La première cyberguerre mondiale

La guerre se joue aussi derrière les écrans © France 5/Maximal Productions

Le conflit entre la Russie et l’Ukraine fait aussi rage dans le cyberespace. Le piratage informatique de l’adversaire mobilise des milliers de personnes. Ce dimanche à 20h55, France 5 propose une soirée «C dans l’air spéciale – Cyberguerre : la menace fantôme».

Ni canons ni missiles, ni bombes ni tanks. La cyberguerre est silencieuse, mais ses dégâts peuvent être détonants. Couper l’électricité à des milliers de personnes, interférer dans des élections, paralyser des hôpitaux… : les frappes informatiques et les virus qu’elles propagent provoquent le chaos. La plupart du temps, les responsables, hackers ou États qui les emploient, ne sont jamais identifiés de manière indubitable. Dans le conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine, la cyberguerre fait rage au point que de nombreux experts n’hésitent pas à employer l’expression «première cyberguerre mondiale». Une guerre aux objectifs précis : déstabiliser l’adversaire, le paralyser, le décourager et semer la pagaille.

Un ver pas solitaire

La cyberguerre n’a pas attendu le 24 février 2022 et l’entrée de l’armée russe en Ukraine pour apparaître. La première cyberattaque de grande envergure a lieu en novembre 1988. À l’époque, Robert Tappan Morris est étudiant. Fils d’un informaticien célèbre, il met au point un logiciel malveillant, un ver, qui contamine en quelques heures des milliers de logiciels : entre 5 et 10 % des ordinateurs connectés à Internet. Le «ver Morris» vaudra à son inventeur d’être le premier condamné de l’histoire pour fraude et tromperie informatiques. Attaque, mais pas encore guerre. Cela ne va pas tarder.

Sans limite

«Comment contrer la superpuissance américaine ?» : c’est la question que se posent deux colonels de l’Armée de l’air chinoise dans le courant des années 1990. Ils énoncent la théorie de «la guerre hors limite». À l’époque, la modernisation de l’Armée populaire de libération avec des armes conventionnelles s’avère hors de prix. Les deux hommes imaginent donc une «guerre de demain» dans laquelle l’informatique tiendrait un rôle prépondérant. À l’aube du troisième millénaire, l’empire du Milieu s’érige en leader de la cybersécurité, au même titre que la Russie et les États-Unis. Depuis, la théorie a fait ses preuves.

Branle-bas de combat

Elle prend les traits d’attaques massives lors de la guerre russo-géorgienne en 2008 et de cyberguérilla lors du printemps arabe en 2011, quand les hackers d’Anonymous font sauter le pare-feu installé par le gouvernement pour interdire l’accès à Internet. En 2016, ce sont les élections américaines qui sont la cible d’attaques par déni de service qui rendent des sites Web indisponibles, bloquent des serveurs… En 2019, des hackers du Hamas piratent la diffusion du Concours Eurovision de la chanson en Israël et diffusent un message d’alerte, provoquant l’émoi dans la population.

Mobilisation générale

«La Chine, la Syrie, les États-Unis ou la Grande-Bretagne ont largement investi dans la mise sur pied de cyberbataillons», indique le portail Cairn. info. Et pour cause. En 2020, 30 milliards de données ont été volées dans le cadre de cyberattaques. Coût pour l’économie mondiale : près de 1.000 milliards de dollars.

Des groupes de hackeurs deviennent des mercenaires aux ordres de certains États. Avec le conflit entre la Russie et l’Ukraine, la cyberguerre prend une dimension jamais atteinte. Dès 2014 et l’annexion de la Crimée, les attaques se multiplient. Tant l’État ukrainien que les entreprises privées du pays sont ciblés. En 2015, une cyberattaque prive d’électricité des centaines de milliers d’Ukrainiens. Dès janvier 2022, les attaques visent des dizaines de sites du gouvernement. Et des banques.

Pour l’aider à se protéger et à répliquer, l’Ukraine fait appel à des pirates volontaires étrangers. Selon Reuters, «à ce jour, 260.000 personnes seraient actives». Une véritable armée informatique. De son côté, Vladimir Poutine nie toute attaque, mais reconnaît l’existence de «pirates patriotiques» agissant contre «les ennemis de la Russie».

Cet article est paru dans le Télépro du 6/10/2022

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