Le yoga par les racines
Dimanche, l’actrice allemande Esther Schweins nous emmène au cœur de l’Inde, à la découverte d’une discipline spirituelle qu’elle pratique depuis l’adolescence.
S’il est difficile de recenser le nombre exact d’adeptes à travers le monde, ils sont assurément plusieurs dizaines de millions. Pratique indienne à la fois corporelle et spirituelle, le yoga, dont les bienfaits contre l’anxiété, la dépression et les troubles du sommeil sont régulièrement étudiés, est entré dans les mœurs occidentales.
Divin yoga
Le mot «yoga», issu de la langue sanskrite, signifie «atteler ensemble, joindre, unir». Selon l’historien Bernard Sergent, cette association de termes permet de comprendre l’essence même de la discipline, «unir en un même attelage l’âme universelle du monde». La notion du yoga apparaît déjà dans des textes fondamentaux hindouistes datés entre le Ve et le IIe siècle avant J.-C. «Le yoga est en fait la clef de voûte de l’hindouisme», affirme la spécialiste de l’Inde, Tara Michaël, au magazine Le Point. «C’est une prise de conscience du caractère insatisfaisant de la condition humaine.» Depuis sa naissance, le yoga a donc eu le temps d’évoluer et de donner vie à des extensions de sa pratique originelle, comme le yoga ascétique ou même le yoga érotique. Celui auquel les adeptes s’adonnent aujourd’hui n’a plus grand-chose à voir avec le concept initial qui se concentrait bien plus sur la méditation que sur les fameuses postures que nous connaissons, appelées asanas. Le yoga contemporain, principalement rythmé par ces asanas, n’est en réalité qu’une branche du yoga, le hatha-yoga ou yoga d’effort. «Le yoga de consommation courante n’est rien d’autre qu’une gymnastique de bonne santé», poursuit Tara Michaël. «Quiconque doué de souplesse physique, d’énergie et d’un peu de bagout, peut s’improviser en six mois professeur de yoga.»
Yoga et prosélytisme
Fort de son succès mondial, le yoga est une discipline qui fait aujourd’hui rayonner l’Inde dans le monde entier. Depuis son arrivée au pouvoir, en 2014, le premier ministre indien Narendra Modi, membre du parti nationaliste hindou, le Bharatiya Janata Party (BJP), l’a bien compris : il est à l’origine d’une résolution de l’ONU qui a fait du 21 juin la journée mondiale du yoga. La discipline est aussi, depuis 2016, inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’Humanité par l’Unesco. Mais ces manœuvres sont bien plus politiques qu’il n’y paraît. «Les nationalistes hindous ont transformé le yoga en un instrument politique», assène le sociologue Deepak Metha au Soir. Et à la question de savoir si encourager cette pratique n’est pas tout simplement se mettre au service du bien-être des citoyens, la réponse de Deepak Metha est sans équivoque. «En cinq ans, les Indiens urbains ne se portent pas mieux pour autant et sont toujours plus obèses et consuméristes. Le problème est que le BJP utilise l’espace public pour des pratiques qui ont une lourde connotation religieuse.»
Le documentaire «L’Inde, le berceau du yoga» est diffusé dimanche à 12h05 sur Arte.
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