Et ils vécurent «heureux»… contre leur gré !

93 % des Indiens vivant en milieu urbain se sont unis à leur conjoint suite à un mariage arrangé © Surabhi Tandon / Arte
Alice Kriescher Journaliste

En Inde, la coutume des mariages arrangés est encore vivace dans bien des familles. Mais, aujourd’hui, certains jeunes se rebellent contre cette tradition. «Amours interdites en Inde» suit deux couples qui incarnent deux visions de l’amour conjugal. Un documentaire à découvrir ce samedi (18h05) sur Arte.

Les mariages forcés existent dans de nombreux endroits de la planète. Et lorsque les deux promis refusent de se plier à la coutume, ils se heurtent bien souvent à la violence de leurs proches.

Au nom de la tradition

Dans le documentaire «Amours interdites en Inde», samedi à 18.05 sur Arte, nous suivons deux couples. L’un dont l’amour, désapprouvé par leur famille respective, les a poussés à fuir, l’autre uni par une marieuse professionnelle. En Inde, où les aides de l’État sont presque inexistantes, le premier couple devra vivre sans la solidarité familiale tandis que le second sera richement doté par ses proches. Amnesty établit un distinguo entre mariage arrangé et forcé. Selon l’organisation, dans le premier, l’avis familial conserve une grande place, mais la décision de se marier ou non appartient aux potentiels futurs époux, tandis que dans le second, ils n’ont tout simplement pas voix au chapitre. Cependant, dans une Inde qui fonctionne encore selon un système social de castes, comment réellement évaluer le poids de la tradition et l’influence familiale lorsque le mariage est «seulement» arrangé ? Les plus récentes études prouvent que 93 % des Indiens vivant en milieu urbain se sont unis à leur conjoint suite à un mariage arrangé. Et sur dix millions de mariages annuels, seulement un quart serait le fruit d’une histoire d’amour.

Trop jeunes mariés

Si le mariage forcé est déjà une calamité, il existe un degré d’horreur supplémentaire : le mariage forcé des mineurs et plus particulièrement des jeunes filles. Chaque année, douze millions de mineures seraient ainsi contraintes au mariage. D’après les enquêtes menées par L’UNICEF, c’est en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud que la pratique du mariage précoce des filles est la plus répandue. Au Niger, par exemple, 76 % des filles sont mariées avant leurs 18 ans. «Il n’y a aucune limite d’âge. Il arrive que des enfants de 6 ans soient mariées. L’homme que la jeune fille épouse peut avoir seulement deux ans de plus qu’elle comme vingt ou trente ans de plus», explique Lakshmi Sundaram, directrice de l’association «Girls not Brides» (Filles Pas Épouses), dans les pages du Figaro. Une situation qui a pour conséquences évidentes une déscolarisation de ces enfants ainsi que des séquelles psychologiques et physiques dramatiques. Heureusement, les actions des différentes ONG portent leur fruit et on observe, depuis quelques années, une baisse mondiale de cet abominable phénomène. En Inde, où l’âge légal pour se marier est fixé à 18 ans, il y avait encore 47 % de mineurs qui étaient mariées de force en 2008 contre 27 % dix ans plus tard. Même constat en Asie du Sud, où l’on est passé de 50 % à 30 %. Idem en Éthiopie, l’un des pays d’Afrique où ce procédé est le plus usité, où la proportion des mariages forcés a été divisée par trois en une décennie. Néanmoins, le combat est loin d’être gagné. L’UNICEF rappelle que «plus de 150 millions de filles sont susceptibles d’être mariées d’ici à 2030».

Extrait d’un article parut dans le Télépro du 13 août 2020.

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