L’abracadabrant Mr. Stonehouse
La vie rocambolesque d’un ancien ministre britannique, espion et menteur pathologique, est au cœur d’une minisérie inédite : «Stonehouse : député, amant et espion», à voir jeudi à 20h55 sur Arte.
Nous sommes à la fin des années 1960, en Angleterre. Fils de syndicalistes, pilote au sein de la Royal Air Force durant la Seconde Guerre mondiale, le député quadragénaire John Stonehouse (1925-1988) cumule les atouts aux yeux du Premier ministre travailliste qui souhaite rajeunir ses troupes. Voilà notre homme promu ministre adjoint de l’Aviation, puis ministre de la Technologie et enfin des Postes et des Télécommunications. Mais piégé par une interprète lors d’un voyage en Tchécoslovaquie, il devient espion pour l’ennemi communiste pendant la guerre froide… sans éprouver la moindre culpabilité. Au contraire : bien payé, il peut mener la grande vie. John Stonehouse était l’étoile montante du Parti travailliste britannique et considéré comme un potentiel Premier ministre. Imbu de lui-même, il a cependant failli dans tous les rôles qu’il a endossés : espion calamiteux, mari infidèle trop voyant, entrepreneur aussi avide que désastreux.
Faux décès
Ce menteur pathologique est allé jusqu’à simuler sa mort, en novembre 1974, laissant une pile de vêtements sur une plage de Miami Beach pour faire croire à la noyade. Il fut présumé mort et des nécrologies ont été publiées dans les journaux britanniques, malgré le fait que son cadavre n’ait pas été retrouvé. En réalité, il était en route vers l’Australie avec sa maîtresse et secrétaire, abandonnant femme et enfants. Utilisant les identités de deux hommes décédés dans sa circonscription pour se créer de faux passeports, Stonehouse a vécu en Australie et s’est mis à transférer de grosses sommes d’argent entre différentes banques, attirant l’attention de la police. Il fut finalement arrêté à Melbourne et extradé vers le Royaume-Uni. À son procès, il mena sa propre défense contre vingt et une accusations de fraude, de vol, de contrefaçon et de complot. Il fut condamné à sept ans de prison…
Une satire de la politique britannique
En trois épisodes, la minisérie diffusée jeudi sur Arte mise surtout sur l’absurde et le loufoque, grâce à une palette de couleurs savoureusement kitsch et à la prestation de Matthew Macfadyen (Golden Globe 2024 pour son rôle dans «Succession»). Au travers de ce personnage bien réel, «Stonehouse» offre une satire délicieusement féroce du monde politique britannique. L’écriture du scénario est signée John Preston, écrivain à qui l’on doit «A Very English Scandal», devenu une série télévisée avec Hugh Grant, et «The Dig», adapté au cinéma avec Ralph Fiennes.
D’après le petit-neveu de John Stonehouse, Julian Hayes, auteur d’une biographie de son grand-oncle, la réalité est encore plus fascinante que la série télévisée : «C’est une vie complètement incroyable. Si on l’avait écrite telle quelle pour une fiction, personne n’aurait pu croire à cette intrigue. L’histoire vraie dépasse l’entendement. C’est un cas où la vérité dépasse la fiction…»
Cet article est paru dans le Télépro du 15/2/2024
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