Aquellum, ville du futur
Le 10 janvier 2024, une vidéo TikTok dévoile les premières images de synthèse d’Aquellum. Cette ville du futur, digne d’un film de science-fiction, se veut une formidable vitrine pour l’Arabie saoudite… Mais à quel prix ?
Imaginez une cité luxueuse et ultramoderne, creusée à même la montagne, à laquelle on accéderait en bateau depuis la toute première marina flottante au monde, via un canal souterrain… Telle est l’ambition du prince saoudien Mohammed ben Salmane. Elle s’intègre à son gigantesque projet de mégalopole Neom, qui englobera plusieurs villes du futur sur un territoire d’environ 26.500 km2, soit presque aussi grand que la Belgique ! Les travaux XXL ont déjà débuté en 2021. Les exactions aussi. Le magazine d’Arte « Le Dessous des images » (lundi, 19.30) nous en dévoile le côté obscur…
Mégapole futuriste
Sur le papier, Aquellum a tout pour plaire. « La ville aura la forme d’une immense construction de 100 mètres de hauteur, regroupant des appartements, des hôtels, des centres commerciaux, des jardins et divers pôles de divertissement », détaille la plateforme Futura Sciences. « Un système de transport dédié permettra de naviguer entre les différents niveaux de la ville. » Ce « nouveau futur » (traduction de « Neom »), tout droit sorti du film « Le Cinquième élément », comptera aussi d’autres lieux d’amusement, tels un ensemble d’îles artificielles, une ville flottante ou… une station de ski en plein désert ! Pas très écologique…
Bio dégradé
Le site officiel Neom se targue pourtant de respecter « la neutralité carbone ». Les arguments grandiloquents ne manquent pas. Les clins d’œil aux investisseurs non plus. « La mégapole s’appuiera massivement sur les énergies renouvelables, avec des fermes éoliennes et photovoltaïques et des systèmes de stockage d’énergie à grande échelle », garantissent les promoteurs. De la pollution ? Il n’y en aura pas. « Les moyens de transports seront autonomes et écologiques. Les bâtiments resteront immaculés grâce à un air pur et frais. » Pas convaincu ? Le prince héritier Mohammed ben Salmane a une technique infaillible pour persuader les plus sceptiques.
Sacrifices humains
« Torture, condamnations à mort, peines de prison… » L’enquête « The Dark Side of Neom », signée Lina al-Hathloul, militante saoudienne exilée à Bruxelles, est édifiante. Elle met en lumière « de graves violations des droits humains. Ce qui n’empêche pas de nombreuses entreprises européennes, attirées par la manne financière de 500 milliards de dollars que représente Neom, de participer au chantier ». À ces accusations, Son Altesse MBS rétorque qu’ « à Neom, il n’y a personne dans le désert ». C’est compter sans les 20.000 Bédouins de la tribu des Howeitat qui y vivent depuis des siècles… Ceux qui se sont opposés à l’expropriation de leurs terres sont au mieux en prison, au pire assassinés. À l’instar d’Abdoul Rahim Ahmed al-Howeiti, très (trop ?) actif sur les réseaux sociaux pour dénoncer cette « spoliation généralisée ».
Pas de quoi entacher le beau tableau promis par la ville aux airs d’aquarelle. « La première phase du projet dantesque devrait être achevée d’ici à 2025 », précise Futura Sciences. Voilà qui présage bien des montagnes à soulever…
Cet article est paru dans le Télépro du 5/9/2024
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