Chaos sur chaos à Mayotte
Le 14 décembre dernier, le cyclone Chido a ravagé Mayotte. Mais l’île française était déjà en détresse avant cette catastrophe naturelle.
Depuis la mi-décembre, on ne parle que de Mayotte. Cet archipel de l’océan Indien a été ravagé par le plus puissant cyclone qu’ait connu la région depuis près d’un siècle. Dans les reportages télé, certains se sont étonnés de découvrir des bidonvilles et une immense pauvreté… alors que Mayotte est un territoire français ! Que s’y passe-t-il exactement ? Lundi à 22h55, La Trois propose un documentaire réalisé avant la tragédie. Son titre est limpide : « Mayotte, un département français à la dérive ».
L’île aux parfums
Mayotte appartient à la France depuis les années 1840. On la surnomme alors « l’île aux parfums » en raison de la profusion de fleurs qui y caressent les narines de leurs douces effluves. À l’époque, l’île compte environ 3.000 habitants… Selon les chiffres de l’INSEE, ils étaient 60.000 dans les années 1980, 300.000 aujourd’hui. Mayotte est le département français affichant le plus haut taux de croissance démographique. C’est aussi le plus densément peuplé après Paris et l’Île de France. Toujours selon les chiffres officiels, la population de Mayotte pourrait atteindre 760.000 personnes en 2050 si le flux migratoire des dernières années se poursuit. Car le principal problème de Mayotte, c’est l’arrivée massive de migrants clandestins. Ce département français au cœur de l’océan Indien fait figure d’eldorado pour certains de ses voisins africains. À commencer par les Comores, l’île voisine, distante d’une septantaine de kilomètres.
Les voisins comoriens
Les Comores ont également été françaises. Mais en 1974, les Comoriens se sont prononcés à 93 % pour l’indépendance. Depuis, le pays fait partie des plus pauvres du monde. Il est même répertorié parmi ceux souffrant de la faim. La tentation de l’immigration est donc forte…
Les traversées ont lieu de nuit, dans des embarcations de fortune qui ont déjà coûté la vie à des milliers de migrants. Mais le risque n’empêche pas les Comoriens d’affluer, de sorte qu’ils représentent aujourd’hui la moitié de la population de Mayotte.
La pression est donc immense sur le petit territoire français. Notamment en matière de logement. Avant le cyclone, on estime que 79 % des ménages vivaient en habitat précaire, 59 % n’avaient pas de sanitaire, 29 % ne disposaient pas d’eau courante, 21 % n’étaient pas raccordés à l’électricité. L’eau est le problème le plus aigu, l’île ne disposant que de très peu de ressources naturelles en eau potable. Si l’on ajoute à cela de fréquentes sécheresses et la pollution environnementale résultant d’une surpopulation ingérable, on comprend mieux la gravité de la situation du département avant la catastrophe naturelle…
Un manque d’infrastructure
Tout cela engendre inévitablement des tensions socio-économiques. Mayotte est le département français où le taux de chômage est le plus élevé (37 %). C’est aussi celui avec le plus fort taux de délinquance.
Si l’immigration explique une partie du phénomène, le défaut d’infrastructure a aussi sa part de responsabilité. Mayotte manque de services publics élémentaires, notamment d’écoles et d’hôpitaux. 70 % de la population ne possèdent aucun diplôme, 50 % des jeunes ne savent ni lire ni écrire… Et l’île ne compte que 0,18 médecin pour 1.000 habitants alors qu’ils sont 2 en France métropolitaine et 3,2 en Belgique. Tout cela ne fait évidemment que renforcer l’impact de la catastrophe naturelle…
Rappel des faits
Le 14 décembre dernier, avec des rafales à plus de 220 km/h, le cyclone Chido, le plus intense qu’ait connu Mayotte depuis 90 ans, a ravagé l’archipel français de l’océan Indien où un tiers de la population vit dans de l’habitat déjà précaire. Cases anéanties, toits en tôle envolés, poteaux électriques à terre, arbres arrachés… Les habitants, qui sont restés confinés pendant le passage du cyclone, ont découvert des scènes de chaos. À l’heure de boucler ces lignes, la catastrophe aurait fait 39 morts, des centaines de disparus et des milliers de blessés.
Cet article est paru dans le Télépro du 2/1/2025
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