Philae, c’est par Isis
L’un des plus beaux temples égyptiens bénéficia d’une opération de sauvetage titanesque ! Ce jeudi à 21h, France 5 nous le fait découvrir avec le documentaire «Philae, un temple sur le Nil».
Le site fut à deux doigts de disparaître sous les eaux du Nil surélevées grâce au barrage d’Assouan, le deuxième du nom, «cadeau» de l’Union soviétique à l’Égypte de Nasser. Derrière cette gigantesque réalisation, un grand lac peuplé de crocodiles dont l’accès plus en aval leur est désormais interdit.
Le site de Philae, comme le temple d’Abou Simbel, a été déplacé pour échapper à l’engloutissement. Travail titanesque qui a permis de sauver avec l’aide de l’Unesco, un des joyaux de l’Égypte ancienne. L’opération va durer huit années, de 1972 à 1980. On construisit d’abord un batardeau d’une longueur de 850 mètres, c’est-à-dire un barrage provisoire tout autour pour empêcher de nouvelles inondations.
Ensuite, les entrepreneurs remodelèrent l’îlot d’Aegilka afin de lui donner la morphologie de Philae. Enfin, tel un grand puzzle, les temples furent démontés et les pierres numérotées une à une pour être transportées et remontées sur leur nouvelle terre d’accueil.
Le temple d’Isis
Les plus anciens voyageurs se souviennent avoir visité le site en barque, au milieu des vestiges à moitié enfouis dans l’eau, après la construction du premier barrage à la fin du XIXe siècle. Aujourd’hui la découverte se fait à pieds secs et l’embarcation ne sert plus qu’à amener le touriste sur l’île d’Aegilka, 300 mètres en aval de l’implantation originale.
Le bâtiment central de Philae est le temple d’Isis. Ses origines remontent au IVe siècle avant Jésus-Christ, du temps de Nectanébo Ier , pour s’achever sous les Ptolémées et à la période romaine. C’est alors que l’île est débarrassée de toutes ses maisons, permettant l’érection des deux grands portiques, dont un inachevé, qu’on peut encore admirer aujourd’hui.
On est donc bien loin du temps où les Égyptiens érigeaient les grandes pyramides de Kheops, Khephren et Mykérinos dans l’actuelle banlieue du Caire et qui remontent à 2.500 ans avant notre ère. Isis est considérée comme une reine purement mythique et, surtout, comme une déesse funéraire. Protectrice de son enfant qu’elle couvre d’affection, ses représentations sont nombreuses.
Son culte prend naissance aux alentours du XXIVe siècle avant notre ère pour s’achever trente siècles plus tard avec le christianisme et un édit de l’empereur byzantin Justinien qui en interdit définitivement la dévotion. Mais son souvenir demeure encore bien vivace tout au long de l’histoire de l’humanité, comme l’atteste sa présence dans de nombreux écrits d’érudits.
C’est un beau roman
Le temple d’Isis est un roman à livre ouvert, à moins qu’il ne soit une véritable bande dessinée nous contant sur ses colonnes parfois colorées les amours d’Osiris et d’Isis. Rappelons ici toute l’importance de la découverte de la Pierre de la Rosette qui permit à Champollion de déchiffrer les hiéroglyphes. Ce qui fit progresser, à la suite de Napoléon, l’égyptologie à pas de géant.
C’est bien ici que la religion des anciens Égyptiens peut s’exprimer le plus longtemps, jusqu’à l’interdiction de sa pratique par Justinien et la fin de l’évangélisation de la Nubie. Après l’effondrement de l’Égypte, ce pays avait perpétué les traditions remontant au temps des pharaons. À l’époque de Maximin (début du IVe siècle), gouverneur de la Thébaïde, on autorisait les Nubiens bien turbulents à venir enlever un certain nombre de statues pour les emporter chez eux le temps d’en obtenir des oracles, puis de les ramener intactes.
Mais avec le christianisme, le temple principal devient alors une église dédiée à Saint-Étienne et les chrétiens s’en prennent aux représentations des anciens dieux, dégradations encore visibles de nos jours. Plus tard, le site accueillera enfin deux églises coptes.
Cet article est paru dans le Télépro du 19/5/2022
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