Onoda, le soldat qui ne désarmait pas
Sur Arte ce mercredi à 20h55, un long métrage sur l’histoire vraie d’un soldat japonais ayant refusé de croire en la défaite de son pays, à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
En 2021, le film d’Arthur Harari, «Onoda, 10.000 nuits dans la jungle», fait l’ouverture de la section «Un certain regard» au Festival de Cannes. L’histoire débute en décembre 1944, époque durant laquelle le jeune lieutenant Hirô Onoda est affecté sur l’île de Lubang, aux Philippines, afin de ralentir la progression de Américains.
Destin de soldat
Hirô Onoda naît le 19 mars 1922. À 20 ans, son destin bascule, comme celui de milliers d’autres Japonais, lorsque l’armée impériale réquisitionne tous les sujets en âge de combattre. Après avoir effectué son service militaire, Onoda rejoint la 33 e compagnie qui forme les officiers aux techniques de guérilla. En décembre 1944, Hirô, âgé de 23 ans, et une vingtaine de ses frères d’armes sont envoyés sur l’île de Lubang, territoire tenu par les Américains, dans les Philippines. Débarqués sur ce bout de terre à peine plus grand que la ville de Paris, les hommes reçoivent trois ordres : ralentir l’arrivée de l’ennemi sur l’île, ne pas se faire capturer, ne pas se suicider, et ce, tant que l’armée ne vient pas les chercher.
Fake news ?
Le 5 août 1945, deux événements vont provoquer la stupeur dans le peuple japonais : ils entendent pour la première fois, à la radio, la voix de leur Empereur, et c’est pour annoncer la reddition du Japon. Cela faisait vingt-six siècles que le pays du Soleil-Levant n’avait pas baissé les armes devant l’ennemi. Mais, à Lubang, la réalité est bien différente. Quelques mois plus tôt, les alliés sont arrivés sur l’île. Pour faire face, les soldats nippons, que l’on qualifiera plus tard de «soldats restants» ou de «traînards» (à l’instar de tous ceux disséminés sur des îles du Pacifique), ont décidé de se séparer en petits groupes de quatre maximum. À Lubang, si la plupart d’entre eux sont rapidement capturés ou tués, Onoda et ses trois compères, Yuichi Akatsu, Shöichi Shimada et Kinshichi Kozuka, échappent aux rafles et se retranchent dans la jungle. Un jour de chapardage dans une ferme locale pour trouver de quoi se nourrir, les quatre soldats tombent sur un tract où est écrit noir sur blanc : «La guerre a pris fin le 15 août ! Vous pouvez sortir des montagnes !» Mais les hommes, qui ignorent tout des bombardements sur Hiroshima et Nagasaki, qui n’ont pas pu entendre l’allocution de l’Empereur, sont convaincus qu’il s’agit d’une ruse de l’ennemi. Ils décident alors de s’en tenir aux ordres et de résister jusqu’à l’arrivée des renforts.
Seul au monde
En 1950, Akatsu craque et se rend. Quatre ans plus tard, Kozuka est abattu par les soldats locaux. Alors que l’on continue de larguer par avion tracts et journaux sur l’île annonçant la fin de la guerre, mais aussi, des lettres de proches des soldats les implorant de sortir de la jungle, rien n’y fait. Transcendés, ils poursuivent leur combat contre l’invisible. En1959, Japonais et Philippins stoppent leurs tentatives pour récupérer les soldats et les déclarent morts. En 1972, Shimada péri réellement lord d’échanges de tirs avec des locaux. Hirô se retrouve seul dans la montagne…
Légendaire Onoda
Deux ans plus tard, un étudiant japonais ayant entendu parler de la légende d’Onoda décide de partir sur ses traces. Le jeune homme parvient à le retrouver, mais le lieutenant reclus n’en démord pas : il se rendra uniquement sur ordre du major Taniguchi qui l’a envoyé sur cette île trente ans plus tôt. «Ce dernier, qui est entre temps devenu libraire, accepte finalement et se déplace sur l’île de Lubang», relate le Huffington Post. «Le 10 mars 1974, Onoda rend les armes et fait face au président des Philippines en personne, Ferdinand Marcos, qui lui accorde la grâce afin de lui pardonner toutes les violations qu’il a commises sur l’île, en tuant des civils et en pillant des maisons.»
Pour aller plus loin
Décédé à Tokyo, le 17 janvier 2014, à l’âge de 91 ans, Hirô Onoda avait publié une autobiographie, peu de temps après sa reddition, «Ma guerre de trente ans sur l’île de Lubang».
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici