Pas bêtes comme choux, les végétaux !
Plantes, arbres, légumes : ils n’ont pas qu’un petit pois dans la tête. Ce mercredi à 17h45 sur Arte, le magazine «Xenius» s’intéresse à l’intelligence des plantes !
«Et le vainqueur est…». Un silence de mort s’empare du potager. À côté des poireaux, les fanes des carottes semblent comme figées. Quant au vieux chêne qui surplombe la scène, on le dirait tétanisé. «… Dionaea muscipula !»
Et zut ! C’est la même chanson à chaque élection. Le jury des botanistes a encore plébiscité la dionée attrape-mouche comme végétal le plus intelligent de l’année. Pourtant, le chiendent et le blé étaient des outsiders de qualité pour la plante carnivore. Mais voilà… elle leur a coupé l’herbe sous le pied.
Il faut dire que la compétition est de plus en plus rude. Fini l’époque où le monde végétal était considéré comme bien inférieur au règne animal. Certains n’hésitent pas à employer le terme «intelligence» pour en parler. Oui monsieur !
Vous avez dit intelligence ?
Encore faut-il s’accorder sur sa signification quand il est question du monde végétal. Pour le magazine de vulgarisation scientifique Sciencepost, «intelligent» évoque ici «les étonnantes capacités d’apprentissage, d’anticipation et d’adaptation des végétaux».
Le neurobiologiste végétal Stefano Mancuso (*) évoque, lui, «la capacité à résoudre des problèmes». «Comme les animaux, observe-t-il dans une interview au quotidien suisse Le Temps, les plantes doivent trouver des solutions pour se nourrir, affronter le froid, la chaleur, des prédateurs. Mais là où elles font plus fort, c’est qu’elles résolvent ces questions sans l’aide d’un mouvement». Conclusion : « Les plantes sont beaucoup plus intelligentes que les animaux».
Le magazine Ça m’intéresse ne le suit pas sur ce terrain. Il estime «fallacieux» d’utiliser la notion d’intelligence, car «les végétaux, qui ont été parmi les premières formes de vie apparues sur terre, n’en ont jamais eu besoin».
Intelligent ou pas, le monde végétal ? Jugez plutôt.
Les végétaux parlent aux végétaux
Le cas du mimosa pudica pour commencer. Ses feuilles se referment lorsqu’on les touche. Cinq cents pots sont embarqués pour un trajet sur une route pavée. Les feuilles alternent fermeture et ouverture à chaque secousse… jusqu’au moment où elles restent définitivement ouvertes malgré les chocs. «Parce qu’elles ne disposent plus d’ions de calcium en suffisance pour déclencher l’opération», disent les uns. «Parce qu’elles se sont rendu compte qu’il n’y avait pas d’agression», précisent d’autres. «La preuve ? Lorsqu’on répète l’opération quelques semaines plus tard, les feuilles ne se referment plus».
Autre observation étonnante. Une plante est entourée de sel ? Sa voisine sécrète elle aussi des défenses face à l’agresseur. Pour Stefano Mancuso, les plantes communiquent sur la qualité de l’air, du sol, une agression par des insectes… Et cette communication serait plus importante au sein d’un même groupe qu’entre différents groupes. Il existerait donc des sortes de dialecte chimique…
La belle plante et la fourmi junkie
Un acacia attaqué par des insectes lance l’alerte. Jusqu’à 6 mètres à la ronde, c’est le branle-bas de combat, la sécrétion d’éthylène et de tanin est décrétée. Choux, haricots ou maïs mobilisent eux-aussi leurs défenses à la moindre agression.
Le plus étonnant est sans aucun doute l’attitude de certaines plantes qui appellent à l’aide… les fourmis. En cas d’attaque, elles sécrètent un nectar qui les attirent. Mieux : elles les rendent accros à cette sécrétion. Selon le dosage de celle-ci, les fourmis vont monter la garde, patrouiller, agresser…
La dionée attrape-mouche du début ? Elle compte les contacts sur ses poils sensitifs. En fonction de leur nombre, elle reste ouverte, se referme, déclenche le processus pour dissoudre sa proie. Les végétaux ne sont peut-être pas si potiches que ça, en fait !
(*) Stefano Mancuso, Alessandra Viola, «L’Intelligence des plantes», 2018, Albin Michel (18 €)
Cet article est paru dans le Télépro du 6/5/2021
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici