L’Alhambra : trésor oriental en Occident
Surplombant la ville andalouse de Grenade, l’Alhambra est un joyau de l’ultime royaume musulman d’Espagne.
«L’Alhambra ! L’Alhambra ! Palais que les génies ont doré comme un rêve et rempli d’harmonies », écrit Victor Hugo dans son recueil de poèmes « Les Orientales » au sujet de ce joyau de l’art islamique suscitant l’admiration de trois millions de visiteurs chaque année. Samedi à 20h50 avec le documentaire « Alhambra – Le trésor du dernier sultanat d’Espagne », Arte explore cette cité palatiale fortifiée, un enchevêtrement de constructions réalisées entre le XIIIe et le XVe siècles pour la résidence, l’exercice du pouvoir et le loisir des sultans nasrides.
Cernée de murailles au sommet d’une colline surplombant Grenade, la cité palatiale de l’Alhambra (« la Rouge » en arabe) ressemble, de l’extérieur, à une forteresse austère. Pourtant, l’ensemble, qui compte résidences, bains et mosquée, abrite en son sein de véritables prouesses ornementales, nées du mariage de l’art et de la science.
Œuvre des Nasrides
Pour comprendre sa raison d’être, il faut remonter à l’an 711, lorsque les troupes musulmanes venues d’Afrique du Nord envahissent la péninsule ibérique et s’emparent d’un territoire, renommé Al-Andalus. Au XIIIe siècle, seule une partie du sud de l’Espagne a résisté aux guerres civiles entre Arabes et Berbères et aux assauts des royaumes catholiques : le sultanat de Grenade.
En 1238, le sultan Mohammed Ier, fondateur de la dynastie nasride, entame à Grenade la construction d’une forteresse. Tour à tour, les sultans qui lui succèdent bâtissent ou réaménagent des palais, agrandissent la cité et ses fortifications. Les édifices les plus célèbres de l’Alhambra – le palais de Comares et la cour des Lions – sont l‘œuvre des sultans Yusuf Ier et de son fils Mohammed V, entre 1333 et 1354.
Rivalités internes, échecs militaires, tributs de plus en plus lourds à payer aux royaumes catholiques… À partir du XVe siècle, le sultanat de Grenade connaît un déclin progressif. Alors que le mariage d’Isabelle de Castille et de Ferdinand d’Aragon ouvre la voie à un État chrétien espagnol unifié, l’assaut sur le territoire d’Al-Andalus est lancé en 1482. Après dix ans de guerre, le sultan Boabdil doit se résoudre à la capitulation et s’exile dans les montagnes de la Sierra Nevada.
Sauvé par sa magnificence
Découvrant alors l’Alhambra de l’intérieur, les rois catholiques sont éblouis par le raffinement extrême de l’architecture et de la décoration de cet ensemble, qui rassemble les savoirs – notamment mathématiques et géométriques – accumulés durant huit siècles d’occupation musulmane. Les murs des palais sont recouverts de décorations et d’écritures et les jardins sont irrigués par un ingénieux système hydraulique. Ainsi, plutôt que de s’en prendre aux ultimes symboles du peuple vaincu, le couple royal protège ce joyau et finance même les réparations. Conquise, l’Alhambra est ainsi sauvée par sa magnificence !
Au fil des siècles suivants, l’Alhambra se transforme, se modernise et se christianise. Entre autres, Charles Quint y fait construire une résidence de grande ampleur et la mosquée cède la place à une église. Au XIXe siècle, en partie détruite – par les armées napoléoniennes, puis un séisme -, souvent squattée, régulièrement pillée, l’Alhambra est alors abandonnée à sa déchéance, avant d’être redécouverte par l’historien et écrivain américain Washington Irving. À l’origine de travaux de restauration par le gouvernement espagnol, son plaidoyer pour le sauvetage de l‘Alhambra va changer le destin de ce joyau d’Orient en Occident…
Cet article est paru dans le Télépro du 24/10/2024
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