Mensonges en politique : une fake news pour un royaume

Dans la nuit du 15 au 16 octobre 1959, François Mitterrand est victime d’un attentat... dans lequel son rôle est remis en question © AFP via Getty Images
Alice Kriescher Journaliste

Ce dimanche à 21h05 sur France 5, avec le documentaire «Mensonges en politique», Patrick Cohen décortique les plus grands mensonges politiques de notre histoire, en compagnie de protagonistes qui ont vécu ces situations de l’intérieur.

On le sait depuis le plus jeune âge : mentir est un vilain défaut. Mais, lorsque l’on est un élu politique, dissimuler la vérité prend une autre dimension et peut faire vaciller une démocratie. Tour d’horizon de quelques-uns des mensonges marquants de notre histoire moderne.

Répétition générale

À la guerre, tous les coups sont permis ? En tout cas, pour la justifier, visiblement, oui ! Le 31 août 1939, un groupe de soldats, apparemment polonais, attaque l’émetteur radio de la petite ville allemande de Gliwice, tout près de la frontière entre les deux pays. Le jour suivant, dès 6 heures du matin, toutes les radios de Pologne l’annoncent : en guise de riposte après l’incident de Gliwice, l’armée allemande vient d’envahir le pays, plongeant, de ce fait, l’Europe dans la Seconde Guerre mondiale. En réalité, début août, l’agression a été entièrement orchestrée par Himmler afin de donner à Hitler un prétexte pour marcher sur la Pologne et plonger notre monde dans l’un de ses pires conflits.

Un attentat, deux versions

France, 1959. François Mitterrand est sénateur et, en pleine guerre d’Algérie, la France est plongée dans un climat tendu. Le 16 octobre, un commando tire à la mitraillette sur la voiture de Mitterrand, il s’extirpe de son véhicule, se réfugie dans le Jardin de l’Observatoire et en réchappe. L’homme, grâce à son sang-froid, gagne alors en popularité. Quelques jours plus tard, patatras, Robert Pesquet, militant de l’Algérie Française, accuse Mitterrand d’avoir organisé l’attentat, avec son aide, pour séduire l’opinion publique. La tendance s’inverse, le sénateur devient la risée de la presse, son immunité parlementaire est levée, une enquête pour outrage à magistrat ouverte et Mitterrand est inculpé… Certains de ses amis le disent proche du suicide. Si François Mitterrand reconnaît avoir rencontré Pesquet peu avant l’attentat, ce fut, selon lui, uniquement pour recevoir des avertissements sur une possible attaque, mais en rien pour la monter de toutes pièces. Jusqu’à sa mort, Robert Pesquet soutiendra le contraire, s’embourbant souvent dans des versions contradictoires lui faisant perdre en crédibilité.

Mensonge du siècle

Certains mensonges n’engagent que la carrière ou la réputation de celui qui les profère, d’autres mettent en péril toute une société. C’est le cas des nombreuses contrevérités répétées par George W. Bush pour justifier sa guerre «préventive» en Irak, il y a plus de vingt ans. Un homme et un événement symbolisent les élucubrations américaines à ce sujet : le discours de Colin Powell (1937-2021), alors secrétaire d’État, à la tribune de l’Onu le 5 février 2003. Ce jour-là, l’homme tente de justifier l’intervention militaire américaine qui vient d’être lancée sur le sol irakien, allant même jusqu’à brandir une fiole d’anthrax, maladie infectieuse très grave, affirmant que l’Irak développe la substance comme arme de guerre. «Ce sont des faits et des conclusions fondées sur des renseignements solides», assène Powell avec force. Il n’en est rien. La guerre aura lieu, sans approbation de l’Onu, faisant des centaines de milliers de morts en Irak. En 2008, Bush regrettera seulement la «défaillance du renseignement». Quant à Colin Powell, dans un entretien accordé à L’Obs en 2013, il affirmera avoir été dupé : «J’ai découvert qu’un grand nombre d’informations que l’on m’avait fournies étaient inexactes. Ce n’était pas un mensonge délibéré de ma part. Je croyais à ce que je disais.»

Contrat de confiance

Le 2 juillet dernier, le pays de Galles a adopté une loi visant à criminaliser le mensonge en politique, devenant le premier État au monde à être en mesure de punir les politiciens pour un tel fait. Concrètement, tout «parlementaire ou candidat au Senedd (ndlr : le parlement gallois) reconnu coupable, par une procédure judiciaire indépendante, de tromperie délibérée pourra se voir disqualifié».

Champion toute catégorie

Des «Fact-checkers», comprenez des «vérificateurs de faits», ont compilé les mensonges avérés et approximations de Donald Trump pour en tirer une statistique : au cours de son mandat, entre 2017 et 2021, il aurait menti 30.573 fois.

Cet article est paru dans le Télépro du 26/9/2024

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