Les morts de Pompéi ont la parole
Deux mille ans après la catastrophe, les scientifiques font parler les antiques victimes de l’éruption du Vésuve. Ce samedi à 20h50, Arte diffuse «Pompéi, ses nouveaux secrets».
Comment s’appelait cette femme ? Et l’homme, quel était son nom ? Leurs squelettes viennent d’être retrouvés dans une villa de Pompéi. Elle est couchée sur un lit. Auprès de son squelette, un véritable petit trésor : des pièces d’or, d’argent et de bronze, quelques bijoux, dont des boucles d’oreilles en or et des perles. Lui se trouve au pied de la couche. Que leur est-il arrivé ? Quel drame ont-ils vécu ? Deux mille ans après leur mort, grâce au travail acharné d’archéologues qui les ont enfin retrouvés, on peut enfin l’imaginer.
La tragédie
« Un reflet vibrant de la culture et de la société romaines » : c’est ainsi que le site de l’Office du tourisme italien décrit Pompéi, frappé par une tragédie en l’an 79 ap. J.-C. Les Pompéiens y mènent alors une vie prospère, animée par une économie florissante et de multiples activités de loisirs. La plus grande partie des habitants (entre 20.000 et 30.000 selon les sources) ignore sans doute qu’elle vit au pied d’un des volcans les plus puissants d’Europe. Ce jour-là (pour certains le 24 août à 13h, pour d’autres, à une date indéterminée entre le 17 et le 24 octobre 79), le Vésuve se déchaîne. La ville a beau avoir été secouée par des tremblements de terre les jours précédents, personne n’imagine l’ampleur de la catastrophe qui se prépare.
Torrent de cendre
Dans une lettre à l’historien Tacite, Pline le Jeune, avocat et politicien, décrit l’éruption : « La nuée s’élançait dans l’air, sans qu’on pût distinguer à une si grande distance de quelle montagne elle sortait. » Il ajoute : « La mer semblait se renverser sur elle-même (…). Je tourne la tête et j’aperçois derrière nous une épaisse fumée qui nous suivait, en se répandant sur la terre comme un torrent… » L’éruption meurtrière dure plus de 18 heures. 12 kilomètres cubes de débris sont projetés jusqu’à 32,1 kilomètres dans les airs. Écrasés sous les décombres de leur maison, asphyxiés par les cendres incandescentes et le nuage mortel d’une température de plus de 100° C, engloutis par la lave, 2.000 Pompéiens perdent la vie. Jugée impossible à reconstruire par l’empereur Titus, Pompéi tombe petit à petit dans l’oubli.
La résurrection
Elle en sort quinze siècles plus tard. En 1594, la ville martyre est redécouverte lors de travaux. Il faut attendre 150 ans pour que les premières fouilles soient organisées. En 1848, la technique du moulage de corps donne une autre dimension au site, désormais ouvert au public. Rues, habitations, monuments : les découvertes archéologiques foisonnent. Depuis lors, plus d’un millier de victimes pétrifiées ont été retrouvées. Armés de nouvelles techniques et du désir profond de faire parler cette ville et ses antiques victimes, les scientifiques actuels continuent à découvrir sur place des témoignages insoupçonnés du passé.
Des gladiateurs…
Au début de cette année, la direction du site annonçait une découverte. Lors de travaux de rénovation d’une maison de la cité antique, des fresques d’une « grande valeur » étaient mises au jour. Il s’agit de portraits de femmes, de représentations de scènes mythologiques et de natures mortes. Au début de l’été, d’autres témoins invisibles jusque-là retrouvaient la lumière : des croquis de gladiateurs combattant des animaux. Des dessins réalisés au fusain sur les murs d’une habitation… par des enfants âgés de 6 à 7 ans. Concernant les victimes humaines, les recherchent ont elles aussi progressé ces dernières années. En 2020, les archéologues avaient découvert un groupe de treize personnes baptisées « les fugitifs de Pompéi ». Elles appartenaient à des familles d’agriculteurs et de commerçants et tentaient d’échapper à la catastrophe.
…et beaucoup d’autres
En mai dernier, la population décimée de la ville livrait de nouveaux secrets. Grâce à de nouvelles méthodes d’extraction et de séquençage de l’ADN, six chercheurs redonnaient la parole à un des témoins muets de la catastrophe. Parmi les victimes retrouvées en 1932 et 1933 dans ce qu’on appelle « la maison du forgeron », on peut maintenant affirmer qu’il y avait une femme de 50 ans mesurant 1m53 et un homme âgé de 35 à 40 ans mesurant 1m64. Il souffrait d’une infection de la colonne vertébrale due à la tuberculose. Qui étaient l’homme et la femme dont les squelettes ont été découverts au mois d’août dernier ? Au rythme où vont les progrès de la science, leur identité sera peut-être un jour révélée…
Cet article est paru dans le Télépro du 26/9/2024
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