La paix des Indiens

Représentation du fameux calumet de la paix © Arte/Les Films d'Ic

Déterrer la hache de guerre ou fumer le calumet de la paix ? Ces deux expressions nous viennent des Indiens d’Amérique.

C’est une formule qu’on lit souvent dans la presse. Quand deux parties trouvent un accord à la suite de longues divergences, on dit qu’elles fument le calumet de la paix. Ce samedi à 18h15 sur Arte, l’émission «Faire l’histoire» revient sur l’origine de cet étrange objet qu’est le calumet.

La Nouvelle-France

L’histoire remonte à 1515, lorsque François Ier monte sur le trône de France. Il jalouse ses grands voisins européens partis depuis quelques années à la conquête de territoires d’outre-mer. En 1524, le Roi mandate un premier explorateur à la découverte du nord de l’Amérique. C’est le début de la Nouvelle-France, un immense territoire qui va s’étendre de l’Atlantique au golfe du Mexique, avec Québec pour capitale.

Sur place, les Français entrent rapidement en contact avec les différents peuples amérindiens. Ils cherchent à les coloniser, mais ils ont d’abord besoin d’eux. Pour progresser dans ces contrées qui leur paraissent bien sauvages, puis pour faire commerce, notamment de peaux de castor, très appréciées en Europe.

Cartier et Champlain

Parmi les explorateurs français, on se souvient de Jacques Cartier. C’est l’un des tout premiers. Il débarque dans le golfe du Saint-Laurent en 1534. Dans ses carnets, il attribue à cette terre le nom de «Canada». Il décrit aussi un étrange rite indien où l’on fume…

L’histoire a également retenu le nom de Samuel de Champlain, fondateur de Québec. En 1603, alors qu’il fait halte dans la petite ville de Tadoussac pour traiter du commerce de fourrure, il est invité à un festin. Le grand chef du peuple montagnais fête sa victoire sur l’ennemi iroquois. Champlain est frappé par les scalps conservés comme trophées, puis par une étonnante cérémonie autour d’une longue pipe. Il lui donne le nom de «calumet», dérivé de «chalumeau».

Passeport diplomatique

Les Français comprennent vite que le calumet est un objet important pour les Indiens. Ce n’est pas la pipe qu’ils fument au quotidien, c’est un objet symbolique. Au XXe siècle, les historiens des cultures amérindiennes établiront qu’il avait d’abord une fonction spirituelle. Par la fumée, les Indiens créaient un lien entre la terre et le ciel pour entrer en contact avec les esprits.

Mais à l’époque, les Français y voient d’abord un objet utilitaire : s’ils disposent de cette longue pipe, ils pourront approcher plus facilement les Indiens. Le calumet devient pour eux une espèce de passeport diplomatique. On raconte ainsi que Jacques Marquette, missionnaire jésuite, remonte tout le Mississippi en présentant son calumet aux peuples indiens qu’il croise.

De Voltaire à Tintin

L’objet traverse l’Atlantique au début du XVIIIe siècle, lorsque des Amérindiens sont reçus par le Roi à Versailles. Le Tout-Paris se prend alors de folie pour les Indiens. En 1736, Rameau exploite le filon dans un opéra-ballet, «Les Indes galantes», dont le dernier tableau présente une scène de danse sauvage autour du calumet de la paix.

L’expression est ensuite reprise par Voltaire, par Chateaubriand… Jusqu’à faire partie de l’image qu’on associe traditionnellement aux Indiens. On retrouve donc le calumet de la paix dans Lucky Luke, chez Walt Disney ou dans Tintin. Fumer le calumet de la paix, c’est une manière d’enterrer la hache de guerre. Cette autre expression vient aussi des Amérindiens, qui enterraient leurs armes pour marquer la fin d’un conflit.

Cet article est paru dans le Télépro du 9/12/2021

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