Joseph Bologne, le Mozart noir

Joseph Bologne de Saint-George (1745-1799) © Getty Images
Alice Kriescher Journaliste

Après une première partie de soirée consacrée à Mozart, France 4 propose ce samedi à 23h55 de découvrir les mélodies de Joseph Bologne de Saint-George (1745-1799), à travers le documentaire «Saint-George, le Mozart noir».

Personnage singulier, plus connu sous le nom de Chevalier de Saint-George, Joseph Bologne a marqué l’histoire de la musique du XVIIIe siècle avant de tomber dans l’oubli.

Fils de gentilhomme

Joseph Bologne, né en Guadeloupe en 1745, est le fruit des amours entre Georges de Bologne, maître planteur, et son esclave, Nanon. Aussi étonnant que cela paraisse pour l’époque, Georges reconnaît officiellement son enfant et l’installe en France pour lui garantir la meilleure éducation possible. Selon l’article 59 du Code Noir d’alors, «toute personne de couleur, même née d’une mère esclave, qui arrive alors sur le territoire français, est affranchie, libérée de la servitude par le pouvoir du sol du royaume».

Une fois affranchi, Joseph possède donc les mêmes droits et privilèges que les individus nés libres. «Joseph Bologne est un affranchi, métis, « mulâtre » comme on dit alors, mais il est surtout fils d’un gentilhomme (ndlr : personne issue de la noblesse)», relate le site de Radio France. «Si la distinction de race est évidente dans cette France du XVIIIe siècle, elle fait partie d’un système inégalitaire où la noblesse domine, et Joseph se trouve du bon côté de cette distinction.»

Favori de la Reine

Très vite, le Chevalier de Saint-George se fait un nom dans la haute aristocratie française. Non seulement il excelle dans l’art de l’escrime, mais il fait aussi preuve d’un talent hors norme pour la musique. «Bien qu’il soit né une dizaine d’années avant Mozart, on lui a souvent donné le surnom de « Mozart noir », tant sa précocité et son talent faisaient penser au compositeur autrichien», explique le site de la RTBF.

Marie-Antoinette tombe vite sous le charme de la virtuosité de Saint-George et en fait son précepteur de musique. Quant à Louis XVI, il le nomme à la direction de l’Opéra Royal. La polémique raciste ne tarde cependant pas à enfler, forçant le Roi à révoquer ce choix. Outre sa carrière artistique, le Chevalier embrasse le mouvement des Lumières et brille au niveau militaire. «Il sera le premier franc-maçon de peau noire. En 1790, il s’engage dans la Garde Nationale», détaille le site du Portail des Outre-mer. «En 1793, il devient le premier colonel noir de l’armée française et crée un régiment de Noirs et de Métis, rapidement appelée la « Légion de Saint-George ».»

Chevalier terrassé

Le vent antiroyaliste soufflé par la période dite de la Terreur, entre 1793 et 1794, ne lui vaut rien de bon. Soupçonné de sympathie royaliste, il est fait prisonnier durant plusieurs mois. «Privé de tous ses revenus par les événements politiques, il passa ses dernières années dans un état voisin de la misère. Un ulcère à la vessie le conduisit au tombeau le 10 juin 1799, à l’âge de 53 ans», détaille son contemporain, le musicien belge François-Joseph Fétis. Quant à la postérité, Saint-George en sera privé par Napoléon Bonaparte qui, trois ans après la mort du compositeur, rétablit l’esclavage et exclut du répertoire officiel les œuvres du Chevalier… 

Cet article est paru dans le Télépro du 17/11/2022

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