Dans les crocs du crack

Principalement utilisée par des personnes vulnérables et marginalisées, cette drogue est associée à des problèmes sanitaires et sociaux © Getty Images

Cette drogue se répand de plus en plus en Europe. La Belgique est aussi concernée. Un phénomène évoqué ce jeudi à 23h sur France 2 dans «Complément d’enquête».

En septembre dernier, un prospectus fait beaucoup parler de lui à Liège. À la façon d’un mode d’emploi, il explique de manière didactique comment procéder pour transformer de la cocaïne en crack, une drogue très addictive. Le dépliant est imprimé et distribué dans la Salle de Consommation à Moindre Risque (SCMR) pour usagers de drogues, mise en place par la Ville.

Des parents et des proches de jeunes concernés par le fléau s’en émeuvent : «C’est un peu comme distribuer un mode d’emploi sur la meilleure façon de se suicider à un dépressif», s’insurge l’un d’eux sur Internet. «Et en plus, ça peut se retrouver n’importe où et dans n’importe quelles mains».

«Un dépliant parmi d’autres, exclusivement à destination de nos usagers», répond le coordinateur général de la Fondation privée Tadam (qui assure depuis 2018 l’animation et la gestion de la salle). Dans une nouvelle version, une mention concernant la nocivité du stupéfiant sera toutefois ajoutée.

Au-delà de cette polémique liégeoise, un constat : la consommation de crack est en augmentation en Europe. La Belgique n’est pas épargnée.

Bad trip

Le 8 juillet dernier, l’Observatoire européen des drogues et toxicomanies publie son rapport annuel. Si le cannabis reste la drogue la plus «populaire» (plus de 22 millions d’adultes européens déclarent en avoir consommé au cours de l’année écoulée), une tendance inquiétante retient particulièrement l’attention des auteurs : la consommation de crack se répand progressivement.

Apparu dans les années 1970, le crack («the rock» en américain) envahit les États-Unis la décennie suivante. Il s’agit de la forme cristalline de la cocaïne. S’il peut être dissous pour être injecté, en général, il se fume : les premiers à le consommer lui donnent le nom de «crack» en raison des crépitements produits par la combustion des résidus de kérosène qu’il contient.

Désastre sanitaire

Comme le mentionne le site rvh-synergie, spécialisé dans la prise en charge des addictions, «le crack produit un effet de « flash » qui provoque un plaisir bref et intense». Les effets stimulants durent une dizaine de minutes, ensuite c’est la descente : «le sujet plonge dans un état d’angoisse et de dépression qui incite à une nouvelle consommation».

Outre le fait qu’elle soit principalement utilisée par des personnes vulnérables et marginalisées, le rapport de l’Observatoire européen souligne également à quel point cette drogue est associée à des problèmes sanitaires et sociaux. Aux risques accrus d’infection par le VIH et le virus de l’hépatite C (lorsqu’il est pris par injection) s’ajoutent ceux de maladies pulmonaires et de troubles neurologiques. À la criminalité liée aux gangs se joignent la violence et les problèmes financiers graves…

L’engrenage

7.000 patients ont entamé un traitement pour des problèmes de crack en Europe en 2020, trois fois plus qu’en 2016. L’Irlande, l’Espagne, la France, l’Italie et le Portugal font tous état d’augmentations notables. La Belgique également. Une analyse des eaux usées dans treize villes européennes a permis de détecter des résidus de crack «dans toutes les villes lors de tous les jours d’échantillonnage». C’est à Anvers (et Amsterdam) que les charges les plus élevées ont été constatées.

Dans les colonnes de La Libre Belgique, un acteur de terrain bruxellois signalait à quel point le crack (vendus entre 5 et 10 € le caillou dans les rues de la capitale) faisaient basculer encore un peu plus dans la précarité des usagers déjà en situation de faiblesse. Une véritable spirale vers la déchéance.

Cet article est paru dans le Télépro du 17/11/2022

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