Enfance : du fruit du péché à l’enfant-roi
Jadis un enfant travaillait dès ses 8 ou 10 ans. Aujourd’hui, il ne quitte plus ses parents avant 25 ou 30 ans. La notion d’enfance a beaucoup évolué…
Le culte de l’enfant-roi représenterait un danger pour la démocratie. C’est la conclusion d’une étude récemment publiée par des chercheurs en psychologie de l’UCLouvain. Les enfants-rois deviendraient des adultes individualistes, qui se soucient de leur personne avant de considérer l’intérêt général. Si tous les enfants ne sont pas élevés ainsi, force est de constater que l’enfant occupe désormais une place privilégiée dans la société. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. Comme le rappelle Arte avec le premier volet du documentaire «Les Âges de la vie» (samedi, 20.50).
Petit pervers
Qu’est-ce qu’un enfant ? La réponse à cette question parait simple, mais elle a beaucoup évolué au fil des siècles. Aujourd’hui, on considère que l’enfant est un individu à part entière, avec des droits. Mais on sait aussi que c’est un être immature – tant psychologiquement que physiquement -, qu’il est donc fragile et doit être protégé.
Dans les temps anciens, l’enfant était un être sans valeur particulière. Il naissait alors que d’autres mourraient, et ainsi se poursuivait le cycle de la vie. Avec l’arrivée de la chrétienté, l’enfant devient une âme à sauver. Comme il est le fruit du péché originel, il est pervers par nature. L’éducation est alors conçue comme un dressage. Notamment par le biais des institutions catholiques, qui inculquent la discipline et l’obéissance. Cela perdurera jusque dans la seconde moitié du XXe siècle.
La mine et l’usine
Dès le siècle des Lumières, une autre conception de l’enfance voit pourtant le jour. Rousseau considère que l’enfant nait naturellement bon. Il est vain de vouloir le dresser à l’aide de punitions. Au contraire, il faut le laisser s’épanouir pour que s’exprime sa personnalité… Ce point de vue reste cependant théorique. Car à l’époque, les enfants sont d’abord une force de travail. Après la Révolution industrielle, ils passent des champs à la mine ou à l’usine.
En Belgique, il faut attendre 1889 pour qu’une loi interdise le travail des enfants de moins de 12 ans. Dans les familles, si chaque enfant est une bouche à nourrir, c’est d’abord deux bras pour ramener un peu d’argent. C’est aussi un bâton de vieillesse. Jusque dans les années 1960 ou 1970, il n’était pas rare que la dernière fille de la famille soit contrainte de rester célibataire jusqu’à la mort de son dernier parent, pour lui prêter secours jusqu’au bout.
Droits et devoirs
La perception de l’enfant a radicalement changé avec les bouleversements du XX e siècle. La baisse de la mortalité infantile, les acquis sociaux, la moindre importance de la religion, l’accès à la contraception… Ajoutez à cela la naissance et la vulgarisation de la psychologie. Tout ceci a fait de l’enfant un petit être autonome, désiré et choyé. Des lois sont venues entériner cet état de fait : l’enfant a désormais des droits. Mais qui dit droits, dit aussi devoirs…
«Il est de la responsabilité des adultes de préparer les enfants à l’exercice de leur individualité et de la responsabilité qui lui est associée», souligne la FAPEO (Fédérations des Associations de Parents) en conclusion d’une étude sur l’évolution de la place de l’enfant dans la société. «En effet, il faut non seulement protéger et affirmer les droits des enfants, mais aussi préparer ces derniers à les intégrer dans leur réalité quotidienne avec leur corrélé : les devoirs du citoyen.»
Éternels adulescents
Adulescent : jeune adulte qui continue à avoir un comportement d’adolescent. Le mot est entré au Larousse en 2019. Car c’est une tendance que l’on constate de plus en plus. Selon de récentes recherches en neurosciences, le cerveau humain ne serait adulte qu’autour de 30 ans.
Cet article est paru dans le Télépro du 7/7/2022
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