Les secrets du cerveau d’un chef d’orchestre

Pour mener l’orchestre à la baguette, le chef doit développer plusieurs types de mémoire © France 5

D’un coup de baguette magique, ils déclenchent une symphonie. Pour ce faire, ils se doivent de posséder d’extraordinaires capacités.

Samedi à 22h25 sur France 5, Michel Cymes nous présente Alain Altinoglu, chef français et directeur musical du Théâtre royal de La Monnaie de Bruxelles. Ensemble, ils sondent les profondeurs du cerveau des maestros, dans le documentaire «Chef d’orchestre, symphonie pour un cerveau».

Une profession récente

Chef d’orchestre est un des métiers les plus récents chez les musiciens classiques. À l’origine, le premier violon ou le claveciniste devait aussi diriger l’orchestre. Mais celui-ci prenant de plus en plus d’ampleur, il est devenu évident que la tâche devait revenir à une personne extérieure. Si beaucoup de compositeurs dirigeaient eux-mêmes leurs œuvres, le premier chef aurait été l’Allemand Louis Spohr, nommé en 1813.

En phase

Un chef peut-être «invité» ou «permanent». Dans le premier cas, il ne travaille avec un orchestre que le temps des répétitions et d’un ou plusieurs concerts. Mais lorsqu’il est lié par contrat, son travail est de plus longue haleine. Il commence par une phase de préparation durant laquelle il s’imprègne de l’œuvre à diriger : il en apprend la structure et décide de l’interprétation qu’il veut en faire. Grâce à ses gestes et ses expressions faciales, il doit ensuite la communiquer, durant la phase de répétition, à ses musiciens. Le tempo, la mesure, le démarrage de chacun des pupitres et les nuances à apporter… Un simple coup d’œil au chef leur permet de s’adapter aux attentes de celui-ci afin d’être prêts pour la dernière phase, le concert.

Mémoire(s) en or

S’il est une chose que les chefs d’orchestre ont d’extraordinaire, c’est leur mémoire. Ou plutôt leurs mémoires. Si la profession exige d’avoir une bonne mémoire épisodique (celle qui sert à se souvenir des événements passés, en contexte) afin de se rappeler, par exemple, du déroulement des répétitions, c’est principalement leur mémoire de travail qui est hors du commun. Celle-ci permet de maintenir en mémoire une information le temps de travailler dessus. En effet, ils sont capables d’enregistrer une série importante d’informations (la production des différents musiciens) pour la manipuler, la retravailler et la mélanger avec le répertoire de sons stockés dans leur cerveau. Ils la restituent différemment en travaillant avec leur orchestre pour se rapprocher de leur représentation mentale de l’œuvre. Enfin, leur mémoire procédurale, celle des gestes, est elle aussi impressionnante. Ils développent ainsi une gestuelle d’une infinie précision.

Sport de haut niveau

En cela, les capacités des chefs d’orchestre tiennent de celles des athlètes. Comme pour les sportifs de haut niveau qui doivent anticiper la réaction de leur adversaire, le chef doit montrer aux musiciens ce qu’ils doivent faire avant qu’ils ne jouent tout en anticipant les problèmes. Ils adaptent donc leurs gestes en fonction des circonstances, une répétition, un concert ou un orchestre ne ressemblant jamais à un autre.

Un cerveau à part

Et si exercer cette profession avait des conséquences sur le cerveau ? Pour son documentaire, Michel Cymes s’est prêté à une expérience, avec Alain Altinoglu. L’un et l’autre ont écouté de la musique puis une succession de mots. Leur neuroradiologue a découvert que lorsque le chef d’orchestre doit comprendre le sens des mots, les deux hémisphères de son cerveau sont sollicités, notamment le lobe temporal de l’hémisphère droit, région surtout connue à gauche pour être l’aire de la compréhension du sens des mots. Ainsi, lorsqu’Alain écoute de la musique, c’est comme s’il écoutait du langage. Il possède donc une aire pour la compréhension des mots et une autre pour celle de la musique.

Cet article est paru dans le magazine Télépro du 1/10/2020

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