Une question de goûts

Image extraite du documentaire «Les Pouvoirs secrets du goût» © Arte

Des goûts et des couleurs, on ne discute pas. Sauf que… en matière du goût, la science a bien des choses à nous dire. Notamment samedi sur Arte (20.50), avec le documentaire en deux épisodes « Les Pouvoirs secrets du goût ».

Outre l’avantage de nous faire passer un bon moment à table lorsque nous savourons nos plats favoris, notre capacité à percevoir la sapidité des aliments n’aurait-elle pas un objectif plus important ?

Flaveur

Avant toute chose, une petite mise au point lexicale s’impose. Ce que nous appelons communément le « goût » recouvre en fait plusieurs réalités. En premier lieu, la gustation. Les bourgeons du goût, situés sur les papilles gustatives de notre langue, sont chargés de détecter les molécules provenant des aliments et d’envoyer un signal au cerveau afin de percevoir la saveur de ce que nous dégustons : sucré, salé, acide, amère ou umami. Le nez, lui, joue un rôle clé pour l’olfaction. Lorsque nous mangeons, des molécules odorantes sont libérées et remontent par notre gorge jusqu’à nos fosses nasales. Nous sommes alors capables de reconnaître les arômes (fraise, café, vanille…). Enfin, notre système trigéminal (formé par un nerf divisé en trois branches dans la bouche, le nez et les yeux) nous permet de déterminer si l’aliment est frais (menthe), piquant (piment), pétillant… Plutôt que de parler de « goût », les scientifiques préfèrent alors le terme de « flaveur », qui recoupe ces trois facettes.

Rôle des saveurs

Si certains tendent à y ajouter le gras, la plupart des chercheurs s’entendent aujourd’hui sur l’existence de cinq saveurs fondamentales : l’amer, l’acide, le sucré, le salé et l’umami. Celles-ci ne servent pas qu’à s’accorder pour nous régaler, elles ont surtout pour fonction de nous maintenir en bonne santé… et en vie. Le sucré sert à détecter les aliments riches en énergie directement assimilable. Notre seuil de perception du sucre est très bas : une grande quantité est nécessaire pour que nous la ressentions. À l’inverse de l’amertume, que nous percevons même en concentration extrêmement faible. Il faut dire que son rôle physiologique est de détecter des molécules potentiellement toxiques. Tout ce qui est amer n’est évidemment pas du poison, mais beaucoup de toxines, notamment présentes dans les plantes, sont amères. Ainsi, le rat est pourvu de trente-six détecteurs d’amertume, quand le chat, en bon carnivore, n’en possède que six. Le sel, quant à lui, sert à maintenir notre équilibre électrolytique (c’est-à-dire un bon niveau des minéraux nécessaires). La saveur acide sert à évaluer la maturité des fruits et à détecter une contamination microbienne. Enfin, l’umami (« délicieux » en japonais) permet de repérer les aliments riches en protéines. On le trouve notamment dans la viande, le parmesan, les champignons et le lait maternel.

Idée fausse

On entend parfois parler d’une « carte de perception des saveurs », qui voudrait que chacune ait sa zone de reconnaissance à un endroit précis de la langue. C’est totalement faux. Cette croyance vient d’une erreur de traduction d’un travail de recherche allemand par un scientifique américain en 1942. Il a fallu attendre 1974 pour que cette idée soit remise en question.

Cet article est paru dans le Télépro du 29/8/2024

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