Le tardigrade ? Il nous enterrera tous !
Dans un documentaire mêlant humour et rigueur, ce samedi à 22h05, Arte s’intéresse à un petit animal fascinant, à la fois terrestre et aquatique : le tardigrade.
Minuscule, boudiné, trapu et pas franchement premier prix de beauté, le tardigrade, également appelé ourson d’eau, ne possède rien du physique de super-héros. Et pourtant, plus fort que Superman et Ironman réunis, ce petit être semble survivre à tout. Une incroyable robustesse qui passionne les scientifiques depuis de nombreuses années.
Résilience inédite
C’est en 1773 que le tardigrade est décrit pour la première fois par le biologiste allemand Johann Goeze. Quatre ans plus tard, observant cette étrange bestiole, dont la taille adulte est comprise entre 0,1 et 1,5 mm, Lazzaro Spallanzani, zoologiste italien, décide de la nommer « Tardigrada », soit « marcheur lent ». Il faudra attendre le début du XXe siècle pour que le biologiste français Paul Bert décide que la taille ne compte pas et que, aussi petit soit-il, le tardigrade est capable de grandes choses. Ainsi commence le long calvaire des 1.300 espèces connues.
Depuis Bert, qui testa la résistance de ces animaux à des pressions extrêmement élevées, rien ne leur a été épargné : déshydratation, manque d’oxygène, produits toxiques, vide spatial, températures glaciales de -273 °C, pression de 6.000 bars ou radiations monumentales… Ils survivent à presque tout !
L’art de la cryptobiose
Mais comment font-ils ? Leur premier pouvoir est la cryptobiose : le tardigrade rétracte ses huit pattes, se déshydrate et réduit son processus métabolique jusqu’à un niveau indétectable. En quelque sorte, il met sa vie sur pause pour entrer en « dormance ». Certaines études ont démontré que cet état pouvait durer des décennies.
Si le phénomène de cryptobiose est connu depuis longtemps, les chercheurs butaient toujours sur une question : comment les tardigrades comprennent-ils qu’ils doivent entrer en dormance ou en sortir ? Mystère résolu en janvier 2024 et détaillé dans la revue scientifique Plos One : les tardigrades possèdent des capteurs dans leurs cellules qui les alertent lorsque ces dernières produisent trop de molécules nocives, appelées « radicaux libres ». « En s’y fixant, les radicaux libres oxydent le capteur et indiquent ainsi aux cellules du tardigrade d’entrer en cryptobiose », détaille-t-on dans le magazine Science et Avenir. « Une fois les conditions améliorées et les radicaux libres disparus, le capteur n’est plus oxydé et les oursons d’eau sortent de leur dormance. »
Application humaine
Les tardigrades sont aussi capables de créer une protéine qui se transforme en gel pour préserver les cellules des effets du dessèchement durant leur dormance. De quoi entrevoir des possibilités inédites pour l’humain. « Cette trouvaille pourrait ouvrir la voie à une lyophilisation des médicaments fragiles, comme les vaccins, qui n’auraient alors plus besoin d’être congelés », relate le documentaire d’Arte. « Identifiée à Tokyo, une autre molécule suscite, enfin, de grands espoirs : lorsqu’ils sont irradiés à très haute dose, les tardigrades déploient un bouclier qui protège leur ADN. Cette découverte va-t-elle booster la conquête de l’espace ? »
Cet article est paru dans le Télépro du 2/1/2025
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