Papy flingueurs : le crime n’a pas d’âge !

Marcel Habran lors de son procès en 2008 © Isopix

La délinquance n’est pas réservée aux jeunes. Quinquas et sexagénaires hors-la-loi, ça existe. Et même de plus en plus.

Nous sommes à la fin du XIXe siècle, dans le petit village d’Ash Grove, État du Missouri, États-Unis. Une fillette au regard sombre et profond voit se dérouler sous ses yeux une scène inhabituelle. Jesse James, un hors-la-loi bien connu, traverse les rues de la cité poursuivi par la police. L’enfant est fascinée par ce qu’elle voit. Ce qui l’attire au plus haut point, c’est la personnalité du jeune homme, un braqueur de banques et pilleur de trains, un aventurier étrangement adulé par les foules, une légende du Far West. Elle aussi, cette vie la tente. Mais c’est pour plus tard, beaucoup plus tard. Celle qu’on surnommera Ma Barker tombera sous les balles des policiers à 63 ans. Elle était depuis quatre ans à peine la tête pensante du gang emmené par un de ses fils.

Un vieil homme et son revolver

Cette senior braqueuse va marquer les esprits. Si vous avez la cinquantaine, vous vous souvenez sans doute du groupe disco Boney M. et vous avez peut-être dansé sur ce tube, «Ma Baker». Il ne racontait rien d’autre que les aventures criminelles de la sexagénaire rebaptisée «Baker» au passage pour une question de sonorité du nom…

Ce n’est pas tout. Si les célèbres frères Dalton ont bien existé et sont aujourd’hui immortalisés grâce au dessinateur Morris et à la BD Lucky Luke, le personnage de Ma Dalton n’a quant à lui rien d’historique : c’est à nouveau Ma Barker qui a inspiré le scénariste original, René Goscinny.

L’Américaine n’est pas la seule hors-la-loi d’un âge avancé à avoir inspiré des artistes. Dernièrement, dans le film «The Old Man & the Gun» (littéralement le vieil homme et le revolver), Robert Redford incarnait Forrest Tucker. L’histoire s’inspirait de la vie de ce gentleman de 78 ans dont le passe-temps principal était de braquer des banques, toujours avec distinction et politesse.

Pas «rangés des camions»

Les délinquants âgés n’appartiennent toutefois pas au passé et n’existent pas seulement dans les romans ou au cinéma. François Cavanna se trompait : la délinquance n’est pas toujours aussi juvénile que l’acné.

En France, plus de 17.000 têtes grises ont eu affaire à la police en 2018. Un papy qui détroussait depuis des années les voitures des touristes en Provence, une retraitée de 65 ans qui dealait du cannabis…

Dans une enquête surprenante, Le Figaro dévoilait l’été dernier quelques chiffres sur ce phénomène interpellant. L’un d’entre eux retient l’attention : les délinquants âgés représentent 3,5 % des mis en cause par la police et la gendarmerie de l’Hexagone. Un rapport officiel du Centre d’analyse stratégique, placé directement sous l’autorité du Premier ministre français, concluait quelques années plus tôt «à une augmentation «mécanique» liée au vieillissement de la population».

Au Japon, la délinquance des plus de 65 ans se solde par plus de 50.000 arrestations par an. Les pénitenciers du pays s’équipent de rampes pour les fauteuils roulants, de poignées dans les salles de bains et recrutent des infirmières pour aider les vieux prisonniers à prendre leurs repas…

Bad (old) boys

Chez nous, le cas de Marcel Habran a fait beaucoup de bruit. Ce (très) mauvais garçon de 86 ans est sorti de prison en 2016. Il avait notamment été condamné pour l’attaque meurtrière d’un transport de fonds commis alors qu’il avait 62 ans. Mais ce côté «bad boy» est loin de constituer le profil type des délinquants âgés. La plupart du temps, ce sont des raisons économiques qui les font basculer du côté sombre de la Force, via principalement des vols à l’étalage et de petites exactions.

Au Japon, le phénomène se matérialise de manière encore plus surprenante. Dans un reportage pour France Télévisions, Arnaud Miguet constatait que plus d’un quart des prisonniers de la prison de Fuchu à Tokyo ont plus de 65 ans. Ces retraités se font incarcérer pour des petits vols afin de pouvoir manger ou se soigner. Petit à petit, la prison se transforme en maison de retraite.

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