
Des femmes prêtres ? À Pâques ou à la Trinité…
Le Vatican reste inflexible. Cela n’empêche pas des femmes de penser autrement. Un sujet évoqué ce samedi à 22h25 sur Arte avec le documentaire «Femmes prêtres, vocations interdites».
« L’Église est la seule organisation à interdire l’accès à certaines fonctions en raison du genre auquel on appartient. » Lorsqu’elle évoque la place de la femme dans l’Église catholique, Myriam Tonus n’y va pas par quatre chemins. Laïque dominicaine, théologienne, chroniqueuse et productrice pour RCF Namur, commentatrice des messes en radio à la RTBF : cela donne une certaine légitimité à ses propos. Des femmes prêtres dans l’Église ? « Non, il n’y en aura pas. Jean-Paul II a dit que c’était une Vérité révélée (il attribue le fait à une volonté du Christ, ndlr) et le pape François tient le même discours que ses prédécesseurs. » En 2002, Myriam Tonus écrivait : « Miroirs d’Ève : quand les hommes font parler Dieu à propos des femmes » (L‘Harmattan).Son constat vingt-trois ans plus tard : « Je ne devrais pas changer une seule ligne. Ce refus, c’est comme si les prêtres hommes catholiques craignaient que les femmes leur prennent leur sacralité ». Vérifications.
Parce que Jésus était un homme
Le frère Paul Adrien fait partie de ceux que l’on appelle « les prédicateurs 2.0 » : 478.000 abonnés sur YouTube, plusieurs dizaines de milliers sur TikTok. Son argumentaire pour expliquer l’absence de femmes prêtres ? « Une femme ne peut pas devenir prêtre parce que le boulot d’un prêtre, c’est de représenter dans son corps Jésus. » Si Jésus avait été une femme ? « Vu que la religion catholique est une religion de l’incarnation, il n’y aurait pas de prêtres, mais des prêtresses », déclare le dominicain. « Quand le prêtre dit durant la messe : ceci est mon corps livré pour vous, c’est le corps d’un homme masculin qu’il offre en sacrifice. » CQFD pour le prédicateur.
À défaut d’être prêtre…
Contrairement à de nombreuses autres confessions chrétiennes, l’Église catholique demeure catégoriquement opposée à l’idée d’ordonner des femmes. Le Vatican considère cela comme un crime grave en droit canonique, passible d’excommunication. Pas d’ordination de femmes donc, mais alors quelle place pour elles ? « Il n’y a aucune raison ni aucun obstacle qui puisse empêcher les femmes d’exercer des rôles de direction dans l’Église », précisait un texte approuvé par le Souverain pontife lors d’une assemblée sur l’avenir de l’Église catholique en octobre dernier. « Elles pourraient un jour devenir diacres. » Tout récemment, le théologien français Jean-François Chiron ne disait pas autre chose dans les colonnes du quotidien La Croix en déclarant : « Les femmes n’ont pas besoin de devenir prêtres pour être actives dans l’Église. » Il est vrai que, dans les conseils épiscopaux (qui regroupent les adjoints proches de l’évêque), des femmes (parfois mariées) occupent des postes à responsabilités et dirigent des départements.
Féminité ? Connaît pas !
En marge du synode du mois d’octobre dernier à Rome, l’Association des femmes prêtres catholiques romaines (excommuniée depuis 2007) a ordonné plusieurs femmes prêtres et diacres. Un geste provocateur pour tenter d’entamer un dialogue avec le Pape. Loin de ces extrêmes, Myriam Tonus n’en dénonce pas moins les arguments utilisés par certains opposants à la prêtrise des femmes. « J’ai relu des historiens très jésuites qui déclaraient : » C’est très clair, les apôtres étaient tous célibataires. » Ah bon ? On est en train de refaire une histoire de laquelle on ne sait rien, à laquelle on n’a pas accès, pour justifier ce qui est finalement une règle disciplinaire. » Pour cette maman de quatre enfants, grand-mère à cinq reprises, c’est la conception de la femme dans l’institution catholique qu’il faut interroger. Elle l’affirme : « La question du féminin est un impensé dans l’Église. » Pourquoi alors y rester ? « Comme laïque dominicaine, je ne dépends pas d’un évêque. Je ne dépends pas non plus financièrement de l’Église. Je ne suis pas là pour faire du militantisme », conclut Myriam Tonus. « Commenter les messes ou faire des émissions sur RCF que des milliers de gens écoutent, c’est un service d’Église, en cohérence avec ma foi. » Le problème de l’ordination des femmes ? « Cela ne me perturbe pas au point de dire : je m’en vais ».
Cet article est paru dans le Télépro du 10/4/2024
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