Kromdraai : nos origines sont-elles à revoir ?

Surnommé le berceau de l’Humanité, le site sud-africain de Kromdaai regorge de réponses sur nos origines © France 5/Ex Nihilo/Et alors Production

D’où venons-nous ? Il n’y a toujours pas de réponse précise. Toutefois, de récentes recherches apportent de nouvelles données qui pourraient changer la donne… Ce jeudi à 20h55, France 5 diffuse le documentaire «Kromdraai, à la découverte du premier humain».

Comment les humains sont-ils apparus ? Pour trouver le plus d’indices, il faut se rendre en Afrique du Sud, à Kromdraai («petite route sinueuse»), site préhistorique de la province du Gauteng, au nord-ouest de Johannesburg, dans une vallée que l’Unesco a baptisée «le berceau de l’Humanité».

Car c’est là que le plus grand nombre de vestiges de nos lointains aïeux a été découvert !

Plus de croisements génétiques

En fouillant ces terres, José Braga, paléoanthropologue français, a mis la main, en 2014, sur les ossements de deux enfants qui auraient vécu il y a 2,5 millions d’années. Ce sont actuellement les plus vieux fossiles jamais mis au jour.

Plusieurs de ces restes viennent d’un humain et les autres du paranthrope, l’un de nos plus proches cousins. Grâce aux nouvelles techniques de géolocalisation et d’analyses ADN, les scientifiques pourraient enfin lever le voile sur les origines de notre genre, comme le montre jeudi soir, sur France 5, un documentaire de Cédric Robion, récemment couronné par le prix du Public au Festival du film scientifique de Pariscience.

Jusqu’ici, tous s’accordaient à dire que les humains auraient émergé à partir du genre Australopithecus par un processus continu. Or, selon de nouveaux constats, celui-ci aurait plutôt été progressif et aurait bénéficié de croisements entre les êtres alors présents dans la région et les territoires voisins.

Origines multirégionales

Nos ancêtres génétiques auraient ainsi émergé dans les interactions de nombreuses populations à travers l’Afrique. Eleanor Scerri, de l’Université d’Oxford et coauteure d’un article paru dans Trends in Ecology and Evolution, explique : «Les preuves fossiles suggèrent que l’idée d’Homo sapiens évoluant dans une seule population et dans une seule région est désormais trop simpliste.»

L’expert Chris Stringer a aussi fait valoir que nos origines pourraient être «multirégionales» dans des zones variées d’Afrique, chacune ayant joué un rôle à différents moments. Il s’avèrerait également que l’Afrique du Nord-Ouest a joué un rôle dans l’évolution de notre espèce.

Comme Scerri le souligne : «Nous pensons désormais qu’une vaste gamme d’humains vivait sur tout le continent, du Maroc à l’Afrique du Sud. Tous semblaient différents les uns des autres, avec un large éventail de traits du visage et de formes de crâne – un peu comme nous aujourd’hui. L’Homo sapiens semble même avoir été plus diversifié physiquement que les populations mondiales d’aujourd’hui, ce qui ne cadre donc plus avec l’idée qu’elles ont toutes commencé à partir d’un petit groupe !»

L’histoire ne fait que commencer

Selon Vanessa Hayes, du Garvan Institute of Medical Research en Australie, qui a dirigé de nouvelles recherches : «Même si la population fondatrice décrite est la source de notre ADN, de nombreuses autres ont probablement contribué au pool génétique actuel.»

Les premiers humains «anatomiquement modernes» auraient émergé il y a 200.000 ans dans les zones jadis humides qui s’étendaient à travers le Botswana, dans le sud de l’Afrique. Les changements climatiques ultérieurs ont ensuite ouvert des couloirs verts au nord-est et au sud-ouest, conduisant nos ancêtres à se disperser plus loin.

La complexité de notre image évolutive conduit ainsi les spécialistes à délaisser l’hypothèse que nous avons émergé d’un lieu unique qui s’est ramifié en un arbre généalogique mondial. Ils suggèrent que notre espèce s’est développée à partir de plusieurs points, tel un ruisseau avec beaucoup d’apports qui conduisent au puissant mélange coulant aujourd’hui dans nos veines.

La biologiste évolutionniste Carina Schlebusch de l’Université d’Uppsala, en Suède, conclut : «Nous avons une longue histoire avec de nombreux ancêtres ayant contribué à nos génomes actuels. Et nous avons donc encore beaucoup de faits à découvrir !»

Cet article est paru dans le Télépro du 18/11/2021

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