Les robots s’emparent de l’art !

L’intelligence artificielle des machines peut-elle faire preuve de créativité ? Ce mercredi à 17h15, «Xenius» sur Arte se penche sur cette question sensible.

«Ensemble des théories et des techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l’intelligence humaine.» Telle est la définition de «l’intelligence artificielle» donnée par le Larousse.

Mais cette «IA» peut même surpasser le cerveau humain dans divers domaines : un ordinateur bat un joueur d’échecs et, en chirurgie, des robots font avancer les techniques médicales. Au quotidien, nos smartphones reconnaissent notre voix et répondent à nos demandes. Parmi ces compétences, en est-il une qui reste l’apanage de l’humain ? La créativité ? Même cette ultime frontière semble franchie par des IA à la fibre artistique. Explications.

Portrait aux enchères

En 2018, un tableau singulier surprend le marché de l’art en étant adjugé à 432.500 $ aux enchères chez Christie’s. Le portrait intitulé «Edmond de Belamy» a la particularité d’avoir été peint par une machine. En fait, cette IA a créé une série de onze portraits représentant une famille bourgeoise et fictive du XIXe siècle, les Belamy. Derrière le robot-peintre se cache le collectif Obvious créé par trois jeunes Français. S’ils revendiquent une démarche artistique, leur formation est éloignée du monde pictural : l’un est mathématicien, les deux autres ont étudié le commerce.

Marché de l’art en alerte

Pour créer M. Belamy, le collectif a utilisé des «GANs», à savoir des algorithmes générant des images à un haut degré de réalisme. Des machines ont analysé et synthétisé 15.000 œuvres peintes depuis le Moyen Âge pour assimiler les techniques de l’art du portrait. «Ensuite deux algorithmes se font face : l’un génère des images selon ce qu’il a appris, l’autre est censé deviner si c’est l’œuvre d’une machine ou d’un humain», détaille les Échos. «Le but du premier est de duper le second. Quand il y arrive, on obtient un tableau « original ».»

Si le portrait d’Edmond n’est pas la première peinture ainsi réalisée – un tableau «façon Rembrandt» avait déjà été conçu par une IA -, une mise en vente aux enchères était encore inédite. Elle a suscité un vif émoi dans le monde artistique, comme le relate la RTBF : «Le débat fait rage, mais Obvious assure considérer l' »AI » comme un « outil », non une fin en soi. Loin de vouloir imiter, le collectif explore l’aspect « décalé » (…) des œuvres et veut préserver cette « patte de l’algorithme ». Tout le monde s’accorde cependant pour admettre que l’intérêt du marché grandit.»

Un robot chef d’expo

Le mélange des genres entre l’IA et l’art n’a pas fini de faire parler de lui. En 2022, les organisateurs de la Biennale d’art contemporain de Bucarest confieront le commissariat de leur 10e édition à… un robot nommé Jarvis ! Actuellement, il «s’entraîne» à assimiler les ficelles du métier de commissaire d’expo. Ensuite, explique le site de la RTBF, «l’intelligence artificielle parcourra les bases de données afin d’établir une sélection d’artistes et de créateurs qui seront exposés dans une galerie en réalité virtuelle». Une première !

Kurt Cobain ressuscité

Le monde de l’art ne se limite pas à la peinture, l’IA a déjà œuvré dans d’autres domaines. En 2017, au Japon, un robot-écrivain a figuré parmi les finalistes d’un concours littéraire. Un an plus tard, une autre machine a écrit un nouveau chapitre de… la saga Harry Potter ! En matière de musique, il y a quatre ans, une IA issue des Computer science laboratories de Sony, a composé une chanson qui aurait pu être l’ersatz d’un inédit des Beatles, tant c’était ressemblant.

En janvier, un même défi a été relevé par l’association canadienne Over the Bridge, qui lutte contre la détresse mentale dans l’univers de la musique. Elle a fait réaliser par une IA des inédits à la façon d’artistes du «Club des 27», ces musiciens et chanteurs morts à 27 ans d’addictions ou de suicide du fait de leur fragilité mentale : Kurt Cobain, Jim Morrison, Amy Winehouse, Jimi Hendrix. Un résultat bluffant mais éphémère : il a été retiré de YouTube une fois qu’Over the Bridge a estimé avoir sensibilisé le public à sa cause par son buzz…

Cet article est paru dans le Télépro du 29/4/2021