
Santé : le pouvoir de l’art
Ce mercredi à 23h20 sur La Une, « Matière grise » s’interroge sur le pouvoir potentiel des arts sur notre corps, notre esprit et notre santé.
Que l’on soit néophyte ou esthète, quiconque a déjà été saisi par la beauté d’une œuvre musicale, littéraire ou picturale connaît le sentiment supérieur que l’art peut générer en soi. Mais, au-delà de l’émotion que l’on peut ressentir au contact d’un objet artistique, quel impact concret peut-il avoir sur le cerveau et le corps ?
L’art au scanner
Preuve que l’intérêt pour l’art, dans ce qu’il peut avoir de thérapeutique, a éveillé la curiosité du monde scientifique ces dernières années : l’Organisation mondiale de la santé a publié plusieurs rapports à ce sujet. En 2019, après avoir compilé près de 900 articles scientifiques, l’OMS a réparti l’art en cinq catégories : visuelle, scénique, numérique, culturelle et littéraire. Selon l’organisation, chacune d’elles a un effet bénéfique sur notre santé. Mais de quelle manière exactement ?
« Une œuvre d’art s’adresse aux deux facultés de notre cerveau : nous permettre de rester en vie et nous donner l’envie de vivre », explique Pierre Lemarquis, neurologue et auteur de « L’Art qui guérit », dans Le Monde. « Elle le sculpte en lui faisant découvrir ce qu’il ne connaît pas. Elle le caresse en lui procurant plaisir et récompense. »
Quand la musique est bonne !
La musique a probablement été la première forme d’art à intéresser le monde médical. L’OMS préconise d’en diffuser avant d’entamer une opération chirurgicale, pour apaiser les malades. On sait que l’écoute de mélodies appréciées par des patients en chimiothérapie leur permet de voir les effets secondaires, douleur, fatigue, perte d’appétit, atténués. Et, plus récemment, des médecins ont constaté que la musicothérapie produisait des effets étonnants chez les malades souffrant d’Alzheimer.
« Au Canada, où l’on recense 400.000 malades (150.000 environ en Belgique), il semble que grâce à la musique, certains patients traités à un stade avancé de la maladie reviennent à la vie, du moins en partie : ils se remettent à parler, à bouger, à s’éveiller », relate la RTBF. Si la musique n’a pas concrètement le pouvoir de guérir totalement, elle peut diminuer, partiellement, la gravité de certains symptômes. « Après plusieurs semaines, on observe une amélioration de la mobilité du corps, de l’expression des sentiments et même du retour de la parole et de certains souvenirs. »
Complément artistique
Au-delà de la musique, l’art en général activerait des réactions chimiques dans notre cerveau. De la dopamine, qui donne un élan vital et qui est impliquée dans la motricité; la sérotonine, prescrite sous forme d’antidépresseur; de la morphine endogène, capable de calmer douleur et anxiété, ou de l’ocytocine, aussi appelée hormone de l’amour. « Curieusement, les œuvres d’art, qui ne sont pourtant pas des entités biologiques, sont perçues par notre cerveau comme des personnes vivantes. Ce faisant, notre cerveau active les « neurones miroirs » liés aux circuits de l’empathie, ce qui a le pouvoir de nous réconforter », ajoute Pierre Lemarquis sur France Culture.
Mais peut-on, dès lors, troquer un médicament contre un bon disque lorsqu’il s’agit de guérir ? Pas tout à fait, répond l’OMS, l’art doit plutôt être vu comme une addition positive à un traitement. « De plus en plus de preuves démontrent que les activités artistiques peuvent être utilisées comme un complément efficace au traitement médical et aux soins. Elles ne sont pas invasives et présentent peu de risques. »
Prescription : un tour au musée
Cependant, pour réunir art et médecine, encore faut-il que les spécialistes fassent preuve d’un esprit ouvert à ce sujet. « Heureusement, nous constatons un changement d’attitude dans le monde médical », explique Nils Fietje, responsable technique au sein de l’Unité des connaissances comportementales et culturelles de l’OMS/Europe. « Il y a quelques années, le débat portait essentiellement sur la nécessité de disposer de plus d’éléments de preuve. Aujourd’hui, on reconnaît que les arts améliorent réellement la santé et le bien-être. »
Une évolution qui est en marche. À Montréal, par exemple, depuis 2018 déjà, les médecins peuvent délivrer des « prescriptions muséales », une ordonnance pour aller visiter un musée avec un proche ou un aide-soignant, pour différents types de maladies comme la dépression, le diabète et même pour des patients en soins palliatifs.
Longue vie aux artistes
Et qu’en est-il lorsque nous devenons nous-même des artistes ? L’un des derniers exemples du pouvoir de l’art, lorsque les patients le pratiquent, est le collectif « Care to Dance », venu se frotter à la scène de « The Dancer », la compétition de danse diffusée sur La Une.
Particularité de cette troupe ? « Ce collectif est composé de personnes atteintes de la maladie de Parkinson », indique La Une. Derrière le projet, un neurologue, Olivier Bouquiaux, qui voit dans la danse une façon pour les personnes souffrant de cette affection ou de sclérose en plaque la possibilité de recevoir un peu de confort. « La danse, associée à la musique, aide les patients à retrouver des enchaînements de mouvements plus fluides. Elle agit comme une prévention, retardant la progression des symptômes. »
Cet article est paru dans le Télépro du 27/2/2025
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