Trotski, traqué à mort par Staline
En août 1940, après onze ans d’exil, cet acteur emblématique de la révolution russe est assassiné au Mexique. Ce samedi à 20h35 sur La Trois, «Retour aux sources» revient sur cette page controversée de l’histoire de l’Union soviétique.
Plus de huit décennies après sa mort, la figure de Léon Trotski (ou Trotsky) continue de diviser l’opinion. Son éviction du pouvoir, son opposition à Staline et son assassinat ont fait entrer le révolutionnaire russe dans la légende, malgré les zones d’ombres émaillant son parcours.
Dans «Retour aux sources», samedi soir sur La Trois, Élodie de Sélys propose le documentaire «Léon Trotski, l’homme à abattre» – qui éclipse les sombres facettes du personnage – et un débat utile pour remettre les faits dans leur contexte.
Héros d’Octobre 1917
Né en novembre 1879 dans le sud de l’Ukraine, alors dans l’Empire russe, Lev (Léon en russe) Davidovitch Bronstein est issu d’une famille juive de propriétaires terriens. Durant ses études à Odessa, il milite dans les rangs révolutionnaires et se voit déporté en Sibérie. Réfugié à Londres, il prend le patronyme de Trotski, nom d’un de ses anciens geôliers.
C’est dans la capitale britannique qu’il rencontre un certain Vladimir Ilitch Oulianov, plus connu sous le nom de… Lénine. Les deux marxistes rejoignent les rangs bolcheviks et sont les grands artisans de la révolution d’Octobre 1917. Aux côtés de Lénine qui prend le pouvoir, Trotski accède aux plus hautes fonctions de l’État : il devient commissaire à la guerre et crée la fameuse Armée rouge.
S’il use de ses talents d’orateur et d’écrivain pour faire grossir les rangs des partisans de sa «révolution permanente», il n’hésite pas non plus à institutionnaliser la terreur et réprimer violemment ses opposants.
Après la mort de Lénine en 1924, Trotski et Staline s’opposent sur leurs idées. Le premier prône une révolution mondiale du prolétariat, tandis que le second veut s’en tenir à la seule Union soviétique. Trotski est évincé du pouvoir par le «Petit Père des peuples» qui, en 1929, expulse ce rival trop encombrant et le déchoit de sa nationalité. C’est le début d’un long exil qui emmène Trotski en Turquie, en France et en Norvège.
Exil au Mexique
En 1937, ce célèbre apatride, dont les quatre enfants sont morts, et son épouse Natalia obtiennent l’asile politique au Mexique. Le peintre Diego Rivera, fervent communiste, et son épouse Frida Kahlo – avec qui Trotski aura une brève liaison – les accueillent un temps dans leur «Maison bleue» de Mexico.
De l’autre côté de l’Atlantique, Trotski continue de défendre ses idées. Même à des milliers de kilomètres, il se montre dangereux pour Staline, dont il dénonce la dérive autoritaire. Trois ans plus tard, lorsque la guerre éclate en Europe, Staline veut en finir avec son principal opposant et donne l’ordre à Pavel Soudoplatov, chef de l’administration des missions spéciales, de lancer l’«Opération canard».
Ramón Mercader, communiste espagnol devenu agent des services secrets soviétiques, est chargé de l’éliminer. Après une première attaque ratée au mois de mai, l’homme infiltré dans l’entourage de Trotski sous l’identité de Jacques Mornard, ressortissant belge, réussit à s’introduire dans sa maison de Coyoacán le 20 août 1940 sous prétexte de lui faire relire un article. Une fois dans son bureau, l’agent du NKVD (ancêtre du KGB) lui enfonce un piolet dans le crâne. Le révolutionnaire de 60 ans succombe à ses blessures le lendemain.
«Je suis déjà familier avec la mort», avait-il confié, quelques mois plus tôt, à un quotidien mexicain. «J’ai été poursuivi par la haine noire de Staline à travers la moitié du monde.»
Cet article est paru dans le Télépro du 6/10/2022
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