«Les Diplomates du Pape» : aux nonces du Père…

Le 7 mars dernier, accompagné d’une délégation diplomatique papale, François fait s’envoler une colombe de la paix en Irak © Isopix

Ce lundi à 22h40, un documentaire de La Trois, tourné durant un an à Rome et dans le monde entier, pénètre dans les arcanes de la diplomatie en soutane.

François laisse s’envoler une colombe. Face aux ruines de la cathédrale d’Al-Tahira, détruite par Daesh, le Saint-Père vient d’offrir une émouvante prière pour les victimes de la guerre. «Historique», «symbolique», «exceptionnelle» : les qualificatifs pour la décrire foisonnent dans la presse. François est le premier pape à visiter cette région du monde. Un voyage au cours duquel il rencontre aussi la figure spirituelle importante du chiisme irakien : le grand ayatollah Ali Al Sistani.

En quatre jours, du 5 au 8 mars dernier, en pleine pandémie, c’est l’opération la plus médiatisée et la plus spectaculaire menée par le Saint-Siège ces dernières années. Un «coup» qui met sous les projecteurs son activité diplomatique intense. Une caractéristique inscrite dans l’ADN de l’Église catholique.

À l’école des nonces

Dès le XVe siècle, la papauté envoie des représentants permanents dans différentes villes italiennes, à Venise d’abord. Comme l’indique le portail du Net Cairn.Info, ces nonces apostoliques créent la fonction d’ambassadeurs. C’est le début d’une diplomatie spécifique.

En théorie, il ne s’agit pas d’entrer dans la concurrence entre nations mais uniquement «de poursuivre spécifiquement des buts religieux et moraux», comme l’écrit Joël-Benoît d’Onorio, professeur des Universités, «et de défendre les droits et les intérêts des communautés catholiques et de l’Église dans le monde». Pour atteindre cet objectif, l’Académie pontificale ecclésiastique ouvre ses portes en 1701. Des années plus tard, parmi les nombreux prêtres choisis pour y étudier, elle forme à la diplomatie les futurs papes Pie XII, Jean XXIII et Paul VI.

Réseau planétaire

L’action diplomatique, très délimitée territorialement au départ, s’est étendue à l’ensemble de la planète. Outre la défense des catholiques, elle s’active dans la recherche de la paix et à la défense des droits humains au cours du XXe siècle. Le Siège apostolique entretient des relations avec 187 États (en février 2021), un nombre en constante évolution. À l’heure actuelle, seule une dizaine de pays (dont la Chine et l’Arabie saoudite) ne reconnaissent pas le Saint-Siège.

Pour faire leur travail, les diplomates savent qu’ils peuvent s’appuyer sur un réseau d’informateurs sans pareil. Diocèses, congrégations, clergés locaux, mais aussi «210.000 écoles, 1.700 universités, des hôpitaux et une multitude d’ONG catholiques…», précise la revue d’analyse internationale Classe-internationale pour laquelle le Vatican est ainsi secondé «par une véritable armée humanitaire».

Sur tous les fronts

Cette diplomatie discrète compte en son sommet la Secrétairerie d’État (l’équivalent du ministère des Affaires étrangères), constituée d’une cinquantaine de personnes épaulant le Pape. Elle a du travail. Paul VI a opté pour une diplomatie bien visible en instaurant les voyages pontificaux. Jean-Paul II a choisi une action plus «offensive» et favorisé la chute du bloc soviétique.

De son côté, François Ier joue sur deux fronts. La continuité d’abord. La rencontre avec le patriarche Kirill à Cuba en 2016 est la manifestation la plus spectaculaire du désir de se rapprocher de l’orthodoxie amorcée par Benoît XVI. L’amélioration des relations avec la Chine et la poursuite du dialogue avec l’islam sont deux autres exemples fondamentaux de cette tendance.

Second front : le pape argentin s’illustre sur des terrains plus personnels. Visibilité maximale et rôle prépondérant dans le rapprochement entre Cuba et les États-Unis en 2014. Attitudes et prises de position face à la mondialisation : «Non qu’il s’oppose à un processus dont les avantages sont visibles», analyse Cairn.Info, «mais en dénonçant leurs graves dérives».

Écologie, crise migratoire… : la diplomatie selon François s’exprime au nom de diverses voix, dont celles des laissés-pour-compte. Ils sont nombreux, pas seulement parmi ses 1.250 milliard de fidèles…

Cet article est paru dans le Télépro du 24/6/2021

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