Médicaments : le Belge fait passer (trop !) facilement la pilule !
Notre pays compte parmi les plus gros consommateurs de produits pharmaceutiques de la planète.
À 26 ans, Édith, victime de violentes douleurs dans le visage, est dépendante aux antidouleurs. Depuis huit mois, Marion, 27 ans, ne peut plus se passer de somnifères. Pour Christian, 65 ans, la prise de gélules est un réflexe pour traiter son cholestérol et son hypertension.
Comment aider ces personnes à sortir de leur dépendance aux médicaments ? Le magazine «Prenez soin de vous !» relève le défi mardi à 21h sur France 5. Pendant trois mois, des spécialistes, emmenés par Michel Cymès, suivent les trois quidams. Au programme : entraînement physique, la libération de la dépendance.
3e place du podium
Lutte à coup de remèdes contre la douleur, le stress, le surpoids… : la Belgique connaît la musique. Chaque année, la pilule y semble plus facile à avaler, la consommation ne cesse d’augmenter. Et cela fait un temps que ça dure.
En 2014, l’Association pharmaceutique belge écrit sur son site Web : «Des chiffres relatifs à la consommation de médicaments très interpellants». L’APB fait référence aux résultats d’une étude publiée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ce rapport fournit une série de statistiques sur la santé et les soins de santé dans 35 pays européens.
Pour les antibiotiques, la Belgique s’installe à la 3e place du podium des plus gros consommateurs. Leur consommation est 40 % plus élevée que la moyenne en Europe. Si ce sont les dépenses médicamenteuses qui sont prises en compte, les résultats sont plus catastrophiques encore. Alors que la moyenne européenne est estimée à 350 € /an, la Belgique décroche une triste première place avec 550 € par habitant…
Antidépresseurs et sédatifs
En janvier, le rapport «Vers une Belgique en bonne santé», de Sciensano, revenait sur les résultats de sa dernière étude consacrée à la santé des Belges. Tous les cinq ans (depuis 1997), cette enquête baptisée «Enquête de santé par interview» (HIS pour Health Interview Survey) s’intéresse notamment à la consommation des sédatifs (somnifères ou tranquillisants) et des antidépresseurs chez nous.
Une fois encore, les statistiques inquiètent. Les interviews révèlent que 12 % de la population interrogée a consommé des sédatifs dans les deux semaines précédant l’entretien. Pour les antidépresseurs, le chiffre est de 8 %. Dans les deux cas, les femmes sont plus nombreuses à consommer que les hommes.
Côté sédatifs, la consommation, en hausse constante entre 1997 et 2008, a ensuite diminué lors des deux enquêtes suivantes. Par contre, côté antidépresseurs, la tendance est clairement à la hausse : selon l’étude, elle a doublé en vint-et-un ans chez les deux sexes. La prochaine «HIS» doit avoir lieu l’année prochaine.
Pression du patient
Comment expliquer la surconsommation de médicaments en général dans notre pays ? Concernant les anti-inflammatoires, certains spécialistes mettent en avant l’illusion de vouloir éliminer la douleur d’un claquement de doigt. Un constat qui n’est pas spécifiquement belge.
Par contre, en Belgique, plus que dans les pays du Nord par exemple, une pression serait mise sur les médecins par leurs patients. Ceux-ci estimeraient que consultation doit rimer avec prescription. Autre explication parfois évoquée : elle concerne les antibiotiques. Notre pays figure parmi les pays qui en consomment le plus. «Mieux vaut prescrire», estimeraient certains médecins, face à un diagnostic incertain. Avec comme conséquence extrême 530 décès annuels dus à une infection bactérienne résistante aux antibiotiques.
Une étude reprise par Walloniesante.be note toutefois un progrès : les jeunes généralistes prescriraient jusqu’à 30 % d’antibiotiques en moins que leurs confrères plus âgés. Les campagnes de sensibilisation feraient-elles enfin effet… ?
Cet article est paru dans le Télépro du 24/3/2022
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