Enfants d’Ukraine : trois ans de vie en guerre

Au moins 16 enfants sont tués ou blessés chaque semaine en Ukraine depuis le début de la guerre © Global Images Ukraine via Getty Images

Écoliers, adolescents, jeunes adultes : depuis trois années, ils sont victimes d’un conflit qui sacrifie leur jeunesse. Ce dimanche à 21h05, France 5 diffuse « Ukraine : l’enfance volée » .

D’abord, il y a les chiffres, froids, implacables, tragiques. Au moins 16 enfants sont tués ou blessés chaque semaine en Ukraine depuis le début de la guerre (source : Unicef). 1,5 million de personnes déplacées à l’intérieur du pays sont des enfants, dont environ 225.000 en âge d’être scolarisés (source : Onu). Plus de 3.500 établissements d’enseignement ont été endommagés ou détruits (source : Amnesty International). Et puis il y a les histoires de ces enfants. Celles qui font prendre conscience qu’ils sont en première ligne du conflit, meurtris dans leur chair, écorchés dans leur âme, privés d’une enfance, d’une adolescence, d’un début dans la vie que celle-ci ne leur rendra pas. « Les conséquences sur l’avenir d’une génération entière d’enfants sont déchirantes », écrit l’Unicef. Voici trois de ces histoires.

« Je n’ai connu que la guerre »

Avdiïvka, une ville industrielle de l’oblast (province) de Donetsk. Depuis 2014, la guerre y fait rage entre les séparatistes prorusses du Donbass et les forces ukrainiennes. C’est là que les envoyés de l’Unicef rencontrent Vika. Sur la photo, la petite fille blonde tend une fleur à sa maman. L’enfant n’a que 6 ans. Sa maman n’oubliera jamais l’histoire de sa naissance. « Pendant que j’accouchais, une forte explosion a retenti et toutes les fenêtres ont été brisées par une onde de choc. J’ai tout juste réussi à protéger Vika des éclats d’obus ». Vika confie : « Je n’ai connu que les bombardements depuis que je suis née ». Et lorsqu’au loin, des détonations retentissent et que sa maman lui demande si elle a peur, elle répond simplement : « Non, parce que tu es à côté de moi ». En novembre dernier, les rapports vérifiés disponibles faisaient état de 659 enfants morts et 1.747 autres blessés depuis le début de la guerre en Ukraine.

« J’aimerais retourner à l’école »

Stepan et Yaroslav ont 14 ans. Quand l’armée russe envahit leur pays le 24 février 2022, ils habitent Kharkiv, la deuxième plus grande ville d’Ukraine. Ils se réfugient dans les caves avec leur famille. « Tout autour, les bâtiments étaient en feu. Notre école a été prise pour cible pendant 12 heures. » L’établissement scolaire est complètement détruit, sa devise (« Réussir dans l’apprentissage – Réussir dans la vie ») se consume dans les flammes. Stepan et Yaroslav sont privés d’enseignement pendant plus d’un an. Le conflit actuel a perturbé l’éducation de plus de cinq millions d’enfants. Malgré la mise en place de plateformes d’éducation, « la guerre efface des années de scolarité, mais aussi de jeux avec les amis, de moments passés avec leurs proches, les privant ainsi de leur droit à l’éducation et au bonheur, et causant des ravages sur leur état mental », constate l’Unicef. L’envahisseur a aussi décidé de couper les racines d’autres enfants ukrainiens. Selon une étude de l’université américaine de Yale, 20.000 d’entre eux ont été emportés en Russie. Les plus jeunes ne se souviendront pas de leur passé. Quant aux ados qui refusent d’être « russifiés », ils sont envoyés dans des camps de rééducation. L’étude en a recensé une quarantaine.

« Je ne voulais pas faire la guerre »

Oleksandr a 18 ans. Quand des journalistes de la BBC le rencontre en septembre dernier, il vient de fuir Kiev, la capitale ukrainienne, pour la Slovaquie voisine. « Je ne voulais pas faire la guerre », confie-t-il. « C’est effrayant. » Depuis le début de la guerre, de plus en plus de jeunes ont trouvé refuge à l’étranger. 6,168 millions : c’est le nombre de réfugiés ukrainiens enregistrés à travers l’Europe fin juillet 2024 par le Haut Commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR). Un tiers aurait moins de 18 ans (source : Eurostat). Selon un sondage réalisé auprès d’écoliers ukrainiens, près d’un quart d’entre eux veulent partir à l’étranger. En avril dernier, l’âge d’être mobilisé est passé de 27 à 25 ans, ce qui n’a pas rassuré les jeunes Ukrainiens. Pourtant, nombre de ceux-ci décident de mettre leurs études entre parenthèses pour s’investir dans cette guerre, parfois dans des associations humanitaires, parfois, dès l’âge de 18 ans, comme volontaires aux côtés des militaires. Combien parmi les jeunes exilés ne reviendront jamais au pays ? Combien de ceux montés au front ne reverront jamais leurs proches ? « Malgré les circonstances difficiles, l’Ukraine n’aura pas de génération perdue à cause de la guerre », promet le président Volodymyr Zelensky en refusant la mobilisation générale (prônée par les Américains). Il sait que trois ans de guerre ont d’ores et déjà provoqué un cataclysme dans les familles. 

Cet article est paru dans le Télépro du 13/2/2025

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