Boxer pour exister

En Zambie, les femmes mettent les choses au poing ! © Arte

En Zambie, les femmes font de la boxe… pour sortir de la pauvreté et de la domination masculine. Les gros bras sont de sortie sur Arte à 17h05 !

La Zambie est l’un des pays les plus pauvres du monde. L’un de ceux où l’espérance de vie est la plus courte. Et où les inégalités entre hommes et femmes restent abyssales. Depuis quelques années, ce pays d’Afrique australe est cependant secoué par un étonnant mouvement. Pour affronter leur dure réalité, les femmes zambiennes ont décidé… de se mettre à la boxe.

Million Dollar Baby

La boxe, c’est un sport d’hommes. L’affirmation n’a rien de sexiste, il suffit de remonter l’histoire pour s’en convaincre. Alors que le pugilat masculin est déjà pratiqué lors des Jeux olympiques antiques, il faut attendre 2012 et les JO de Londres pour que la boxe féminine soit inscrite au tableau des disciplines. Ce sport connaît un certain engouement depuis «Million Dollar Baby», le film de Clint Eastwood sorti en 2004 et qui valut un Oscar à Hilary Swank pour son rôle de jeune boxeuse. Si la boxe féminine se répand peu à peu, c’est surtout dans les pays occidentaux. Aux États-Unis, avec Laila Ali, la fille du légendaire Mohamed Ali. Puis en France, avec une belle brochette de championnes. Mais la Zambie va peu à peu s’imposer comme un pays de boxeuses, dans le sillage d’une femme d’exception : Esther Phiri.

Sept titres mondiaux

Esther a grandi dans l’un des bidonvilles de Lusaka, la capitale zambienne. L’un de ces quartiers où chacun tente de (sur)vivre avec un dollar par jour. Elle a 8, peut-être 10 ans lorsqu’elle perd son père. La fillette devient marchande de fruits et légumes sur les trottoirs de la ville. À 16 ans, elle se retrouve enceinte. Puis sa sœur aînée décède, lui laissant quatre enfants en plus de sa petite fille. Comment s’en sortir avec toutes ces bouches à nourrir ? Quelque temps auparavant, Esther avait eu l’occasion de participer à un ministage de boxe organisé dans son quartier par une ONG. Elle était la seule fille et ça lui avait bien plu. Et si elle devenait boxeuse ? Ce serait peut-être un moyen de gagner de l’argent. Et ainsi de ne pas devoir dépendre d’un homme… Le choix d’Esther choque ses proches. Car la société zambienne est patriarcale et ce conservatisme est entretenu par les nombreuses églises évangéliques du pays. Mais Esther n’en a rien à faire. D’autant qu’elle est rapidement soutenue par un ancien champion zambien, qui devient son entraîneur. En 2005, à 18 ans, Esther Phiri décroche son premier titre mondial. Elle en obtiendra six autres dans les années qui suivront.

Choisir son destin

Depuis, Esther Phiri a raccroché les gants et entrepris les études qu’elle n’avait pas pu faire lorsqu’elle était enfant. Elle est devenue une icône en Zambie, tout particulièrement pour les femmes. Car Esther est la preuve vivante que l’on peut sortir de la pauvreté et ne pas vivre sous la coupe d’un homme. Suivant son exemple, de très nombreuses Zambiennes sont donc montées sur le ring. Samedi, dans «GEO Reportage», la caméra d’Arte suit trois d’entre elles. Toutes ne deviendront peut-être pas professionnelles, mais toutes auront appris à échapper au destin tout tracé que semblait leur imposer leur quartier : pauvreté, alcoolisme, prostitution et MST. «Depuis que je m’entraîne, je n’ai plus l’impression d’être une victime», explique l’une de ces boxeuses. «Avant, je pensais que les choses ne pouvaient pas changer. Maintenant, je crois en moi. La boxe a profondément changé ma vie. Aujourd’hui, je suis une femme indépendante.»

Cet article est paru dans le Télépro du 20 août 2020.

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