Malaisie: régime et sport pour policiers obèses
A bout de souffle, Mohamad Ra’ayim Jemahir transpire à grosses gouttes pour essayer de maigrir, comme d’autres policiers obèses en Malaisie. Leur hiérarchie les incite à faire des exercices physiques pour perdre du poids par souci d’efficacité, mais aussi pour obtenir des promotions.
Il pédale sur un vélo d’appartement, dans une salle de sport du QG de la police à Kuala Lumpur, la capitale.
Ra’ayim pèse 102 kilos et figure parmi les 11.000 agents de police en surpoids sur un total de 122.000, soit près de 10% des effectifs de ce pays d’Asie du Sud-Est.
En janvier, la direction de la police a lancé au siège de l’institution un programme de remise en forme basé sur le volontariat et prévenu les agents concernés qu’ils devraient perdre des kilos pour monter en grade. Son constat: l’obésité réduit la productivité des effectifs et contribue à une hausse de l’absentéisme pour raisons de santé.
Depuis, une trentaine de policiers viennent faire quotidiennement du sport et s’efforcent de respecter un régime de 2.000 calories maximum par jour. Ils courent sur des tapis roulants, font du vélo et d’autres exercices dispensés par un instructeur. Objectif, perdre 10% de leur poids sur six mois.
Ra’ayim, lui, veut maigrir de 16 kilos et retrouver la forme. Mais son principal problème, ce sont les plats gras et épicés typiquement malaisiens qu’il mange au cours de journées souvent longues passées au bureau.
« Avant, je mangeais sans faire attention. J’avais envie de manger chaque fois que je voyais de la nourriture. Mais maintenant, je mange quand il faut », raconte Ra’ayim, 40 ans.
– Meilleure productivité, meilleure image –
Suresh Mariah, 28 ans, peine à plier ses genoux et à accomplir des exercices de saut. La balance affiche 111 kg quand cet agent se pèse. Il raconte avoir pris beaucoup de poids après une déchirure du ligament d’un genou il y a quelques années, mais aussi en raison de sa forte attirance pour le plat national malaisien, le nasi lemak — du riz bouilli dans du lait de coco et servi avec un œuf au plat, des anchois séchés et des cacahuètes rôties.
En mars, Suresh se mariera et il compte d’ici là perdre 20 kilos. « J’ai honte de mon poids », dit-il, ajoutant que son apparence physique a « choqué » sa famille et ses amis.
Ce programme de remise en forme n’est proposé pour l’instant qu’à Kuala Lumpur mais le directeur du management de la police, Zulkifli Abdullah, espère bien l’étendre prochainement aux agents du pays entier.
Car le surpoids d’une partie non négligeable des forces de police contribue à aggraver la mauvaise image de cette institution gangrenée par la corruption.
Le stéréotype du policier en surpoids est loin d’être spécifique à la Malaisie, mais il a atteint des proportions inquiétantes dans ce pays de quelque 30 millions d’habitants.
« En 2015, environ 200 agents ont succombé à des maladies telles que des attaques cardiaques et le diabète », observe Zulkifli, soulignant qu’un nombre croissant de policiers a une tension élevée.
En moyenne, 560 agents sont en arrêt maladie quotidiennement, ce qui a entraîné une perte de productivité de 38 millions de ringgit (8,4 millions d’euros) au cours des quatre dernières années, a calculé Zulkifli.
– ‘Je veux être promue sergente’ –
Le problème va bien au-delà de la police, des experts de santé ayant mis en garde contre une « épidémie » d’obésité en Malaisie, où près de la moitié de la population est en surpoids, selon de récentes études.
Les Malaisiens sont friands de recettes nationales riches en calories comme le riz et les nouilles bouillis dans l’huile, le poulet frit et les currys à base de lait de coco.
Zulkifli estime que les policiers doivent montrer le bon exemple. Un policier en surpoids est un agent qui manque de « discipline », dit-il. « Les agents de police doivent être présentables. Nous devons courir et procéder à des arrestations. Je ne pense pas qu’un officier obèse peut être aussi productif qu’un agent en bonne forme. »
Zauyah Abdul Rahman, une policière de 37 ans qui participe au programme de remise en forme et suit un régime, a réduit sa consommation de café et de malbouffe. Elle pèse 86 kilos et rêve d’en perdre 10 pour avoir meilleure allure dans son uniforme. Et aussi pour monter en grade, dit-elle: « Je veux être promue sergente. »
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