Odorat : voyage en anosmie

Arte nous embarque au cœur de l’empire des sens, destination l’odorat : une faculté dont des millions de personnes ont été subitement privées durant l’épidémie de covid-19. Ce samedi à 22h25, Arte diffuse «Odorat : à la recherche du sens perdu».

À l’instar d’une foule d’aptitudes dont nous bénéficions naturellement, nous ne sommes pas surpris de notre capacité à sentir les effluves, agréables ou non, qui nous entourent. Pourtant, lorsque nous en sommes soudainement dépourvus, une seule odeur nous échappe et tout semble dépeuplé : saveurs d’un plat, parfum réconfortant d’un proche et capacité à sentir un danger… Focus sur un sens essentiel.

On ne peut plusse sentir !

Jusqu’alors pathologie plutôt méconnue, l’anosmie, trouble qui se traduit par une perte totale de l’odorat (on parle d’hyposmie lorsque la perte est partielle), temporaire ou permanente, a acquis une notoriété certaine durant la pandémie. Combien d’entre nous se sont mis à flairer frénétiquement toutes sortes d’odeurs afin d’estimer la probabilité d’avoir contracté le virus ? Pour ceux qui constataient être atteints de cet étrange symptôme, la surprise était presque aussi forte que s’ils étaient privés de la vue ou de l’ouïe : « Je ne sens plus ! »

Et si l’effroi était tel, c’est bien parce qu’on a tendance à sous-estimer l’importance de l’odorat dans notre existence et les conséquences de sa perte. « Être privé d’odorat, ce n’est pas simplement avoir droit à des repas fades, c’est aussi l’impossibilité de sentir l’odeur de nos proches et de la nature environnante, qui peut aller jusqu’à nous isoler et mener à une dépression profonde », indique Le Devoir. Une vie sans odeur peut aussi être vecteur de phobies, notamment une peur exacerbée de sentir mauvais et, plus grave, de ne pas percevoir des risques comme le début d’un incendie ou une fuite de gaz.

Un cap, un pic, une péninsule efficace après tout…

Si nous sous-estimons parfois l’importance de l’odorat dans notre quotidien, il en va de même lorsque nous jugeons son efficience. Longtemps, nous avons pensé compter parmi les espèces possédant le sens de l’odorat le plus faible, pourtant, nous n’avons, en réalité, pas grand-chose à envier aux animaux réputéspour leur flair. « Le bulbe olfactif humain, qui transmet des signaux à d’autres zones du cerveau pour aider à identifier les odeurs, est plutôt développé et contient un nombre similaire de neurones que chez les autres mammifères », explique John McGann, professeur de psychologie et auteur d’une étude parue dans la revue américaine Science. « Selon les chercheurs, les humains pourraient distinguer des milliards d’odeurs différentes », poursuit-on dans le Parisien, « soit largement plus que les quelque 10.000 mentionnées dans les manuels de psychologie. »

…et rapide !

En octobre dernier, des spécialistes issus de l’Institut de psychologie de l’Académie chinoise des sciences ont, quant à eux, découvert que notre odorat était bien plus rapide qu’on ne l’imagine. Là encore, une croyance commune nous poussait à partir du principe que notre vue et notre ouïe fonctionnaient avec bien plus de vitesse que l’odorat, à tort. « Nous avons été étonnés d’observer que les participants pouvaient distinguer deux odeurs, présentées dans un ordre et vice-versa, lorsque la latence entre les deux était courte de 60 millisecondes, jusque-là on pensait qu’il nous fallait 1.200 millisecondes », explique l’équipe de chercheurs au magazine SciencePost. « À titre de comparaison, la durée d’un clignement d’œil est d’environ 180 millisecondes. »

Cet article est paru dans le Télépro du 6/2/2025