandela en pacifiste, c’est encore une façon de nous déposséder de notre histoire», estime Mac Maharaj, ancien dirigeant de la branche militaire de l’ANC. «MK, l’armée secrète de Mandela» remet sous les projecteurs cette mémoire effacée que nous n’avions peut-être pas vue.

Cet article est paru dans le Télépro du 4/4/2024

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