Mésopotamie : là où tout a commencé…

La Ziggurat d'Ur © Getty
Stéphanie Breuer Journaliste

Parfois éclipsée par la longévité de l’Égypte des pharaons, la culture de la Grèce antique ou la grandeur de l’Empire romain, la Mésopotamie est pourtant le berceau de l’humanité.

«L’histoire commence à Sumer», selon le titre du best-seller de l’historien Samuel Noah Kramer, paru en 1956. En plus d’être à l’origine de la roue et du premier code de lois, la Mésopotamie (l’actuel Irak, une partie de la Syrie et du Koweït) a aussi vu naître l’écriture, l’agriculture, l’architecture, le commerce, l’administration… Bref, elle est le berceau de l’humanité et de nos sociétés occidentales.

Dans «Mésopotamie, une civilisation oubliée» (samedi à 20.50), Arte revient sur les dernières découvertes archéologiques faites dans le Kurdistan irakien, encore peu fouillé.

Entre les fleuves

Au Moyen-Orient, entre des déserts arides et des chaînes de montagnes, deux grands fleuves – le Tigre et l’Euphrate – entourent une vaste plaine fertile, appelée Mésopotamie, du grec «meso» (entre) et «potamos» (fleuve). C’est là, où les seuls matériaux disponibles sont l’argile, les roseaux et le bitume, que vont jaillir les premières civilisations de l’humanité. La présence des Sumériens – plus tard supplantés par les Akkadiens – y est attestée dès la fin du IVe millénaire avant notre ère. Grâce à l’irrigation, les populations locales vont y développer l’agriculture et l’élevage.

Ensuite, se développent les premières cités-États, bâties en argile et protégées par des remparts. La plus ancienne d’entre-elles est Uruk (au sud de l’Irak), célèbre pour avoir été la ville du mythique roi Gilgamesh, héros de l’une des plus anciennes œuvres littéraires. Dans chaque ville, le Roi fait ériger une ziggurat. Construction typique de l’architecture religieuse mésopotamienne, celle-ci était un énorme édifice de briques, superposant des terrasses reliées par des escaliers ou des allées en pente douce. Son sommet, qui était soustrait aux regards, abritait probablement un temple dédié aux dieux.

La plus célèbre des ziggurats, s’élevant parfois jusqu’à 100 mètres de hauteur, était celle de Babylone, qui inspira le mythe de la tour de Babel. C’est dans cette ville des mythiques jardins suspendus que le grand conquérant macédonien, Alexandre le Grand, meurt en 323 avant notre ère, après avoir conquis la Mésopotamie, là où tout a commencé…

Et l’écriture fût…

L’héritage le plus important de la Mésopotamie est sans aucun doute l’écriture. Sous l’impulsion de la civilisation sumérienne, l’écriture cunéiforme («en forme de clou») est née entre 3.500 et 3.000 ans avant notre ère. Elle est pratiquée à l’aide d’un roseau taillé en pointe sur des tablettes d’argile. Ce système est d’abord composé d’environ 600 pictogrammes, avant d’évoluer vers une écriture syllabique. Si, au départ, il se développe pour répondre aux besoins comptables des agriculteurs sumériens (gérer les surplus de récoltes et l’état des troupeaux), il devient petit à petit une écriture à part entière. C’est au XIXe siècle que l’écriture cunéiforme a pu être déchiffrée grâce au rocher de Behistun, équivalent mésopotamien de la pierre de Rosette pour les hiéroglyphes égyptiens. Sur ce monument sculpté dans la falaise, une inscription comprend trois versions d’un texte écrit par Darius le Grand (roi perse mort au Ve siècle avant notre ère) : une en vieux persan, une en élamite et une en babylonien.

Dura lex, sed lex

Plusieurs monarques ont laissé une empreinte importante dans l’histoire de la Mésopotamie en unifiant plusieurs cités, tels que le roi d’Umma Lugal-zagesi ou Sargon d’Akkad au IIIe millénaire. Mais les plus célèbres sont Hammurabi (de -1792 à -1750) et Nabuchodonosor II (de -605 à -562) qui ont fait de Babylone une ville de premier plan. On doit d’ailleurs à Hammurabi le code juridique le plus complet de toute l’Antiquité. Composé de 282 articles (dont le plus célèbre est la loi du talion : «Œil pour œil, dent pour dent»), ce dernier, gravé sur une monumentale roche de basalte, était appliqué dans toutes les grandes cités de l’empire.

La mesure du temps

Si, dans notre mesure du temps, un jour compte 24 heures, une heure soixante minutes et une minute soixante secondes, c’est grâce aux Mésopotamiens. Ceux-ci utilisaient un système sexagésimal (basé sur 60) et comptaient en douzaines et non en dizaines. Si nous comptons jusqu’à dix avec nos deux mains, les Mésopotamiens comptaient jusqu’à douze (diviseur de 60) avec une main et jusqu’à soixante avec les deux ! Leur méthode ? Avec le pouce d’une main, ils comptaient les phalanges des quatre autres doigts (3 phalanges x 4 doigts = 12). Avec l’autre main, ils comptaient combien de fois ils avaient déjà atteint douze (les 12 phalanges d’une main x les 5 doigts de l’autre = 60). De ce système antique, nous avons aussi gardé la division d’un cercle en 360° et des traces telles que douze œufs, une douzaine d’huîtres…

Cet article est paru dans le magazine Télépro du 1/10/2020

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