Éric Peugeot, enlevé à bord d’une… 403 !
Le 12 avril 1960, Éric Peugeot, 4 ans, petit-fils du grand patron de l’automobile française, est kidnappé. Dimanche, La Trois revient sur ce fait divers qui a bouleversé la France entière.
De son propre aveu, Éric Peugeot ne garde aujourd’hui aucun traumatisme de son enlèvement. Nous sommes le 12 avril 1960, le petit garçon a 4 ans. Son grand-père Jean-Pierre Peugeot, président de la marque automobile qui porte son nom, l’emmène avec son frère Jean-Philippe au très chic golf de Saint-Cloud et confie les enfants à la garderie du club.
Contre rançon
Jean-Philippe et Éric s’amusent, surveillés par la nurse. Un bref moment de distraction suffit. Elle a beau scruter les alentours, Éric a disparu. Près du toboggan, une lettre est retrouvée, adressée au père de l’enfant, Roland Peugeot. C’est une demande de rançon : 50 millions d’anciens francs français. Une somme colossale pour l’époque. La police est aussitôt avertie, mais laisse toute latitude à Roland Peugeot pour négocier, seul, avec les ravisseurs. La police n’a pas l’habitude de traiter ce genre de crime – c’est la première fois que le pays assiste à un kidnapping d’enfant -, et surtout, il n’est pas question de mettre en péril la vie de l’enfant, membre d’une des dynasties les plus prestigieuses de l’industrie automobile.
Le pouvoir de l’écran
Roland Peugeot est aussi le premier à user de la force du petit écran pour s’adresser aux kidnappeurs de son fils. «C’est un père à qui l’on vient de prendre son enfant qui s’adresse à vous. Tous ceux qui ont des enfants et les aiment me comprendront, j’en suis sûr. Mon seul souci est de le retrouver sain et sauf, le plus tôt possible. Je n’ai pas déposé de plainte. Je prends l’engagement formel de demander que le ravisseur ne soit pas poursuivi.»
Sur ordre des kidnappeurs, il réunit la somme de la rançon en billets de banque usagers et la dépose dans un lieu convenu à Paris, dans le passage Doisy, une galerie commerçante. Quant à l’enfant, il est abandonné dans une brasserie du XVI e arrondissement où il est retrouvé sain et sauf au cœur de la nuit. En définitive, l’affaire aura duré trois jours…
Sans violence
Le père insiste devant la presse : il a négocié seul sans l’aide de quiconque. L’enfant, exposé lui aussi aux journalistes, se souvient d’un trajet court en Peugeot 403, d’un rez-de-chaussée pourvu d’une télévision. La Peugeot a été volée. En réalité, l’enfant a été emmené dans un pavillon d’un village du Val d’Oise, non loin de Paris. Il a été bien traité et nourri, notamment de tablettes de chocolat. Il a même joué aux cartes avec ses ravisseurs. On est bien loin de la violence qui caractérisera plus tard le rapt d’enfants et d’adolescents.
Arrêtés et condamnés
La police ne disposant pas des moyens d’investigation d’aujourd’hui met du temps à boucler l’enquête. Onze mois plus tard, soit en mars 1961, elle met la main sur Pierre-Marie Larcher et Robert Rolland, alors qu’ils profitent pour l’un, des plaisirs du ski à Megève, et pour l’autre, du calme près de Bourg-en-Bresse. Interpol avait averti les enquêteurs français de la vie dispendieuse que menaient les deux malfrats dont on ne connaissait aucun revenu fixe pour un tel train de vie.
Vingt ans de prison
Ils sont condamnés à vingt ans de prison par la cour d’assises de Versailles, mais sont libérés douze et quatorze ans plus tard. Pour l’un, devenir professeur de… droit, et pour l’autre, travailler dans l’édition. Quant à Éric Peugeot, il a occupé différents postes, notamment en Belgique, dans le groupe familial, et a notamment présidé Theolia (aujourd’hui Futuren), fournisseur d’énergie éolienne. Il a aujourd’hui 66 ans.
Cet article est paru dans le Télépro du 18/08/2022.
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