Ragnar, un Viking à Paris…
Qui est Ragnar Lodbrok, ce roi Viking qui, profitant des dissensions entre les fils de l’empereur Louis le Pieux, envahit l’Europe au IXe siècle ? Ce lundi à 21h10 sur France 3, Stéphane Bern lui consacre un «Secrets d’Histoire».
On les voit glisser silencieusement sur les fleuves ou les mers, protégés par leurs fameux drakkars à la proue effrayante. En ce IXe siècle, il ne fait pas bon vivre au bord de l’eau, que l’on soit villageois ou moine, car les hommes venus du Nord, une fois le pied à terre, tuent, pillent, violent sans état d’âme, certains que leur cruauté vaincra toute velléité de résistance. La population est terrorisée et Paris, en bord de Seine, attend son châtiment. Il serait venu du fil de l’épée de Ragnar Lodbrok et de ses redoutables guerriers.
«Braies velues»
Mais ce roi que l’on dit si féroce a-t-il existé ? Il ressuscite en tout cas dans une saga islandaise datant du XIII e siècle. Son nom de famille signifie «braies velues», comme celles qu’il aurait portées, trempées dans la poix, pour vaincre deux énormes serpents, comme on n’en rencontre pas dans les contrées du Nord.
Il aurait vécu au IXe siècle, mais rien n’est moins sûr, car les dates de sa naissance et de sa mort sont inconnues. Alors, ne serait-il pas la réincarnation de plusieurs personnages nés de la conscience collective et de leurs différents actes de bravoure ?
On a retrouvé la trace d’un guerrier nommé Reginherus qui a bel et bien dévasté Paris, si l’on en croit une source historique considérée comme relativement fiable, «Les Annales de Saint-Bertin». Cet événement pourrait être mis en relation avec la fameuse Geste danoise qui évoque les faits de guerre de plusieurs chefs vikings associés sous le seul nom de Ragnar ! On dit aussi qu’il serait à l’origine de la grande armée viking qui va sévir dans toute l’Europe. Mais à nouveau, rien n’est moins sûr…
Tous cruels ?
Une certitude toutefois est la tactique utilisée par ces habiles navigateurs venus du Nord. Ils avaient consigné soigneusement les nombreuses fêtes chrétiennes célébrées par les religieux et les villageois. Tandis que ces derniers étaient pris par leurs dévotions, ils attaquaient sans rencontrer, de fait, la moindre résistance…
La tradition populaire, les écrits des moines et l’exagération de certaines évocations picturales ont accentué la détestable réputation des Vikings. Il convient de relativiser. La désagrégation de l’empire de Charlemagne a conduit à un effritement du pouvoir dans un royaume qui a sombré dans l’anarchie.
Les Vikings n’ont donc rencontré que peu d’obstacles et d’armées face à eux alors qu’ils n’étaient que quelques centaines à s’enfoncer dans les terres, notamment de France. La plupart d’entre eux, restés en Scandinavie, sont de paisibles paysans ou de laborieux forgerons qui ne demandent qu’à vivre en paix loin des tumultes de l’invasion.
Le pays des hommes du Nord
Quoi qu’il en soit, une partie de ces Vikings demeurera en France et le roi franc Charles le Simple, au terme d’un traité de paix (911), leur accordera la Normandie, soit le pays des Normands qui, à leur tour, contiendront d’autres incursions. C’est d’ailleurs l’un de leurs chefs, Guillaume le Conquérant, qui partira, en 1066, du port de Dives (près de Cabourg) pour prendre possession de l’Angleterre après avoir remporté la bataille de Hastings.
Et de nos jours encore, plusieurs noms de famille normands rappellent leurs origines vikings. Godefroy, par exemple, très répandu, signifie ami de Dieu. Enfin, les traits particulièrement négatifs attribués aux Vikings se retrouvent dans des séries (comme «Vikings») ou des jeux vidéo qui ne reflètent pas toujours la vérité historique, fort heureusement rétablie, certes avec beaucoup de difficultés, par des historiens chevronnés.
Cet article est paru dans le Télépro du 27/10/2022
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