Mondrian : influenceur avant l’heure
Figure du mouvement «Stijl» (style), aussi appelé néoplasticisme, le peintre néerlandais a jonglé avec des carrés de couleur. Cette originalité influence encore les créateurs, septante ans après sa mort. Ce dimanche à 17h50, Arte diffuse «Radical et révolutionnaire : l’art de Piet Mondrian».
Lorsque Piet Mondrian, né aux Pays-Bas en 1872 (et mort en 1944), explora différents types de peintures puis trouva son propre style, il était loin de se douter que celui-ci perdurerait dans la mode, l’architecture et même la pop culture modernes.
Suivez les lignes
Au début des années 1990, filles et garçons utilisent une nouvelle gamme de soins capillaires de l’Oréal Paris, «Studio Line», sans toujours savoir que le packaging s’inspire d’un des plus grands artistes du XXe siècle. Les motifs semblent simples : des couleurs primaires (rouge, vert, bleu, et soustraits au blanc, cyan, magenta, jaune) et des lignes noires. Cela décore parfaitement les salles de bain. Mais aussi les plus grands musées du monde.
Le père de ces tableaux emblématiques a étudié aux Beaux-Arts d’Amsterdam. Ses premières créations, réalistes, représentent la campagne et surtout les arbres, ses motifs favoris. Au fil du temps, ils évoluent. Les branches et le tronc de «L’Arbre horizontal» et de «L’Arbre gris», sont tracés en lignes verticales et horizontales. Parti à Paris, nid des nouveaux artistes, dans les années 1920 et 1930, Piet Mondrian se nourrit du cubisme. Et, revenu en son pays, se dit persuadé que «la couleur de la nature ne peut pas être représentée sur toile».
Bon vivant perfectionniste
Avec l’architecte Theo van Doesburg, il travaille sur la réduction du langage graphique. Et peint des surfaces carrées ou rectangulaires multicolores. Le voilà ensuite exilé à New York, en 1940, où les buildings inspirent les quadrillages de ses peintures. Son style s’affirme. C’est sans compter son perfectionnisme et son intuition. «Mondrian a compris que le public et l’establishment artistique ne seraient pas immédiatement prêts pour l’abstraction totale et l’a introduite très progressivement», dit la spécialiste Alexxa Gotthardt.
Aimant le jazz et les femmes, Piet sort, prend son temps mais ne mélange jamais fête et travail, allant jusqu’à brûler les lettres d’amour envoyées à son atelier. Retouchant sans cesse ses toiles, il ne s’approche de la satisfaction qu’à la fin de son existence, en cherchant «une expression du rythme de l’Amérique, différent de l’Europe, avec des opposés : chaos et ordre, petit et grand, statique et dynamique, vif et exalté.»
Il peint ses deux plus grandes œuvres : le «Broadway Boogie Woogie», en hommage à la danse de l’époque, puis le «Victory Boogie Woogie». Ce tableau en forme de losange devient une icône de l’art moderne et de la liberté de l’art abstrait. Ce dernier reste inachevé, à sa mort, avec des restes de ruban adhésif.
Précieux collectors
Mais Mondrian continue d’exister. Ses compositions fascinent Yves Saint Laurent qui crée des robes cultissimes. Les architectes Charles et Ray Eames dessinent la Case Study House No. 8 à la façade et à l’intérieur épurés, Coldplay reprend la géométrie colorée sur l’album «X&Y», Nike lance les Dunk SB Lows Piet Mondrian en 2008 et Prada, une collection-hommage en 2011. Tous ont respecté son objectif : «Ne pas créer de chefs-d’œuvre mais découvrir des choses nouvelles.»
Cet article est paru dans le Télépro du 18/1/2024
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