Fraude alimentaire : manger du faux pour de vrai
Le fléau de la contrefaçon alimentaire ne cesse de se développer : vins, huiles, fromages, charcuteries, poissons… : peu de secteurs sont épargnés ! Ce dimanche à 14h50 sur TF1, «Grands reportages» évoque ce business nauséabond.
Quand on évoque la contrefaçon, la plupart des gens imaginent des sacs, lunettes de soleil ou vêtements arborant le sigle d’une grande marque, alors qu’il s’agit de copies. Outre la maroquinerie ou le textile, un autre secteur est largement touché : l’alimentation.
En 2017, les produits alimentaires contrefaits représentaient 24 % des 31 millions d’articles de contrefaçon saisis aux frontières de l’Union européenne, loin devant les jouets et les cigarettes ! Pour ne citer en exemple qu’un scandale proche de nous – des lasagnes à la viande de cheval -, les aliments contrefaits représentent un business bien plus large et conséquent qu’on ne l’imagine.
Au royaume de Tricatel
La dénomination «fraudes alimentaires» recouvre différentes catégories. Les aliments contaminés que les industriels laissent sciemment ou non dans la chaîne alimentaire (contamination à la listéria par exemple, ou à la salmonelle : songeons aux œufs Kinder). Les aliments adultérés, comprenez une pratique frauduleuse qui consiste à mélanger un produit de moindre valeur à un autre et de vendre le tout sous une étiquette mensongère. Enfin, les aliments contenant des substances illégales et les tromperies en matière d’indication géographiques protégées.
Au niveau européen, le total des pertes liées à ces fraudes s’élève à quelque 30 milliards d’euros par an. Un juteux business qui ne semble pas prêt de s’arrêter. «Les saisies effectuées chaque année dans le cadre de l’opération Opson, coordonnée par Europol et Interpol, ne cessent d’augmenter et confirment qu’aucune denrée ni aucun pays ne sont épargnés», constate l’organisme de défense des consommateurs, Food Watch. «En 2020, environ 12.000 tonnes de produits illégaux et potentiellement dangereux ont ainsi été saisis avant d’être commercialisés dans les rayons des supermarchés.»
Le miel sans les abeilles
Pour s’enrichir, les fraudeurs alimentaires n’hésitent pas à user de toutes les entourloupes. Ainsi, de l’huile de tournesol mélangée à de la chlorophylle devient, par magie, de l’huile d’olive et se vend dix fois plus cher que son prix de base.
Au rayon épices, le poivre est le plus touché par la fraude : 59 % des pots vendus seraient un mélange de baies de poivriers et… de sable ! Plus fort encore, ces malfrats sont capables de vendre du miel qui n’a jamais rencontré la moindre abeille. «43 % des miels présentent des défauts de composition, de qualité ou sont faussement étiquetés français. Certains n’ont jamais vu l’ombre d’une ruche tant ils sont adultérés chimiquement», alerte Food Watch..
Parfois, les marchandises viciées sont susceptibles de mettre réellement la santé en danger. L’un des plus inquiétants exemples est le thon en boîte : avarié, il se voit injecter de nombreux additifs pour retrouver une fraicheur de façade. Les méthodes semblent grossières et, pourtant, selon Ingrid Kragl, de Foodwatch : «Il est impossible pour les consommateurs de savoir qu’un produit est contrefait».
Les Experts : vins et spiritueux
Le vin, l’un des fleurons les plus fameux de l’économie française, n’échappe pas à la contrefaçon. Des crus du Languedoc, notamment, sont frauduleusement rebaptisés Pomerol, Margaux ou Saint-Julien. Une situation inacceptable qui a donné vie aux «Brigades d’enquêtes Vins et Spiritueux», chez nos voisins français. «Les contrefaçons touchent aussi bien les grands crus que les vins de table», explique à TF1 le gendarme Vincent Van Assel. «Et les méthodes des contrefacteurs sont de plus en plus sophistiquées.» Entre 2004 et 2012, un Indonésien, Rudy Kurniawan, est parvenu à engranger 1,3 million de dollars en falsifiant les étiquettes de vins quelconques.
À lire : «Manger du faux pour de vrai : les scandales de la fraude alimentaire» (éd. Robert Laffont, mars 2021), signé Ingrid Kragl, directrice de l’information chez Foodwatch.
Cet article est paru dans le Télépro du 7/7/2022
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici