Éoliennes maritimes : bonheur des uns, malheur des autres

D’ici à 2030, la Belgique veut tripler la capacité de ses parcs éoliens offshore au nombre, aujourd’hui, de neuf (ici à Ostende) © BELGA MAG/AFP via Getty Images
Alice Kriescher Journaliste

Dans le documentaire iodé «Les Éoliennes en mer – Quelle cohabitation avec la nature ?» (ce samedi à 22h25), Arte s’interroge sur l’impact des parcs éoliens implantés en pleine mer.

Lorsqu’elles ont débarqué dans notre paysage, côté humain, la controverse entourant les éoliennes en mer fut principalement esthétique : il ne fallait pas que le ballet de pales gâche la vue des vacanciers. Faune et flore marines n’ont, en revanche, pas eu leur mot à dire. Des années après l’installation du premier parc éolien offshore, en 1991, au Danemark, il est grand temps de les interroger pour comprendre l’effet de ces installations sur leur environnement direct.

Locataires heureux

Fort de la présence de parcs éoliens sur son territoire depuis 2009, notre pays, qui assurait en 2023 pas moins de 14,7 % de la production éolienne maritime de l’UE, est un intervenant de choix lorsqu’il s’agit de parler de l’impact de ces turbines géantes. Ainsi, une étude menée par notre Muséum des sciences naturelles a démontré ce que l’on appelle «l’effet récif», l’un des aspects positifs de ces infrastructures sur la biodiversité. «Enfoncée dans un fond sableux, la structure de l’éolienne attire de nouvelles espèces habituées à des substrats durs», relate le journal La Croix. «Peu à peu s’installent foule de micro-organismes, des algues, des invertébrés, des petits poissons qui attirent tour à tour des espèces de plus en plus grosses, jusqu’à créer tout un écosystème, plus abondant localement que l’orignal.»

Sanctuaire bienvenu

Autre point encourageant, l’effet dit, cette fois, «refuge». Dans ce cas, puisque la pêche est interdite dans les parcs belges (règle fluctuante selon les pays), certaines espèces y trouvent un espace de répit permettant une reproduction plus prolifique, tandis que des écosystèmes très dégradés sont carrément parvenus à se régénérer. Si les pêcheurs ont pu craindre, un instant, de voir leur rendement diminué par de tels lieux, il n’en est rien. «Il a par exemple été démontré précédemment que les bateaux de pêche capturaient plus de plies, pour le même effort de pêche, juste à l‘extérieur des parcs éoliens qu‘aux mêmes endroits avant la construction des parcs», indique le site Naturalsciences.be. «Reste toutefois à déterminer s’il s’agit d’un véritable effet qui persistera à long terme, dans le contexte de l’expansion à grande échelle des zones d’énergies renouvelables.»

Problèmes de voisinage

Malheureusement, dans le monde des parcs éoliens, tout n’est pas idéal. Parmi les victimes des dommages collatéraux, on retrouve, notamment, les tortues, certains poissons et des mammifères marins, à l’instar des marsouins, déjà en proie à un déclin inquiétant. Réclamation principale dans ce conflit de voisinage : les multiples pollutions sonores. «Explosions, construction et maintenance sont autant de bruits qui endommagent gravement leur système auditif, essentiel à leur écholocalisation et à leur survie», relate le documentaire d’Arte. Outre les fonds marins, les éoliennes peuvent aussi encombrer les airs et devenir un obstacle potentiel sur la route des oiseaux. À nouveau, les résultats des différentes études à ce sujet sont contrastés. «Alors que les populations d‘oiseaux marins ont chuté de 70 % dans le monde entre 1960 et 2010, les chercheurs remarquent que les parcs éoliens offrent des escales reposantes à des migrateurs, tout en menaçant certaines espèces de collisions…»

Le saviez-vous ?

Ces dernières années, une nouvelle technique, qui pourrait être complémentaire aux éoliennes offshores, est testée dans différentes eaux, dont notre mer du Nord : les panneaux solaires flottants. Point forts : un impact visuel amoindri, une bonne capacité de résistance à la houle et aux vents, ainsi qu’une durée de vie moyenne annoncée de trente ans, contre vingt, environ, pour les éoliennes.

Cet article est paru dans le Télépro du 19/9/2024

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici