Paul-Henri Spaak, visionnaire européen
Considéré comme l’un des Pères de l’Europe, le Belge a occupé, durant une trentaine d’années, le devant de la scène politique nationale et internationale.
On disait de Paul-Henri Spaak qu’il était insolent, versatile, indomptable, truculent, parfois colérique et toujours impatient. La presse comparait volontiers ce Belge à la gouaille toute bruxelloise à Winston Churchill qu’il admirait tant.
Vendredi (22.40, La Une), «Le Temps d’une histoire» retrace l’impressionnant parcours de cette figure majeure du XXe siècle. Issu d’une famille bourgeoise, laïque et francophone, Paul-Henri Spaak naît en 1899 à Schaerbeek. Du côté maternel, la politique est une affaire de famille.
Son grand-père, Paul Janson, est l’un des pères du suffrage universel belge. Son oncle, Paul-Emile Janson, sera Premier ministre. Et sa mère, Marie Janson, la première femme belge à devenir sénatrice.
Acteur de la «Question royale»
Après avoir été prisonnier des Allemands lors de la Première Guerre mondiale – «une expérience qui m’a frotté avec la vie assez brusquement», confiera-t-il plus tard -, le jeune Paul-Henri suit des études de droit et devient avocat. Avide de changer le monde, il embrasse très vite la carrière politique.
Au sein du parti socialiste, il connaît une ascension fulgurante et entre au gouvernement en 1936, alors que l’ombre d’un nouveau conflit plane sur l’Europe. Plusieurs fois Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, il est membre du gouvernement en exil à Londres durant la Seconde Guerre mondiale et est l’un des grands artisans du Benelux, union douanière entre la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg.
Il joue un rôle de premier plan dans la «Question royale» qui divise le pays en 1950 et dans l’opération «Dragon rouge» (1964) chargée de libérer des centaines d’otages dans l’ex-Congo belge.
«A big man for a big job»
Mais la carrière de Spaak dépasse très vite les frontières. Dès la fin de la guerre, il se fait un nom sur la scène politique internationale. Le conflit mondial a renforcé les convictions du socialiste, persuadé du bien-fondé de la collaboration entre États. Spaak participe à la conférence de San Francisco donnant naissance à l’Onu.
Poussé par les Américains, il devient même, en 1946, le premier Président de l’Assemblée des Nations unies. Alors que débute la guerre froide, Spaak prononce son fameux «Discours de la peur» et participe à la création de l’Otan, dont il sera le deuxième Secrétaire général (1957-1961). «A big man for a big job», titre alors un journal américain.
Mr. Europe
Le Belge, vu comme un visionnaire, est aussi reconnu comme l’un des «Pères de l’Europe». Et pour cause, Spaak joue un rôle majeur dans la construction européenne. Face à la peur du communisme, l’idée européenne fait son chemin. Spaak dira plus tard, avec ironie, que «le vrai père de l’Europe, c’est Staline» !
Toujours est-il que le Bruxellois travaille d’arrache-pied à l’intégration européenne. Lors de la conférence de Messine en 1955, les six gouvernements (Benelux, France, Allemagne, Italie) le nomment président du groupe de travail chargé de préparer la Communauté économique européenne. Son rapport donne lieu au traité de Rome, qu’il signe pour la Belgique en 1957. La presse internationale le surnomme alors «Mr. Europe» !
Après une courte retraite, cet homme épris de liberté tire sa révérence en juillet 1972. Il laisse trois enfants, dont Antoinette Spaak qui, elle aussi, marquera de son empreinte la scène politique belge.
Cet article est paru dans le Télépro du 1/12/2022
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