La folie Kadhafi

En 1969, Mouammar Kadhafi prend le pouvoir en Libye. Il le conservera jusqu’en 2011 et sa mise à mort. Son corps est enterré dans le désert, dans un lieu tenu secret. © Gamma-Keystone via Getty Images

Pendant plus de quarante ans, Kadhafi a dirigé la Libye dans la terreur. L’ivresse du pouvoir l’aurait-il rendu fou ?

Quand il était reçu à Paris par Sarkozy ou à Madrid par le roi d’Espagne, Kadhafi ne logeait ni à l’hôtel ni dans une résidence officielle. Il faisait installer sa (très luxueuse) tente de bédouin dans un jardin. Parmi ses gardes du corps, aucun homme : rien que des femmes – ses Amazones. On apprendra par la suite que bon nombre d’entre elles avaient été enlevées de force à leur famille pour devenir ses esclaves sexuelles… Le dirigeant libyen était-il un original, cherchant à se démarquer pour s’affirmer ? Ou était-ce un illuminé ? Une décennie après sa mort, la seconde hypothèse semble s’imposer. Comme le montre l’excellent documentaire proposé ce dimanche à 21h05 par France 5 : « Kadhafi, la folie d’un dictateur ».

Un coup d’État

L’histoire commence en 1969. Aidé de quelques camarades de l’académie militaire où il est encore étudiant, le jeune Kadhafi renverse le roi en place à Tripoli depuis l’indépendance et prend le pouvoir en Libye. Il le conservera jusqu’en 2011 – l’année où le Printemps arabe agite toute la région. En Libye, le mouvement se transforme en guerre civile. Kadhafi est capturé et tué. Durant ses quarante-deux années au pouvoir, l’homme a considérablement changé… Issu d’une famille pauvre, le jeune Kadhafi réclame d’abord la justice sociale. Mais très vite, ses idéaux s’évanouissent dans l’ivresse du pouvoir. Kadhafi se proclame président et chef des armées, il suspend la Constitution, interdit les partis politiques… Tout tourne désormais autour du culte de sa personnalité.

De Tripoli à Lockerbie

Durant ces décennies de pouvoir absolu, Kadhafi met en place un régime de terreur. Les citoyens sont fichés, les lignes téléphoniques sont sur écoute, les services secrets sont partout… Et le moindre soupçon donne lieu à une répression brutale. Amnesty International dénonce « des arrestations de masse, des disparitions et la torture systématique ». Les exécutions sont retransmises à la télévision.

Non content de diriger la Libye d’une main de fer, Kadhafi veut s’imposer sur le scène internationale. Il se proclame Chef des chefs arabes. Et puise dans la manne financière du pétrole pour s’attaquer à l’Occident. Au tournant des années 1980, de l’IRA aux Brigades rouges, il finance toutes les organisations terroristes européennes, de même que le terrorisme palestinien. Kadhafi sera aussi accusé d’avoir organisé l’attentat aérien de Lockerbie, qui coûta la vie à 440 personnes en 1988. Ronald Reagan, alors président des États-Unis, qualifie Kadhafi de « chien fou du Moyen-Orient ».

La folie du pouvoir

Kadhafi était-il fou ? Le film de France 5 donne la parole à des gens qui l’ont côtoyé. Son majordome, son caméraman personnel… Également le chirurgien qu’il convoqua une nuit pour une opération esthétique. Kadhafi exigea que l’intervention se fasse à vif car il craignait d’être assassiné durant l’anesthésie. Paranoïaque ? Mégalomane ? Psychopathe ? Depuis les années 1970, la CIA a mandaté des profilers pour tenter de comprendre la personnalité du dirigeant libyen. Tous arrivent aux mêmes conclusions : l’homme est cruel et insensible, incapable d’empathie, prêt à tout pour atteindre ses objectifs, sans états d’âme ni remords, pervers et manipulateur, mégalomane et paranoïaque. Au travers de ce profil, les experts établissent un lien entre pouvoir et folie. Ils estiment que d’autres dirigeants sont concernés. Au premier rang desquels un certain Vladimir Poutine…

Cet article est paru dans le Télépro du 28/11/2024

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