Levons le voile sur la pudeur

«La pudeur réside moins dans la dissimulation du corps que dans la qualité du regard qui se pose sur lui», développe l'historien Jean-Claude Bologne © Isopix
Alice Kriescher Journaliste

Dans le nouveau numéro des «Carnets du bourlingueur», ce soir à 20h20 sur La Une, Philippe Lambillon évoque notamment le sujet universel de la pudeur. Il nous emmène en Inde où toute effusion en public est interdite. Mais au fait, quelle est l’origine d la pudeur ?

De la sociologie à la philosophie en passant par l’histoire, la pudeur a été analysée sous toutes ses coutures. Ce sentiment, propre à chaque être humain et très variable en fonction des époques et des cultures, est un sujet inépuisable. Mais à quel moment l’Homme a-t-il décidé de cacher son corps en portant des vêtements, devenant ainsi pudique ?

On peut aisément imaginer que le vêtement a vu le jour pour éviter à l’humain de grelotter ou d’être cramoisi par les rayons du soleil. Cependant, certaines thèses anthropologiques ont un avis qui ne s’arrête pas à son utilité en fonction du climat. «L’être humain, contrairement aux autres animaux, a choisi de s’habiller. Pour avoir moins froid, peut-être. Mais aussi pour ne pas être perpétuellement tenté par le désir sexuel», relate le magazine Slate. «En effet, chez les singes, cousins de l’homme, c’est la coloration des parties génitales de la femelle qui signale aux mâles qu’elle est apte à la reproduction. L’humain étant debout, tout le corps se serait érotisé, incitant ainsi les êtres humains à la pudeur pour protéger l’intégrité des corps, la paix sociale, ou encore les structures familiales.»

Au fil des siècles la pudeur évolue au diapason des sociétés. Durant l’Antiquité grecque, elle est intrinsèquement liée à la honte. «Des magistrats, les gynéconomes (surveillants des mœurs et de la tenue des femmes, ndlr), peuvent user d’amendes ou du fouet pour faire respecter ces lois contre l’indécence», détaille le quotidien La Croix. Au Moyen Âge, être pudique fait partie du b.a.-ba du bon chrétien et devient une valeur, «un acte de la volonté, qui retient la femme sur le chemin du vice» histoire de ne pas réitérer les erreurs d’Ève. «L’époque moderne s’éloignera progressivement de cette justification théologique. La pudeur apparaît liée à des conventions sociales.» Bien souvent, la femme est au centre des questions de pudeur, pendant longtemps, et encore aujourd’hui, on commente la longueur de ses jupes, les centimètres de tissus de ses maillots et l’amplitude de ses décolletés. Et gare à celles qui ne sont pas en phase avec la bienséance de l’époque. Dans nos débats contemporains à propos du voile, de la burqa ou du burkini, c’est une fois de plus la femme qui suscite les préoccupations vestimentaires.

Extrait d’un article paru dans Télépro du 20 août 2020.

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